Non content d’afficher toute honte bue et sans réserve son antisémitisme, le pouvoir algérien semble avoir décidé d’en finir une bonne fois pour toutes avec les libertés religieuses dans le pays.
Dernière victime en date de ce fanatisme religieux: l’association caritative catholique Caritas, qui oeuvrait en Algérie depuis 1962, année de l'indépendance de ce pays, pour venir en aide aux plus pauvres, quelle que soit leur confession ou leur origine.
La nouvelle est tombée comme un couperet pour l’archevêché, qui a fait part de cette décision dans un communiqué publié sur internet il y a deux jours, le 27 septembre, et qui a été cosigné par Mgr Paul Desfarges, l’archevêque d’Alger, et président de l’association, et par Mgr Jean-Paul Vesco, son successeur à Alger.
«L’Eglise catholique en Algérie a le regret d’annoncer la fermeture complète et définitive de son service appelé ‘Caritas Algérie’, à partir du 1er octobre, et ce conformément à la demande des pouvoirs publics», a-t-il ainsi été publié.
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Pourtant, «en soixante ans d’existence, des initiatives ont été prises en faveur des personnes handicapées, des femmes et des enfants défavorisés mais aussi des migrants qui traversent le pays en provenance d’Afrique subsaharienne», explique-t-on sur le site de Vatican News, qui explique que 97% des personnes les plus vulnérables aidées par l’association étaient de confession musulmane.
La complotite aigüe du régime algérien à l’origine d’une décision arbitraire?Qu’est-ce qui a bien pu motiver une telle décision? Taxée «d’organisation non autorisée» par les autorités algériennes, explique l’archevêque d’Alger Jean-Paul Vesco à l’AFP, Caritas Algérie a pourtant été constituée le 28 juin 1962, et s'est toujours mise au service des plus vulnérables et du peuple algérien, indique ainsi Vatican News.
Par ailleurs, explique-t-on, Caritas est un «service» mis en place par l’Association Diocésaine d’Algérie (ADA), «une association de droit algérien agréée par l’Etat».
L’Eglise catholique, qui marche littéralement sur des œufs, laisse supposer une méfiance des autorités algériennes, dans un «moment délicat», vis-à-vis des associations étrangères, espérant que l’Eglise en elle-même ne fasse pas l’objet d’une hostilité particulière.
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«Peut-être parce que Caritas s’appelle Caritas, les autorités ont pu penser que nous étions en lien avec Caritas Internationalis (une ONG internationale qui a pour mission de servir les pauvres et de promouvoir la Charité et la justice partout dans le monde, Ndlr) et donc, nous donnions l’impression d’être sous l’autorité d’une organisation étrangère», avance une source au média du Vatican, précisant toutefois qu’il a bien été expliqué aux autorités algériennes que la réalité de Caritas Algérie est dévouée uniquement aux activités caritatives de l’Eglise locale.
En effet, confirme le site de RFI, Monseigneur Jean-Paul Vesco a bien tenté de convaincre les autorités que Caritas n’était pas une ONG, au cours de l'unique réunion qui a eu lieu entre les responsables de l’association et les autorités.
Toutefois, expliquent des sources locales, si le ministère de l’Intérieur algérien a reproché dans ses courriers à l’intention de Caritas, le fait que l’Eglise catholique «dissimulait» une organisation non autorisée qui menait des activités «hors-la-loi», à aucun moment référence n’a été faite d’articles de lois qui auraient prétendument été enfreints, relève le périodique espagnol El Debate.
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Devant ce refus catégorique, visiblement arbitraire, et cette impossibilité de trouver un accord, l’Archevêque d’Alger a bien une explication, la plus probable à ses yeux: les activités d’appui aux migrants ont pu également froisser l’Etat. C’est cette explication «qui sans doute est à l’origine des décisions des autorités», avance ainsi l’archevêque d’Alger.
Une supposition qui peut faire sens, dans un pays accusé de longue date par des ONG algériennes et internationales d’arrêter arbitrairement et d’expulser collectivement des ressortissants d’Afrique Subsaharienne, en les abandonnant, sans eau ni nourriture, en plein désert.
Sans compter l’implication avérée des autorités algériennes le 24 juin dernier dans le drame de Melilia, lesquelles, selon des éléments recueillis par de hautes sources sécuritaires espagnoles dans le cadre d’une enquête de fond, instrumentalisent les migrants illégaux pour faire pression sur l’Espagne et brouiller les relations diplomatiques entre Rabat et Madrid.
Après l’antisémitisme, l’antichristianisme…Si l’Eglise catholique en Algérie ne pense pas «être la cible d’une hostilité particulière», espère une source sur le site d’actualité du Vatican, et envisagerait l’avenir avec «patience et espérance», il n’en demeure pas moins qu’elle insiste sur le fait que «l’Eglise ne peut être Eglise si elle n’est pas servante».
L’ADA souhaite ainsi pouvoir continuer à apporter son aide aux personnes qui en auraient besoin, mais cela reste soumis à «des modalités à définir».
L’espoir de l’Eglise catholique en des lendemains meilleurs pourrait malheureusement être de l’ordre du fantasme, car les autorités algériennes ont, depuis quelques années, érigé la culture de la haine de l’autre au rang de doctrine d’Etat.
Dernier fait en date, le limogeage en octobre 2021 des responsables de la radio Cirta, basée à Constantine, pour avoir diffusé sur ses ondes la chanson «Laylet Eid» («Jingle Bells») de la célèbre chanteuse libanaise de confession chrétienne Fayrouz. Cette chanson, connue dans le monde entier, a en effet été accusée de «glorifier la religion chrétienne».
Malgré l’immense tollé provoqué par cette décision auprès des intellectuels du pays et d’internautes, rien n’y a fait et une enquête a même été ordonnée contre les responsables de la radio.
Loin d’être un fait divers anecdotique, cette sanction est un pas de plus fait dans la promotion de la haine entre religions et entre peuples, distillée par la junte au pouvoir, laquelle assumait déjà de longue date son antisémitisme.
L’Algérie, sujette à sanctionsEt de la même manière que la haine des juifs a été banalisée avec l’adoption sans vergogne aucune d’un lexique antisémite dans les médias et par les plus hautes autorités du pays, au vaseux prétexte de se défendre contre une prétendue «menace sioniste», il y a fort à craindre que le christianisme fasse lui aussi les frais de cette politique d’intolérance qui met à mal les libertés religieuses.
En novembre 2021, les Etats-Unis avaient d’ailleurs placé l’Algérie sur une liste «de surveillance spéciale», où sont regroupés les pays qui ont commis ou toléré des «violations graves de la liberté religieuse». Antony Blinken, le secrétaire d’Etat américain, avait alors indiqué dans un communiqué que cette décision d’ajouter l’Algérie à cette liste noire intervenait à la suite d’une recommandation de la Commission des Etats-Unis sur la liberté religieuse internationale (USCIRF).
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Ladite commission américaine avait en effet fait observer que la nouvelle Constitution algérienne, adoptée dans la foulée des protestations populaires civiles, représente une «nouvelle érosion» des conditions de la liberté religieuse en Algérie, pays «qui a une longue histoire d’oppression et de persécution des minorités religieuses», était-il ajouté.
Cette nouvelle Constitution soulève de «sérieuses inquiétudes» quant à l’avenir de la liberté religieuse dans ce pays, précisait par ailleurs cette instance établie par le Congrès américain, et qui a pour mission de surveiller, analyser et signaler les menaces à la liberté religieuse internationale, avant d’émettre des recommandations de politique étrangère au Président, au secrétaire d’Etat et au Congrès.
La décision des autorités algériennes de fermer l’association caritative chrétienne Caritas sur son sol risque fort d’aggraver la situation du pays aux yeux de l’USCIRF et des Etats-Unis, qui considèrent que les pays figurant sur cette Watch list doivent prendre des mesures pour lever les menaces à la liberté religieuse ou faire face à des sanctions. Cette décision rend aussi la vie très difficile à une très petite minorité de confession chrétienne, encore présente en Algérie.