France: fragile retour au calme en Nouvelle- Calédonie, premières évacuations en vue

De la fumée s'élève au loin alors qu'un slogan de soutien aux autochtones kanaks est affiché sur un pont à Nouméa, en Nouvelle-Calédonie, territoire français du Pacifique, le 21 mai 2024. AFP or licensors

Un premier vol est arrivé mardi pour évacuer des touristes bloqués en Nouvelle-Calédonie, territoire français du Pacifique sud toujours à l’arrêt après une semaine d’émeutes, malgré de «nets progrès» en matière de sécurité vantés par le président Emmanuel Macron.

Le 21/05/2024 à 07h14

Huit jours après le début de violences inédites en 40 ans sur l’archipel français, le fragile retour au calme «se poursuit sur l’ensemble du territoire» calédonien, a écrit le représentant de l’État sur place, Louis Le Franc, dans un communiqué publié ce mardi matin.

Il a toutefois annoncé l’envoi d’effectifs supplémentaires «dans les heures à venir» pour juguler les violences qui secouent l’archipel, en réaction à une réforme constitutionnelle décriée par les indépendantistes, et qui ont fait jusqu’à présent six morts.

Car Nouméa et son agglomération continuent d’être le théâtre d’affrontements localisés et les barrages se sont même étoffés par endroits dans la nuit, a constaté un journaliste de l’AFP, auquel plusieurs témoins ont fait état d’importantes détonations et d’affrontements dans le quartier de Tuband.

À l’issue du troisième Conseil de défense organisé en moins d’une semaine, l’Elysée a également annoncé la mobilisation «pour un temps» de militaires afin de «protéger les bâtiments publics» de l’archipel du Pacifique Sud et de soulager policiers et gendarmes.

Les mesures exceptionnelles de l’état d’urgence sont maintenues, à savoir le couvre-feu nocturne, l’interdiction des rassemblements, du transport d’armes et de la vente d’alcool… et l’interdiction de l’application TikTok, qui sera contestée par des défenseurs des libertés devant le Conseil d’État ce mardi à Paris.

Signe de la difficulté pour les forces de l’ordre à reprendre en main la situation sécuritaire, l’aéroport international a annoncé qu’il resterait fermé aux vols commerciaux jusqu’à jeudi. L’Australie et la Nouvelle-Zélande, qui essaient depuis plusieurs jours de rapatrier leurs centaines de ressortissants bloqués, ont annoncé mardi matin l’envoi de plusieurs vols pour les évacuer.

«On ne lâche pas»

Mardi matin, sur la route express qui mène à l’aéroport international, l’entrepôt d’une entreprise de fourniture de bureaux était en feu, dégageant une épaisse fumée noire. Deux carcasses de voitures empilées forment un barrage à 200 mètres de là, de jeunes hommes encagoulés filtrant le passage des voitures.

Sur les barrages, la mobilisation ne semble pas faiblir malgré le déploiement massif de forces de sécurité intérieure, qui dépassent désormais les 2.700 personnes. «On ne lâche pas! On ne lâche pas jusqu’à ce qu’ils retirent le texte (...) Même s’il faut mourir, on restera là sur les barrages», assure à l’AFP Simon, un chauffeur-livreur de 34 ans qui garde un barrage dans le quartier de Montravel, fief indépendantiste.

Certains véhicules peuvent passer, leurs occupants saluent les militants. «Cela fait une semaine qu’on est là, les passants sont habitués», reprend Simon qui assure que certains leur «donnent du pain, de l’eau».

La plupart des barrages sont «filtrants» et laissent passer certains véhicules, comme les pompiers ou ambulances, soutient la Cellule de coordination des actions de terrain (CCAT), collectif indépendantiste accusé par l’État d’attiser les violences mais qui affirme rester «dans une démarche pacifique».

De leur côté, les principales figures non-indépendantistes de l’archipel, réunies en conférence de presse à Nouméa, ont appelé à poursuivre l’examen de la réforme constitutionnelle contestée, qui doit être adoptée avant fin juin. Son retrait serait «une erreur gravissime» qui donnerait «raison aux casseurs, aux pilleurs et aux émeutiers», a asséné le député de Nouvelle-Calédonie, Nicolas Metzdorf.

Pourtant les appels se sont multipliés, de la gauche à l’extrême droite en passant par la majorité et jusqu’à la maire loyaliste de Nouméa, pour réclamer un report de cette réforme. S’il est adopté, le texte aurait pour conséquence de marginaliser les voix de la communauté autochtone kanak, dénoncent les indépendantistes.



Par Le360 (avec AFP)
Le 21/05/2024 à 07h14