Depuis le déclenchement l’adoption sans vote de la réforme des retraites, le 16 mars, et plus encore depuis le 20 mars, quand le gouvernement français est passé à neuf voix d’être renversé à l’Assemblée, le temps politique semble suspendu aux décisions du Conseil constitutionnel, prévue vers 18h00 (16h00 GMT).
Signe d’une grande tension, les neuf membres du Conseil sont sous bonne garde. Toute manifestation aux abords de son siège, situé dans une aile discrète du Palais Royal, à Paris, est interdite depuis jeudi soir après un bref blocage dans la matinée. Et d’impressionnantes barrières anti-émeutes ont été érigées tout autour du bâtiment.
«Une loi injuste»
Emmanuel Macron, son gouvernement et sa majorité attendent une validation, même partielle, de la réforme, pour enfin parvenir à surmonter la contestation qui dure depuis janvier. Et espérer relancer ce second quinquennat entravé par un conflit majeur un an à peine après la réélection du chef de l’État.
Un gendarme français monte la garde alors qu'un périmètre de sécurité est établi autour du Conseil constitutionnel, le jour de sa décision sur la réforme des retraites, à Paris le 14 avril 2023.. AFP
Les oppositions, politiques et syndicales, espèrent de leur côté que le Conseil censurera une réforme à la procédure parlementaire inédite et controversée. «Les gens ne manifestent pas parce que la loi est inconstitutionnelle mais parce que la loi est injuste», a lancé la cheffe des députés de la France insoumise (LFI), Mathilde Panot sur LCI.
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Les décisions du Conseil, chargé de contrôler la conformité des lois à la Constitution, ne sont susceptibles d’aucun recours. La gauche espère aussi un feu vert pour entamer la collecte de 4,8 millions de signatures vers un hypothétique et inédit référendum d’initiative partagée (RIP) destiné à limiter à 62 ans l’âge de la retraite en France.
Réaction syndicale «unanime»
Car les Sages doivent se prononcer sur deux points: la conformité constitutionnelle de la réforme et la possibilité de déclencher une longue et complexe procédure référendaire. Mais quel que soit leur verdict, «le combat syndical est loin d’être terminé», a averti le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, jeudi lors d’une nouvelle journée de manifestation.
Selon le ministère de l’Intérieur, 380.000 manifestants ont défilé en France (1,5 million selon la CGT), pour la douzième journée de mobilisation depuis janvier, le deuxième plus faible score depuis le début du mouvement. Mais l’intersyndicale ne va «pas exploser», a assuré vendredi Sophie Binet, la secrétaire générale de la CGT. Les syndicats répondront «ensemble par une réaction unanime», a-t-elle ajouté.
En attendant, les blocages se sont poursuivis ce vendredi. Des manifestants perturbaient la circulation autour de Rouen dans la matinée, une plateforme alimentaire était bloquée dans le banlieue de Strasbourg et des salariés étaient en grève dans l’entreprise textile Vertbaudet dans la métropole lilloise.
Et ce vendredi soir, des rassemblements sont déjà attendus dans plusieurs. «Le pays ne tournera pas la page», a averti Mathilde Panot. Si le texte est validé, ça «ne ferme pas le débat», a observé le député RN Sébastien Chenu.
Censurera, censurera pas
La pression est donc vive sur le Conseil constitutionnel, présidé par l’ancien Premier ministre socialiste Laurent Fabius et qui compte actuellement dans ses rangs un autre ancien Premier ministre, Alain Juppé, et deux ex-ministres d’Emmanuel Macron (Jacques Mézard et Jacqueline Gourault).
Va-t-il censurer totalement ou partiellement la réforme ? Retrancher les fameux «cavaliers» sociaux ou procéduraux (index séniors, voire CDI séniors) dont l’annulation ne semble faire aucun doute, même au sein du gouvernement, car ils n’auraient rien à faire dans un texte financier ?