Le chef de l’ONU fustige la «punition collective» des Palestiniens

Le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, s'exprime lors d'un entretien avec l'AFP au siège des Nations unies, le 16 septembre 2024 à New York.

Le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, s'exprime lors d'un entretien avec l'AFP au siège des Nations unies, le 16 septembre 2024 à New York. AFP or licensors

«Rien ne justifie la punition collective» infligée par Israël à la population de Gaza qui subit une souffrance «inimaginable», a dénoncé lundi le secrétaire général de l’ONU dans un entretien avec l’AFP.

Le 17/09/2024 à 08h11

«C’est inimaginable le niveau de souffrance à Gaza, le niveau de morts et de destruction n’a pas de parallèle avec ce que j’ai pu voir depuis que je suis secrétaire général», a déclaré Antonio Guterres, à ce poste depuis début 2017.

«Évidemment, nous condamnons toutes les attaques terroristes du Hamas, ainsi que les prises d’otages», mais «la vérité est que rien ne justifie la punition collective de la population palestinienne, et c’est ce que nous voyons de façon dramatique à Gaza», a-t-il ajouté, décrivant les morts, les destructions, la faim, les maladies que subit le territoire assiégé.

Le 7 octobre 2023, des commandos du Hamas infiltrés depuis Gaza dans le sud d’Israël ont mené une attaque d’une ampleur et d’une violence sans précédent, qui a entraîné la mort de 1.205 personnes, en majorité des civils, selon un décompte de l’AFP fondé sur les chiffres officiels qui inclut les otages tués en captivité.

En représailles, Israël a promis de détruire le Hamas, au pouvoir à Gaza depuis 2007, et son offensive aérienne et terrestre a fait au moins 41.226 morts, selon le ministère de la Santé du gouvernement du Hamas à Gaza.

Plus de 200 humanitaires, la plupart de l’ONU, ont également été tués.

Et au nom de tous ces civils, «rendre des comptes est indispensable», a insisté Antonio Guterres. Du côté d’Israël et de ses «violations massives» du droit international, mais aussi du côté du Hamas.

Dans ce contexte, le chef de l’ONU ne cesse de réclamer un cessez-le-feu immédiat, mais les négociations sous l’égide des Etats-Unis, de l’Egypte et du Qatar restent dans l’impasse, et Israël et le Hamas s’accusent mutuellement de ne pas vouloir un accord.

«Déni»

«C’est sans fin», a déploré lundi Antonio Guterres, jugeant qu’il sera «très difficile» de parvenir à un accord, tout en gardant espoir.

Alors que le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu ne répond pas à ses appels depuis octobre, le secrétaire général ne compte pas sur un rapprochement à l’occasion de la semaine de haut niveau de l’Assemblée générale, où il reçoit généralement chaque chef d’Etat et de gouvernement faisant le déplacement.

«Si je comprends bien, il a été dit publiquement qu’il n’a pas l’intention de demander à me rencontrer. Alors bien sûr, la rencontre n’aura probablement pas lieu», a expliqué Antonio Guterres.

Mais ce n’est pas le plus important, a-t-il souligné. «Ce qui compte c’est la souffrance des gens, ce qui compte c’est l’absence de solution politique, ce qui compte c’est le déni constant de la solution à deux Etats et le fait de miner cette solution à deux Etats par des actions sur le terrain, la saisie de terres, les expulsions, les nouvelles colonies, toutes construites illégalement».

Il a d’autre part jugé «improbable» que sa proposition d’une mission onusienne de «surveillance» d’un hypothétique cessez-le-feu soit acceptée par les parties.

Les missions onusiennes nécessitent en particulier le consentement des pays hôtes.

«Pas le pouvoir»

C’est en partie pour cette raison que le Conseil de sécurité a donné mandat il y a près d’un an à une mission multinationale menée par le Kenya, et non onusienne, pour aider la police dépassée par les gangs en Haïti, pays échaudé par de précédentes opérations de l’ONU.

Mais alors que seulement quelques centaines de policiers ont été déployés et que la mission manque cruellement de financement, les Etats-Unis évoquent une transformation en mission onusienne.

L’ONU fera ce que le Conseil et Port-au-Prince demandent, a assuré Antonio Guterres. «Mais ce que je trouve étrange est qu’il soit si difficile de financer une opération de police relativement petite». «C’est absolument inacceptable».

Répondant par ailleurs aux accusations d’impuissance de l’ONU à peser pour mettre un terme aux conflits à Gaza, en Ukraine ou ailleurs, il a mis en cause les Etats membres et en particulier le Conseil de sécurité et ses 15 membres «responsables des décisions prises» ou pas prises.

Le Conseil et les institutions financières internationales sont «obsolètes, ne fonctionnent pas, sont injustes», a-t-il répété.

«Nous avons essayé de trouver des solutions à des guerres, mais le problème, c’est que nous n’avons pas le pouvoir, parfois pas les ressources, pour le faire».

Par Le360 (avec AFP)
Le 17/09/2024 à 08h11