Pétrole: l’Arabie saoudite sabre encore sa production pour doper les cours

Le prince saoudien Abdelaziz ben Salmane, ministre de l'Énergie, à son arrivée pour la réunion de l'Opep+, le 3 juin 2023 à Vienne, en Autriche.

À l’issue de la réunion de l’Opep+, l’Arabie saoudite a décidé de réduire une nouvelle fois sa production de pétrole d’un millions de barils par jour, dans le but d’en faire remonter les prix. Le geste de Ryad intervient alors que les cours ont dévissé ces derniers mois, malgré l’annonce inattendue début avril de coupes drastiques.

Le 05/06/2023 à 07h02

L’Arabie saoudite, poids lourd de l’Opep, a décidé dimanche de procéder à une nouvelle coupe de production dans l’espoir de faire remonter des cours du pétrole en berne, dans un contexte économique assombri par la guerre en Ukraine.

Cette réduction volontaire de l’ordre d’un million de barils par jour s’applique à compter de juillet et pourra être prolongée, a déclaré le prince Abdelaziz ben Salmane, à l’issue d’une réunion à Vienne de l’Opep+ (les treize membres de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole et leurs dix alliés conduits par la Russie).

Devant la presse, le ministre saoudien de l’Energie s’est félicité d’avoir ménagé «le suspense» avec cette mesure qu’il a qualifiée de «gâterie saoudienne», de «cerise sur le gâteau» pour «ramener la stabilité sur un marché» extrêmement volatil.

Par ailleurs, les baisses instaurées depuis début mai par neuf pays, dont Ryad, Moscou, Bagdad ou encore Dubaï, pour un total de 1,6 million de barils quotidiens, «sont étendues jusqu’à fin 2024», a précisé à la sortie le vice-premier ministre russe Alexander Novak.

Plusieurs heures de négociations

À l’issue de plusieurs heures de négociations entre les 23 participants, représentant 60% de la production mondiale d’or noir, les Emirats arabes unis ont obtenu un relèvement de leur quota de production de brut pour 2024, alors que l’Angola, le Congo et le Nigeria notamment ont consenti à un abaissement de leurs objectifs, qu’ils peinent à atteindre.

Le geste de Ryad intervient alors que les cours ont dévissé ces derniers mois malgré l’annonce inattendue début avril de coupes drastiques. Une stratégie qui a échoué à faire remonter les prix dans un marché déprimé par les craintes de récession économique mondiale, les hausses des taux des principales banques centrales et la laborieuse reprise de la demande en Chine.

Le Brent, référence du brut en Europe, s’échange actuellement à 76 dollars le baril, et son équivalent américain, le WTI, à 71 dollars, loin des sommets enregistrés en mars 2022 au début du conflit en Ukraine (près de 140 dollars).

Une image d’unité

Tandis que des signes de discorde entre Ryad et Moscou menaçaient de perturber la rencontre, «l’Opep+ a affiché un front uni», a commenté pour l’AFP Giovanni Staunovo, analyste d’UBS. «Ils ont à l’évidence des vues divergentes mais ils ont démontré qu’ils savaient travailler ensemble».

Malgré ses engagements, la Russie est réticente à resserrer davantage les vannes d’or noir, manne lui servant à financer son offensive militaire contre l’Ukraine. En outre, Moscou ne profiterait guère d’un renchérissement des cours. Du fait des sanctions occidentales, seul le pétrole russe à un prix égal ou inférieur à 60 dollars peut continuer à être livré. Au-delà de ce plafond, il est interdit aux entreprises de fournir les services permettant le transport maritime.

«En revanche, l’Arabie saoudite a besoin de prix plus élevés pour équilibrer son budget », explique Barbara Lambrecht, de Commerzbank, qui évoque un seuil de rentabilité autour des 80 dollars le baril.

Après l’annonce de Ryad, les analystes s’attendent à «une réaction positive du marché», selon Tamas Varga, de PVM Energy. À plus long terme toutefois, «un repli de la demande sous la pression inflationniste pourrait annuler l’effet de cette diminution de l’offre», avertit-elle. L’Opep+ a d’ores et déjà prévenu qu’elle convoquerait une réunion en urgence «si nécessaire».

Par Le360 (avec AFP)
Le 05/06/2023 à 07h02