De récentes études font état des conséquences complexes du changement climatique provoqué par l’Homme, entre propagation de certaines maladies et nouveaux modes de transmission pour d’autres.
En cause notamment, des espèces vectrices comme le moustique qui prospèrent sous un climat plus humide aux températures élevées, et des animaux porteurs de maladies qui se rapprochent des humains à mesure que leur habitat disparaît. La perte de biodiversité semble jouer un rôle majeur dans la multiplication des maladies, selon une étude publiée cette semaine dans la revue scientifique Nature.
Ont été analysées près de 3.000 bases de données issues de travaux antérieurs pour découvrir comment la perte de biodiversité, le changement climatique, la pollution, la destruction ou la modification des habitats, ainsi que l’introduction de nouvelles espèces jouent sur le développement de maladies infectieuses chez l’humain, les animaux et les végétaux.
L’érosion de la biodiversité est apparue comme le premier facteur, suivie par le changement climatique et l’introduction de nouvelles espèces.
Les parasites ciblent des espèces qui sont présentes en masse et offrent donc plus d’hôtes potentiels, souligne Jason Rohr, l’un des auteurs, professeur de biologie à l’université de Notre-Dame.
Et les espèces avec une population plus importante sont plus susceptibles de «se consacrer à leur croissance, leur reproduction et leur propagation au détriment de la défense contre les parasites», a-t-il expliqué à l’AFP.
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En face, les espèces plus rares et plus résistantes sont plus vulnérables au déclin de la biodiversité, ce qui se traduit par une proportion plus grande d’espèces abondantes et sensibles aux parasites, a détaillé le scientifique.
«S’il y a plus de génération de parasites ou de vecteurs, alors il peut y avoir plus de maladies», a résumé Jason Rohr.
Conséquences inégales
Cependant, l’empreinte humaine sur la planète n’a pas fait qu’accroître les risques.
La perte ou le changement d’habitat ont été associés dans certains cas à un recul des maladies, surtout grâce aux progrès venus avec l’urbanisation, comme l’eau courante et les égouts.
Et les conséquences du changement climatique ne sont pas les mêmes partout.
Dans les régions tropicales, le climat plus chaud et humide entraîne une explosion des cas de dengue. Mais en Afrique, des conditions plus sèches pourraient permettre d’endiguer la propagation de la malaria.
Une étude publiée cette semaine dans la revue Science a modélisé les interactions entre le changement climatique, les précipitations et les processus hydrologiques tels que l’évaporation et la vitesse à laquelle l’eau pénètre les sols.
Cette recherche prédit une réduction des zones propices à la transmission plus importante que celle prévue par des analyses fondées sur les seules précipitations.
L’étude avance que la saison de transmission du paludisme pourrait être plus courte de quatre mois dans certaines régions d’Afrique, par rapport à ce qui était précédemment estimé.
Néanmoins, ces observations ne sont pas forcément de bonnes nouvelles, a tempéré Mark Smith, professeur associé de recherche en hydrologie à l’université de Leeds et principal auteur de cette étude.
«Les zones propices à la propagation de la malaria vont changer», a-t-il déclaré à l’AFP.
Et il est prévu que la population croisse rapidement dans les régions où la malaria sévira toujours ou deviendra transmissible, augmentant l’incidence de la maladie.
Mark Smith prévient que des conditions trop rudes pour la malaria peuvent également l’être pour les humains, prenant l’exemple de la disponibilité en eau.
Maladies, climat, même combat
Les liens entre le climat et les maladies infectieuses suggèrent malgré tout que la modélisation climatique peut permettre d’anticiper les épidémies.
Les températures locales et les prévisions de précipitations sont déjà utilisées pour prédire des hausses du nombre de cas de dengue, mais elles n’offrent que des informations à court terme et ne sont pas toujours fiables.
L’index du bassin de l’océan Indien (IOBW), qui mesure la moyenne des anomalies de températures à la surface de l’eau, pourrait être une alternative.
Une autre étude publiée dans la revue Science cette semaine relève en effet l’existence d’une étroite corrélation entre les fluctuations de l’IOBW et les épidémies de dengue dans les hémisphères Sud comme Nord.
L’étude étant rétrospective, le potentiel prédictif de l’IOBW n’a pas été prouvé, mais surveiller cet index pourrait aider les autorités à mieux se préparer.
Dans tous les cas, s’attaquer aux maladies infectieuses revient à s’attaquer au changement climatique, résume Jason Rohr.