Shimon Peres a été présent sur le devant de la scène politique pendant plus de 65 ans, depuis la création de l'Etat d'Israël en 1948 jusqu'à la fin de son mandat de président (2007-2014).
Le fait marquant de cette longue carrière fut la signature des accords d'Oslo en 1993, dont il est un des principaux architectes, et pour laquelle il obtient le prix Nobel de la paix, conjointement avec le Premier ministre de l'époque Yitzhak Rabin et le président de l'Autorité palestinienne Yasser Arafat.
Mais Peres sera mort sans voir se réaliser l'établissement d'un Etat palestinien, qui devait être l'aboutissement de cet édifice diplomatique.
Même après avoir quitté la présidence à 90 ans, il était resté actif à travers son Centre Peres pour la paix, qui continue de promouvoir la coexistence entre juifs et Arabes, alors que les perspectives de règlement du conflit israélo-palestinien ont rarement été plus sombres.Figure historique de la gauche israélienne, membre du Mapaï --le parti du fondateur d'Israël David Ben Gourion-- , puis du parti travailliste, Shimon Peres n'a pas toujours été un homme de dialogue.
Faucon devenu colombe Né à Vishneva en 1923, dans ce qui était alors la Pologne et aujourd'hui le Bélarus, arrivé onze ans plus tard en Palestine alors sous mandat britannique, Peres était l'ultime représentant d'une génération de dirigeants qui ont fait leurs premières armes, au propre comme au figuré, au moment de la création d'Israël.
Classé parmi les "faucons" travaillistes, M. Peres a cautionné, alors qu'il était ministre de la Défense dans les années 1970, les premières colonies juives en Cisjordanie, un territoire palestinien occupé par Israël.
Il était Premier ministre quand l'aviation israélienne a bombardé le village libanais de Cana, tuant 106 civils en avril 1996, ce qui lui a valu une traversée du désert.
Celui qui rejetait autrefois tout compromis avec les pays arabes hostiles disait avoir été converti après 1977 et la visite historique du président égyptien Anouar el-Sadate à Jérusalem conduisant au premier traité de paix arabo-israélien (1979).
"Il n'y a pas d'alternative à la paix. Faire la guerre n'a pas de sens", disait-il en 2013. Le processus de paix a un "objectif clair": avoir "un Etat juif appelé Israël et un Etat arabe appelé Palestine qui ne se combattraient pas mais vivraient ensemble dans l'amitié et la coopération".
Eternel perdant, éternel battant Entré en politique à 25 ans grâce au "vieux lion" David Ben Gourion, le fondateur de l'Etat hébreu rencontré en faisant de l'auto-stop, Shimon Peres a fait preuve d'une ténacité à toute épreuve.
Il détenait peut-être un record d'échecs au Parlement --en ne parvenant pas à décrocher de majorité lors des législatives de 1977, 1981, 1984, 1988 et 1996--, si bien qu'une image d'"éternel perdant" lui a longtemps collé à la peau. Mais il s'était relevé à chaque fois.
Il avait exercé de très nombreuses fonctions ministérielles: deux fois chef du gouvernement (1984-1986 et 1995-1996), ministre des Affaires étrangères, de la Défense, des Finances, de l'Information, des Transports ou encore de l'Intégration.
Israël lui doit ses puissantes entreprises d'armement et ses industries aéronautiques. Artisan de la coopération militaire avec la France dans les années 1950, il est considéré comme le "père" du programme nucléaire israélien.
"Shimon Peres a été un président important grâce à son statut particulier dans les capitales du monde entier et à la dignité qu'il a su restaurer en Israël après l'affaire Moshé Katsav", son prédécesseur condamné et emprisonné pour viol, notait en 2014 Nahum Barnea, du quotidien israélien Yédiot Aharonot.
Après avoir quitté ses fonctions de président, il n'avait rien perdu de sa vivacité et avait continué à sillonner le monde, en tant qu'orateur prisé dans les congrès mondiaux.
Cet éternel battant avait confié en 2012 à l'AFP que le secret de sa longévité consistait à faire de la gymnastique tous les jours, à manger peu et à boire un ou deux verres de bon vin. Il précisait qu'il ne dormait que quatre ou cinq heures par nuit