Depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine il y a trois ans, le rapport de force à l’ONU était clair: une Assemblée générale sans ambiguité dans son soutien politique écrasant à l’Ukraine et à sa souveraineté face à la Russie, et un Conseil de sécurité paralysé par le droit de veto russe.
Mais le retour de Donald Trump à la Maison Blanche a rebattu les cartes, le président américain entamant un rapprochement avec le Kremlin et multipliant les invectives contre son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky désormais sous pression.
Dans ce contexte diplomatique tendu, à l’occasion du troisième anniversaire du déclenchement du conflit russo-ukrainien, l’Ukraine et plus de 50 autres États vont soumettre ce lundi dans la matinée au vote de l’Assemblée générale un projet de résolution qui reconnaît qu’il est «urgent» de mettre fin à la guerre «cette année», et répète sans équivoque les précédentes demandes de l’Assemblée: retrait immédiat des troupes russes du territoire ukrainien et arrêt des hostilités.
Alors que les interrogations allaient bon train sur la possible abstention des États-Unis sur ce texte, Washington a créé la surprise vendredi en proposant un projet de résolution concurrent. Une résolution «simple» et «historique», a commenté le secrétaire d’État américain Marco Rubio, exhortant tous les États membres à l’approuver.
«Bonne idée»
Le texte, très court, «demande instamment qu’il soit mis fin au conflit dans les plus brefs délais et plaide pour une paix durable» entre Kiev et Moscou, sans référence à l’intégrité territoriale de l’Ukraine, pierre angulaire des précédentes résolutions de l’Assemblée dont les États-Unis de Joe Biden étaient un des plus fervents soutiens.
Cette résolution américaine «est une bonne idée», a immédiatement commenté vendredi l’ambassadeur russe à l’ONU Vassili Nebenzia, même si la Russie prévoit un amendement demandant de s’attaquer aux «causes profondes» du conflit.
Pour être adoptée, une résolution doit recueillir les voix d’au moins neuf des 15 membres, sans veto d’un des cinq membres permanents. L’abstention seulement des membres de l’UE (France, Slovénie, Danemark, Grèce) et du Royaume-Uni ne serait ainsi pas suffisante pour la rejeter.
La France et le Royaume-Uni seraient-ils prêts à utiliser leur veto pour la première fois depuis plus de 30 ans, alors qu’Emmanuel Macron et Keir Starmer sont attendus à la Maison Blanche cette semaine? «Je ne vois pas comment Paris et Londres peuvent soutenir un texte tellement loin de leur position affichée sur l’Ukraine, mais je ne vois pas non plus comment ils pourraient y mettre leur veto», a déclaré à l’AFP Richard Gowan, de l’International Crisis Group.
Entre des Européens désarçonnés par la nouvelle politique américaine, de nombreux États membres de l’ONU lassés de l’attention portée à l’Ukraine et certains pays arabes qui n’ont pas oublié que Kiev n’a pas soutenu les résolutions sur Gaza, il est difficile de prédire l’issue de la bataille diplomatique qui se jouera lundi à l’Assemblée générale.
Ce sera un «test» pour les Européens concernant leur «influence» dans le système multilatéral et pour l’Ukraine, qui risque d’en ressortir «plus isolée», a noté Richard Gowan. Un «premier test» aussi pour «l’approche musclée de l’administration Trump face à l’ONU» et pour les principes du droit international, a-t-il ajouté.
Des principes fermement défendus par le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres qui a réclamé dimanche une paix respectant «l’intégrité territoriale» de l’Ukraine et la Charte des Nations unies.
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