Peu connu de la classe politique vénézuélienne jusqu'à récemment, M. Guaidó est subitement monté aux devants de la scène politique après s’être déclaré, le 23 janvier, président par intérim du pays andin avec l’ambition affichée de déloger du pouvoir Nicolas Maduro qu’il qualifie d’"usurpateur", et de restaurer la démocratie au Venezuela.
"Je jure d'assumer formellement les compétences de l'exécutif national comme président en exercice du Venezuela pour parvenir (...) à un gouvernement de transition et obtenir des élections libres", avait-il promis devant des dizaines de milliers de partisans réunis à Caracas pour protester contre Nicolas Maduro.
Entré au Parlement en 2011 comme membre suppléant avant d’être élu en 2015 député de l’Etat de Vargas (nord), l’ascension fulgurante de cet ingénieur industriel, au physique élancé et à la voix posée, commence le 05 janvier suite à son élection à la tête de l’Assemblée nationale (Parlement), vidée de ses pouvoirs par le régime de Maduro.
Membre fondateur, en 2009, du parti Volonté populaire dont le leader Leopoldo Lopez est placé depuis août 2017 en résidence surveillée à Caracas, l’accession de M. Guaidó à ce poste est dû à un concours de circonstances.
Après les élections législatives de 2015, remportées par les partis d’opposition, ceux-ci avaient signé un accord en vertu duquel chacun assumerait à tour de rôle la présidence du Parlement.
En vertu de cet accord, la présidence de l’Assemblée nationale échoit en 2019 à Volonté populaire.
Dès son élection au poste de président du Parlement, M. Guaidó a affiché la couleur en qualifiant d'"usurpateur" Nicolas Maduro, investi le 10 janvier pour un second mandat présidentiel de six ans, non reconnu par l’opposition et une partie de la communauté internationale dont les Etats-Unis, le Canada et plusieurs pays latino-américains.
Il a également appelé à la tenue d’élections démocratiques et promis l’amnistie aux militaires qui accepteraient de désavouer Maduro, avant de se proclamer, le 23 janvier, président par intérim, devenant ainsi une nouvelle égérie de l’opposition au régime de Maduro, au pouvoir depuis 2013.
Incarnant les espoirs de démocratie et de changement, M. Guaidó, marié et père d’une fillette, a réussi en un laps de temps très court à fédérer l’opposition autour de son projet de chasser Maduro du pouvoir et de restaurer la démocratie dans ce pays, à travers la tenue d’élections libres et transparentes.
Sa brève arrestation le 13 janvier par les services de renseignement de Maduro en plein milieu d’une autoroute alors qu’il se rendait à une activité de son parti, a contribué à renforcer sa stature d’opposant au régime chaviste et lui a permis de rallier le soutien et la sympathie de ses compatriotes ainsi que d’une partie de la communauté internationale.
Immédiatement après s’être déclaré président par intérim, M. Guaidó, né le 28 juillet 1983 dans une famille modeste de 7 frères et sœurs de La Guaira, à Vargas, a été reconnu par les Etats-Unis.
Depuis, le mouvement de reconnaissance de M. Guaidó en tant de président intérimaire ne cesse de croître. Il a été reconnu par la suite par le Canada, et les autres 13 pays membres du Groupe de Lima, à l’exception du Mexique.
L’Australie a emboîté le pas à cette initiative, alors que le Danemark et la Suède ont apporté leur soutien au président de l'Assemblée nationale vénézuélienne.
Par ailleurs, six pays de l'Union européenne (UE), à savoir l'Espagne, le Portugal, la France, la Belgique, l'Allemagne et la Grande-Bretagne, ont annoncé samedi qu'ils reconnaîtraient Juan Guaidó comme président par intérim si Nicolas Maduro ne convoquait pas des élections sous huit jours.
Chaque jour qui passe, l’étau semble se resserrer autour du régime de Maduro qui avait, au début, sous-estimé la capacité du jeune député à mobiliser les Vénézuéliens vis-à-vis de son projet en le qualifiant de "gamin qui joue à la politique" et de "président de la république de Wikipedia", avant de l'appeler au dialogue. Fort du soutien d’une bonne partie de la communauté internationale, M. Guaidó maintient la pression sur le régime de Maduro et conforte de plus en plus son image de leader capable de faire sortir le pays de la crise politique dans laquelle il se débat à cause du régime chaviste.
Il a appelé à une "grande manifestation nationale", ce mercredi, pour réclamer la tenue d'élections libres et poursuivre la distribution aux militaires et à la police de la "loi d'amnistie", approuvée récemment par le Parlement, et qui vise à décréter l’amnistie au profit des "fonctionnaires civils ou militaires qui collaborent (...) pour la restauration de l'ordre constitutionnel".
Elle sera suivie d’une autre manifestation prévue samedi prochain "dans les rues du Venezuela et du monde entier".
Le président par intérim a par ailleurs pris plusieurs décisions pour isoler davantage Maduro en demandant à plusieurs institutions financières à travers le monde à "protéger" les avoirs du pays pour priver le régime chaviste des fonds du peuple vénézuélien.
"Nous avons adressé cette demande aux pays du monde (...), ainsi qu'à des institutions tels que le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque d'Angleterre (…)", avait précisé, dimanche, M. Guaidó, avant d'ajouter :"Nous ne leur permettrons pas de continuer à voler le peuple du Venezuela".
Mardi, lors d’une séance présidée par M. Guaidó, le Parlement a nommé des "représentants diplomatiques" dans plusieurs pays de la région ayant reconnu son chef en tant que président par intérim.
Il s’agit de l'Argentine, le Canada, la Colombie, le Costa Rica, l'Equateur, les Etats-Unis, le Honduras, le Panama et le Pérou.
De son côté, l'administration américaine, partisane d’une ligne dure à l’égard du régime de Maduro, a formellement confié à M. Guaido le contrôle des comptes bancaires de son pays aux Etats-Unis.
Le secrétaire d’Etat, Mike Pompeo a signé vendredi un texte qui confie au président par intérim "les comptes du gouvernement du Venezuela ou de la Banque centrale du Venezuela auprès de la Réserve fédérale de New York ou de toute autre banque américaine".
Selon les observateurs, les développements en cours au Venezuela laissent croire que le compte à rebours pour la chute du régime chaviste de Maduro a commencé et que le changement dans ce pays est irréversible.
Le Venezuela, l’un des pays les plus riches en pétrole, est englouti dans une crise sans précédent qui a contraint 2,3 millions de personnes à prendre le chemin de l’exil à la recherche de meilleures conditions de vie. Selon l’ONU, leur nombre pourrait atteindre 5,3 millions à la fin de 2019.