Lors de son interview, qui déviendra très certainement culte, du dimanche 10 octobre dernier, le président algérien Abdelmadjid Tebboune a ouvertement brandi une menace: la peine capitale, qui sera administrée pour sanctionner ceux qu’il appelle les spéculateurs, responsables, selon lui, de la hausse vertigineuse des prix de produits de première nécessité, comme la semoule, la farine, la pomme de terre, la viande et autres fruits et légumes, dont ne peuvent bien évidemment se passer les Algériens, comme tout peuple de la planète.
Il ne faut surtout pas croire que cette menace littéralement stupéfiante entre dans le registre des lapsus et des maladresses dont Abdelmadjid Tebboune se rend régulièrement coupable à chacune de ses sorties médiatiques.
Non, en le cas d'espèce, le président algérien parle sérieusement, car il a réitéré sa menace d’appliquer la peine de mort aux spéculateurs algériens à deux reprises, en l’espace de quelques minutes seulement.
Bien qu’ayant reconnu que la flambée des prix était un phénomène mondial généré par la crise sanitaire, il a omis de dire que les Algériens commençaient à souffrir de la forte dégradation de leur pouvoir d’achat, parce que l’Etat n’avait plus les moyens de les «subventionner» à tour de bras.
N’ayant plus les moyens d’acheter la paix sociale, l’appareil militaro-politique veut à présent l’imposer manu militari. En attestent les arrestations arbitraires et la dissolution de rares ONG indépendantes, comme le "Rassemblement Action Jeunesse" (RAJ), une association de défense des droits humains.
Tebboune a brandi la peine de mort dans le cadre de cette politique de terreur qui caractérise "l’Algérie nouvelle", chantée à cor et à cri par le régime.
Dans quel autre pays au monde, promet-on la mort à des vendeurs de pommes de terre? Depuis quand criminalise-t-on les marges bénéficiaires de vendeurs de pommes de terre? Au lieu de faire face aux vrais problèmes qui ont enflammé les prix de produits de première nécessité, à commencer par les choix économiques désastreux de la junte, celle-ci use de son arme favorite: une vraie fuite en avant, avec la désignation d’un bouc émissaire.
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Tebboune a même déclaré, au cours de cette interview d'anthologie, qu’une loi prévoyant entre 30 ans de prison et la peine capitale pour les spéculateurs était prête et sera promulguée dès dimanche prochain, probablement, pour raison de célérité, sous forme d’ordonnance présidentielle!
Faire du commerce en Algérie, tout en respectant la loi, pourrait donc mener à une réclusion pendant 30 ans ou à la peine de mort! C’est avec cette mesure que le régime veut encourager les investisseurs?
Pendant ce temps, Ramtane Lamamra, le ministre algérien des Affaires étrangères, qui avait été rappelé en juillet dernier dans le but de revigorer le décidément très sénile régime algérien, a élu domicile dans un avion, fuyant constamment son pays en crise.
Son activisme diplomatique douteux n’a fait jusqu’ici qu’enfoncer davantage le pays dans de graves crises avec ses voisins africains et européens: une rupture des relations diplomatiques avec le Maroc d'abord, ensuite une crise ouverte avec la France, puis une tentative de financer les mercenaires russes de Wagner au Mali, enfin un bras de fer avec le général libyen Haftar... Le tout, sans parler de la fuite quotidienne de plusieurs centaines de harragas algériens, fuyant le désastre économique dans leur pays. L’ampleur de cette émigration clandestine est telle, qu'elle est devenue un sujet qui suscite de l’émoi dans la presse internationale.
Mardi 13 octobre, trois migrants algériens sont morts, fauchés par un train dans le sud de la France. Ils avaient échappé à la noyade en Méditerranée, pour finalement mourir sur une voie ferrée.
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Le spectacle du naufrage de l’Algérie, en raison de l’impéritie du régime, est visiblement insupportable pour Lamamra, qui préfère regarder ailleurs. Récemment, le chef de la diplomatie algérienne est parti chercher en Italie les traces d’une soi-disant nation algérienne, qui serait antérieure à la colonisation française.
Il s’est ainsi recueilli sur la «tombe » de Jugurtha (mort en 104 avant Jésus Christ), petit-fils de Massinissa. Mais pendant que le chef de la diplomatie algérienne cherche désespérément un ancrage historique à l’Algérie auprès de valeureux amazighes, le régime mène une guerre sans nom contre les Kabyles. Voilà bien toute la schizophrénie d’un régime qui entend posséder cela même qu’il cherche à éradiquer. Une folie.