En juin 2017, l'Arabie saoudite et trois pays alliés - Emirats Arabes Unis, Bahreïn et Egypte - ont rompu leurs liens avec Doha, l'accusant de soutenir des groupes islamistes, de trop s'entendre avec leurs adversaires iraniens et turcs ou encore de semer le trouble dans la région. Les Qataris, qui ont toujours démenti ces accusations, se disent victimes d'un "blocus" et d'une atteinte à leur souveraineté.
Après trois ans et demi de boycott et de messages hostiles par médias interposés, le Koweït, en médiateur du Golfe, a révélé lundi soir que l'Arabie saoudite, poids lourd de la région et premier producteur mondial de pétrole, avait accepté de rouvrir au Qatar son espace aérien et toutes ses frontières.
Le Conseil de coopération du Golfe (CCG) qui se réunit mardi est né il y a 40 ans avec l'ambition de rapprocher politiquement, économiquement et militairement ses membres --l'Arabie saoudite, Bahreïn, les Emirats arabes unis, Qatar, Oman et le Koweït. Symbole du rapprochement en cours, l'émir du Qatar, cheikh Tamim ben Hamad Al-Thani, est arrivé mardi à al-Ula, dans le nord-ouest de l'Arabie saoudite, pour participer à son premier sommet du CCG depuis 2017.
Le dirigeant de l'émirat gazier a en outre été accueilli avec une embrassade du prince héritier saoudien, Mohammed ben Salmane, sur le tarmac de l'aéroport, selon les images de la chaîne de télévision d'Etat saoudienne Al-Ekhbariya.
La rupture avec le Qatar s'est accompagnée de mesures de rétorsion: fermeture des frontières et de l'espace aérien aux avions du Qatar et restriction sur les déplacements de Qataris, ce qui a parfois conduit à la séparation de familles mixtes. Le quatuor avait formulé 13 conditions à la reprise des relations avec le Qatar, notamment la fermeture d'Al-Jazeera, chaîne de télévision honnie de nombreux régimes arabes, des engagements sur l'arrêt du financement de groupes extrémistes ou la fermeture d'une base militaire turque au Qatar.
Doha ne s'est plié à aucune de ces demandes. Diplomates, observateurs et certains articles de presse ont laissé entendre que tous ces sujets de discorde ne seraient pas abordés au cours du sommet, ce qui semble éloigner la perspective d'une résolution globale du litige dans l'immédiat.
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Le rapprochement paraît commencer par l'Arabie saoudite et le Qatar mais "les autres les rejoindront, même si c'est plus tard", présage toutefois Bader al-Saif, professeur adjoint d'histoire à l'Université du Koweït. "Tout pas vers la réconciliation est mieux que rien du tout. Le Conseil de coopération du Golfe a besoin d'une réinitialisation majeure et peut offrir beaucoup plus qu'il ne l'a fait", dit-il sur Twitter.
Malgré des déclarations inhabituellement positives, ces dernières semaines, les autres pays ne semblent pas aussi disposés que les Saoudiens à faire des concessions au Qatar. Les Emirats Arabes Unis restent particulièrement hostiles à Doha, en raison de sa proximité avec la confrérie islamiste des Frères musulmans.
Pour l'instant, la réconciliation s'avère être "essentiellement diplomatique", estime Tobias Borck, du centre de réflexion Royal United Services Institute. Les Etats-Unis ont, eux, intensifié la pression sur tous ses partenaires du Golfe pour résoudre la crise avec le Qatar. Le but pour Washington: isoler davantage l'Iran, alors que le rideau tombe sur la présidence de Donald Trump. Jared Kushner, son gendre et conseiller, a fait la navette dans la région pour chercher un accord et assistera en personne à la signature, mardi, de cette "percée", a déclaré, lundi, un responsable américain.
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"L'administration Trump revendiquera cela comme une autre victoire à coup sûr", selon Tobias Borck, tout en soulignant que les rivaux du Golfe n'avaient pas encore normalisé leurs relations. L'isolement du Qatar a paradoxalement permis au riche émirat d'accroître sa stratégie d'autosuffisance et de se rapprocher davantage de l'Iran et de la Turquie.