«Istiqlal» (indépendance) ou bien «jaybine lhouriya» (on aura la liberté), ces surprenants slogans, répétés ce vendredi 19 mars 2021, par des centaines de milliers de personnes à Alger, dans un pays, qui a obtenu son indépendance en 1962, montrent le gouffre qui sépare le peuple d’un régime qui détient par la force le pouvoir. «Istiqlal» ou «houriya» témoignent de l’état dans lequel vit le peuple algérien: une occupation par un régime illégitime.
Malgré le déploiement massif des forces de l’ordre à Alger, les fortes pluies à Bouira et Annaba, et même la peur engendrée par le séisme nocturne de mercredi à jeudi à Béjaia, les marches populaires du Hirak n’ont rien perdu de leur intensité dans les principales wilayas algériennes: Alger, Annaba, Tizi-Ouzou, Oran, Bouira, Jijel, Béjaia...
A Alger en particulier, c’est à nouveau une marée humaine qui a défilé dans les principales artères du centre-ville en scandant et chantant les slogans traditionnels du Hirak: «Tebboune mzawar, jabouh el askar, Echaab tharrar, houwa lli igharrar, Dawla madania, machi askaria» (Tebboune l’usurpateur a été imposé par les militaires/ le peuple libre est le seul habilité à décider/ Un Etat civil, pas militaire).
D’autres slogans ont été scandés comme «Mafia militaire dehors», «Zaghmati dégage», ou encore «Hal el barlamane masrahia, hal el mouchkila fi echariyya» (la dissolution du Parlement est une comédie, la solution du problème est dans la légitimité». Un autre slogan prône que «la primauté est aux affaires de l’intérieur», soit une façon ridiculiser les prétentions régionales hautaines du régime et sa propension à se plaindre de la «main étrangère».
Les généraux à la retraite, mais toujours à la manœuvre, Khaled Nezzar et Mohamed Mediène (Toufik) ont été encore une nouvelle fois pris à partie. «Dites à Toufik que nous n’oublierons pas les responsables de la boucherie de la décennie noire», lance à gorge déployée une énorme foule à proximité du quartier populaire Bab El Oued, l’un des fiefs des hirakistes à Alger. Ce slogan appelle au jugement des vrais responsables de la décennie noire qui a fait plus de 200.000 morts en Algérie.
Les slogans traditionnels du Hirak ont été également repris sous une pluie battante à Bouira, où les manifestants, tout en scandant «L’union fait la force», ont décidé de ne pas hisser le drapeau amazigh durant ce 109e vendredi. Une façon pour eux de répondre aux accusations de «sectarisme» proférées par le régime contre les manifestants kabyles, et qui démontrent ainsi leur totale adhésion au Hirak et à ses objectifs de changement radical en Algérie.
A Annaba, où les conditions météo n’étaient pas non plus favorables, les manifestants ont défié la pluie et le froid, et convergé en masse vers la place de la Révolution, d’où s’est lancée une imposante marche dans laquelle était surtout répété le slogan «Un Etat civil et non militaire».
A Oran, les manifestants ont lancé leur marche depuis la Place d’armes au centre-ville. «Rien ne nous arrêtera», «Un Etat civil et non militaire» étaient les slogans qui revenaient le plus souvent.
A Béjaia, les manifestants, fidèles aux slogans phares du Hirak, ont également brandi des banderoles sur lesquelles était inscrit que la magnitude du séisme qui les a frappés mercredi dernier n’est rien par rapport à celle qui a secoué leur pouvoir d’achat. Les Bejaouis appellent à une «grève générale pour faire tomber le régime» une bonne fois pour toute.
Les manifestations de ce vendredi accroissent la pression sur le régime militaire, considéré comme une occupation par le peuple algérien qui revendique son indépendance.