Ahmed Assid: «La laïcité n’exclut pas la religion, elle en garantit le libre exercice»

Ahmed Assid.

Ahmed Assid.

Revue de presseSelon le chercheur Ahmed Assid, le débat lancé récemment sur la laïcité est sain et salvateur. Il permet de libérer les esprits et de construire une citoyenneté respectueuse de l’autre et de sa différence. Une revue de presse de l’hebdomadaire Al Ayyam.

Le 20/12/2024 à 20h41

Selon Ahmed Assid, chercheur en culture amazighe et défenseur des droits de l’Homme, «la religion ne peut être convertie en régime autoritaire, auquel cas elle se transformerait en dictature et ne serait plus un culte ou une profession de foi». Par contre, la laïcité, qui n’est pas contraire à la religion, en garantit le libre exercice.

Dans un entretien accordé à l’hebdomadaire Al Ayyam publié dans l’édition actuellement en kiosque, le chercheur amazigh estime que le débat soulevé récemment sur la laïcité ou le sécularisme de l’État «est un débat sain et important dans le contexte actuel». Pour lui, et c’est une conviction qu’il a déjà partagée dans un de ses ouvrages publié en 1998, «la sécularisation de l’État ne peut être dissociée de sa démocratisation et de sa modernisation». Ce qui, rappelle-t-il, lui a valu alors des menaces de mort.

Aujourd’hui, poursuit le chercheur, c’est le ministre des Habous et des affaires islamiques en personne «qui vient d’utiliser cette expression qui fait tant peur aux islamistes. Non pas parce que le mot «laïcité» est en soi de nature à inspirer une quelconque peur, mais parce qu’ils ont tellement déformé son sens qu’ils en ont fait un synonyme d’athéisme et d’apostasie. Cela, alors qu’en réalité, la laïcité ne leur permet tout simplement pas d’instrumentaliser la religion à des fins politiques».

Ce débat est donc positif parce qu’il «sensibilise les citoyens au vrai sens de la laïcité, à savoir la neutralité des institutions face à la religion, la non-ségrégation selon la religion et la protection de toutes les religions qui doivent coexister pacifiquement dans le même pays. Et ce, tout en garantissant aux citoyens la liberté de culte et de conscience».

Les Marocains, affirme-t-il, «vivent aujourd’hui au XXIème siècle, au sein d’un État-Nation, et il y en a toujours qui essaient de leur faire croire qu’ils vivent dans une communauté religieuse et conservatrice régie par un système de loi et de préceptes religieux. Ce qui n’est absolument pas vrai. Ceux-là vivent dans le passé alors que le Maroc est contraint d’aller de l’avant».

Le Maroc «n’est pas un État religieux, et sauf dans des cas très limités et qui font du reste l’objet de réformes, ses lois ne sont pas inspirées de la religion», assure le chercheur. Partant de là, poursuit-t-il, «ce processus de sécularisation permettra de construire une société moderne, équilibrée et tolérante, dans laquelle le citoyen est conscient de son appartenance à un État moderne et non à une communauté religieuse. La société est de par sa nature sujette à la diversité. Même l’Islam est multiple, il y a l’islam sunnite, chiite, soufi, celui des frères musulmans, des salafistes…». Ce débat contribue donc à la libération des esprits et à l’édification d’un citoyen qui respecte les autres et accepte la différence en la considérant comme un fait naturel.

En 2012, relève l’hebdomadaire, le chercheur avait déclaré que le Maroc avait plus que jamais besoin de la laïcité. Cette position a pris de l’importance avec le temps. Le Maroc, conclut-il, a choisi la voie du développement. «Il a choisi d’aller de l’avant et de s’ouvrir sur le monde parce que de toutes les manières, on ne peut pas revenir en arrière, l’Histoire ne se répète pas.»

Par Amyne Asmlal
Le 20/12/2024 à 20h41