Les congrès du Polisario qui se tenaient jusqu’ici à Tifariti relèvent désormais du passé. Fini également les convois qu’organisaient les séparatistes à travers la zone tampon du Sahara, ou en empruntant illégalement le territoire mauritanien pour amener leurs invités étrangers aux camps de Tindouf. En effet, les «conditions ne sont plus ce qu’elles étaient par le passé», comme vient de le rappeler à ses concitoyens et au Polisario le wali de la vaste région nord de la Mauritanie (Tiris-Zemmour), frontalière du Sahara marocain, de l’Algérie et du Nord malien.
Réagissant à la mort de deux orpailleurs mauritaniens dans une zone tampon, tués en décembre dernier par des tirs d’origine indéterminée, le wali de Zouerate a déclaré que les «citoyens mauritaniens ne doivent plus franchir illégalement les frontières des pays voisins, car les conditions ne sont plus ce qu'elles étaient par le passé… Il est important que chaque citoyen prenne conscience de cette réalité, car la situation (au Sahara, Ndlr) a changé et il est temps pour nous de nous en rendre compte». Ces propos visent à rappeler aux Mauritaniens du nord du pays que le laisser-aller et les trafics d’antan avec le Polisario ne sont plus tolérés, puisque les zones tampons du Sahara sont plus que jamais interdites aux milices séparatistes.
S’adressant indirectement au Polisario, le wali de Zouerate l’a mis en garde contre toute incursion en territoire mauritanien, précisant que «quiconque violera notre intégrité territoriale se verra opposer une réaction immédiate et ferme de notre part». Il a aussi fustigé les manigances du Polisario qui consistent à inciter les orpailleurs mauritaniens à aller dans ces zones tampons, sous prétexte qu’elles sont «sous contrôle de la Minurso», alors qu’il vise en fait à faire de ces orpailleurs des boucliers humains et un menu pour sa propagande accusant le Maroc de tuer des civils.
Le président mauritanien, Mohamed Ould Ghazouani, a abordé lui-même ce sujet le 27 décembre dernier devant de nombreux orpailleurs, réunis à l’occasion de la pose de la première pierre du futur siège de l’agence dédiée à l’orpaillage. Il leur a ainsi déclaré que «les autorités militaires, sécuritaires et administratives ont reçu des consignes fermes de ne plus permettre aux orpailleurs et autres citoyens mauritaniens de traverser les frontières du pays» vers des zones qu’il a qualifiées de «très dangereuses».
Lire aussi : Brahim Ghali tient le Congrès du Polisario entre deux bases militaires algériennes
Suite à ces réactions des autorités mauritaniennes, dont également le porte-parole du gouvernement, quant au maintien des frontières du nord du pays strictement fermées et respectées, le Polisario et le régime algérien qui tiennent absolument, rien que pour déplaire au Maroc, à la présence d’une délégation mauritanienne parmi eux, ont fini par adopter en urgence la solution de la voie aérienne.
Ainsi, les autorités algériennes, dont les citoyens peinent pourtant à se procurer un billet d’avion à un prix abordable sur un vol d’Air Algérie, ont ordonné à cette dernière de transporter gratuitement les invités mauritaniens au congrès du Polisario, qui s’ouvre ce vendredi 13 janvier à Tindouf en Algérie. Selon un média mauritanien, ces invités débarqueront d’abord à Alger, avant d’être redirigés dans un autre avion vers Tindouf. Air Algérie a ouvert une ligne Alger-Nouakchott depuis août dernier à travers deux vols par semaine (mercredi et samedi), mais bien que régulière depuis son lancement, cette desserte enregistre de grosses pertes faute de passagers voyageant de et vers l’une ou l’autre des deux capitales.
Lire aussi : Congrès du Polisario: la loi martiale renforcée autour des camps de Tindouf, privés d’Internet
Dans ce registre de la fermeture des frontières mauritaniennes au nez du Polisario, il faut mentionner qu’en novembre dernier, bien avant l’incident qui a coûté la vie aux deux orpailleurs mauritaniens au Sahara, les autorités de Nouakchott avaient fermé manu militari le dernier bastion des trafiquants du Polisario. Il s’agit du lieu-dit «Lebreika», situé à cheval sur la frontière algéro-mauritanienne, près de la zone tampon. Son démantèlement définitif intervient suite à de nombreux actes de brigandage menés par des séparatistes armés du Polisario contre des commerçants ou simples citoyens mauritaniens, qu’ils dépouillent généralement de tous leurs biens (voitures, argent, marchandises…).
Toutes ces mesures prises par la Mauritanie à l’encontre du Polisario ont fait l’objet d’une tribune publiée mardi dernier par un journaliste tunisien, Nizar Boulahia, dans les colonnes du site londonien Al Quds Al-Arabi. Il y conclut que le Maroc voit clairement «une reconnaissance sans équivoque de sa souveraineté sur le Sahara» à travers nombre d’actes concrets de son voisin du sud, mais dont il comprend également pourquoi il ne peut pas faire, pour le moment, davantage.