Toute la presse algérienne a fait ses choux gras, dimanche 18 juin, avec un communiqué sorti de nulle part par la police algérienne. Celle-ci annonce avoir «déjoué une tentative de mise en circulation de faux billets, à quelques jours de l’Aïd El Adha».
Il s’agirait, selon ledit communiqué, de faux dinars d’un montant de «321 millions de centimes». Excusez du peu, car la valeur de ces millions saisis à Sidi Bel Abbès, équivaut, en tout et pour tout, à 235.000 dirhams marocains. Cela n’a pas empêché la police algérienne de pointer un doigt accusateur vers le Maroc en précisant «que ce plan criminel a été planifié par un réseau composé de quatre personnes, dirigé par un individu établi au Maroc».
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Les quatre personnes mentionnées sont toutes de nationalité algérienne. Quant à l’«individu établi au Maroc», la police algérienne a été muette sur son identité et sa ville de résidence, à moins d’être l’un des défunts pensionnaires du cimetière de Sidi Bel Abbès… à Salé.
Cette affaire remonte à la «fin de la semaine dernière», c’est-à-dire à une dizaine de jours maintenant, et aurait été divulguée suite à des «informations selon lesquelles un groupe criminel s’apprêtait à émettre des faux billets au niveau de la wilaya de Sidi Bel Abbès».
Le «cerveau marocain»
Le principal suspect, selon les dires de la police, imprimait la fausse monnaie chez lui et aurait été interpellé en flagrant délit dans son «atelier secret». Le «cerveau marocain» aurait, lui, contribué, par l’intermédiaire de «deux personnes de la ville de Maghnia (Tlemcen) pour la contrebande de papier et d’autres matériaux utilisés dans la contrefaçon des billets de banque, puis remis au principal suspect qui a été chargé dans un premier temps de falsifier et d’imprimer la monnaie et de la mettre sur le marché local, notamment au niveau des marchés à bétail, à condition que le processus soit diffusé dans un deuxième temps au reste de l’Ouest algérien».
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Trop beau pour être vrai, surtout qu’une femme résidant à Sidi Bel Abbès, dont le rôle n’a pas été précisé, constitue la quatrième suspecte algérienne dans cette affaire, qualifiée de crime transfrontalier, bien que les frontières entre l’Algérie et le Maroc sont hermétiquement fermées et sous haute surveillance de part et d’autre
En vue de donner un semblant de gravité à cette histoire à dormir debout, la police algérienne est allée jusqu’à prétendre qu’il «devient clair que l’objectif de ce réseau consiste à inonder le pays de fausse monnaie, pour provoquer l’effondrement du système financier algérien». Le système financier algérien serait donc tellement fragile qu’il pourrait être mis en péril par 235.000 dirhams (22.000 euros) en faux billets? Rien ne devrait nous étonner «au pays du monde à l’envers», selon l’expression des auteurs du livre Le Mal algérien.
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Le concepteur de telles allégations veut-il cacher une nouvelle crise du système financier local, qui a de tout temps été exsangue du fait de la corruption à grande échelle, se chiffrant chaque année en dizaines de milliards de dollars? Comment le Maroc, avec «un individu» et une petite poignée de faux dinars, peut-il affecter un pays qui s’est ruiné lui-même et dont la monnaie est déjà sans grande valeur à cause d’une planche à billets qui n’a jamais arrêté de tourner depuis les années 60?
Le taux de change officiel… et le taux réel
L’Algérie est d’un des très rares pays au monde où ce n’est pas la banque centrale qui est la référence du taux de change, mais le marché noir. Ce double taux de change a été pointé du doigt, dans un rapport datant de ce mois de juin, par la Banque mondiale qui y voit l’indicateur d’un dysfonctionnement majeur dans l’économie algérienne. En Algérie, ce marché parallèle s’appelle le square, du nom d’une place à Alger où se définit le taux réel de change. Il faut savoir que la différence entre le taux officiel et le taux parallèle est supérieure à 30%. Alors que le taux officiel du dollar est de 137 dinars, dans le square il s’échange à 209 dinars.
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Comment expliquer, enfin, cette sortie attribuée à la police algérienne quand celle-ci a été réduite à ne rien faire depuis l’avènement de «l’Algérie nouvelle» prônée par le duo Abdelmadjid Tebboune - Saïd Chengriha, le dernier nommé ayant décidé que c’est l’armée algérienne qui va désormais s’occuper directement de toutes les affaires domestiques du pays?
En effet, pour les besoins de la propagande d’une junte décriée et aux abois, l’armée a, entre autres, dépouillé la police de ses attributions, en s’occupant directement de l’arrestation des opposants politiques, des journalistes insoumis, des faux «terroristes», des trafiquants de drogue, en coupant régulièrement la connexion internet… alors qu’elle devait s’occuper de la seule sécurité des frontières. Le patron de la police algérienne n’en demande pas plus, lui qui consacre le plus clair de son temps à gérer ses hôtels et autres affaires juteuses en France, où il a contracté un mariage blanc en vue d’obtenir une carte de séjour.