En réaction à la Marche verte du 6 novembre 1975, qui a définitivement scellé la décolonisation pacifique du Sahara sous occupation espagnole à travers la récupération par le Maroc de ses provinces du sud, le président algérien de l’époque, Houari Boumédiène, est entré dans une colère hystérique. Il a pris une décision ignominieuse, consistant à chasser de l’Algérie, le jour même de la célébration de l’Aïd El-Adha, les citoyens d’origine marocaine. Ce brusque accès d’hystérie, une pathologie qui reste au demeurant la marque patente du régime algérien actuel, a conduit à une tragédie unique en son genre.
En effet, dès l’aube de la journée du 8 décembre 1975, le régime algérien a procédé à des expulsions massives de Marocains résidant depuis des lustres en Algérie, des expulsions qui n’ont pris fin que vers janvier 1976.
Pour donner un cachet ultra-choquant à son acte inhumain, le régime algérien a, d’une part, choisi la symbolique d’une date religieuse pour procéder à ces expulsions massives, car elles coïncidaient avec le jour de l’Aid El-Adha, la plus importante fête musulmane de l’année, qui marque la fin du pèlerinage annuel à La Mecque.
D’autre part, des consignes précises ont été données à l’armée, la gendarmerie et à la police algériennes chargées de mettre à exécution ces déportations afin de s’assurer de la confiscation de tous les biens et papiers administratifs des Marocains expulsés, qui n’auront pas eu le temps, ni la possibilité de vendre ou confier à quiconque leurs biens abandonnés sur place (argent, voitures, maisons, biens fonciers…).
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De même, tous les Marocains mariés à des Algériennes et leurs enfants auront été déportés, alors que les Marocaines mariées à des Algériens sont expulsées, mais séparées de leurs enfants ayant acquis la nationalité de leur père algérien. Tous les couples mixtes maroco-algériens ont été séparés, sans même prendre en considération le fait que de nombreux Marocains sont issus d’une succession de générations, dont les premières ont immigré en Algérie du temps de la colonisation ottomane.
Témoin et victime de ce drame avec sa famille, alors qu’il était encore enfant, Mohammed Cherfaoui, aujourd’hui président du Collectif international de soutien aux Marocains expulsés d’Algérie en 1975 (CIMEA75), revient, pour Le360, sur ce drame que les autorités algériennes tentent, vainement, de noyer dans l’oubli.
La détermination de cet ingénieur marocain, né à Oran, travaillant et vivant aujourd’hui à Compiègne, en France, est sans faille. Il vient d’ailleurs de prendre les rênes du CIMEA75, initié le 28 février 2021 (même si un noyau de ce collectif existe depuis 2005), et qui a tenu sa plus récente réunion en novembre dernier à Casablanca.
L’objectif de cette association n’est autre, selon lui, que la réhabilitation et la préservation mémorielle de ce crime contre l’humanité, perpétré par les autorités algériennes contre des dizaines de milliers d’innocents, aussi bien Marocains qu’Algériens, et dont la responsabilité incombe, de façon imprescriptible, à l’Etat algérien.
Même s’il dit avoir eu des échos favorable en Europe et auprès de l’Organisation internationale des migrations (OMI-ONU) sur ce dossier, et qu’il est conscient de la difficulté de la tâche en ces temps où les relations maroco-algériennes traversent un crise sans précédent, Mohammed Cherfaoui affirme continuer de revendiquer l’ouverture des frontières entre les deux pays, ne serait-ce que pour permettre la mobilité de familles qui ont été brutalement séparées en 1975, pour qu’elles puissent se retrouver à nouveau. Mohammed Cherfaoui est également déterminé à obtenir des réparations aussi bien morales que matérielles pour les victimes encore en vie ou de leurs ayants droit.
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Il affirme aussi qu’il n’oubliera jamais ce jour où toutes les forces algériennes de l’Est du pays (police, gendarmerie, armée, pompiers…) ont été mobilisées pour effectuer cette sale besogne, alors que les médias publics locaux, dans leur ensemble, ont été interdits de relater ce pogrom.
La rafle massive des Marocains, immédiatement reconduits à la frontière avec le Maroc, au niveau de Zouj Bghal, s’apparente à un «Vel d’Hiv’» à l’algérienne contre tous ceux qui sont détenteurs d'une nationalité précise, la marocaine.
En effet, selon ses propos, des «caissons de train», en général utilisés pour le transport du bétail, des camions et des bus de l’armée et de la police entourés d’hommes armés jusqu’aux dents, et même des camions-bennes à ordures ont été utilisés pour le ramassage puis le convoyage de plusieurs dizaines de milliers de Marocains vers la frontière ouest de l’Algérie.
Quarante-six ans plus tard, le CEMAC75 affiche sa détermination à préserver la mémoire et exiger la réparation de ce drame, afin d’éviter que plus jamais une telle folie ne se reproduise ni au Maghreb, ni ailleurs. Cela commence, selon un communiqué publié ce 16 décembre par le collectif, par une reconnaissance de la part de l’Algérie de sa responsabilité directe dans cette tragédie.