C’est la polémique du moment, et il semble qu’elle durera au moins jusqu’aux premières semaines du mois de Ramadan. Les prix de la tomate continuent d'évoluer à des niveaux élevés, en dépit de la réaction du gouvernement qui a tenté de stopper l’hémorragie en limitant les exportations. Finalement, tout indique que ce sont les intermédiaires, ceux que beaucoup pointent du doigt comme étant la cause de cette inflation, qui en sortent gagnants… comme toujours.
Dans son édition du lundi 21 mars, Al Ahdath Al Maghribia revient sur la problématique de la cherté des tomates sur les étals des marchés. Cette semaine encore, le kilo, dans des villes comme Casablanca ou Rabat, se négociait aux alentours de 12 à 13 dirhams, soit trois fois plus que le prix réellement appliqué dans les principaux marchés de gros. A Inzegane, par exemple, le principal marché de gros de tomates qui approvisionne plusieurs régions du pays, le prix du kilo ne dépassait pas, la semaine dernière, les 5 dirhams. Le gouvernement est conscient de la problématique, comme l’a prouvé son porte-parole lors du traditionnel point de presse hebdomadaire qui suit chaque Conseil du gouvernement. Il a ainsi reconnu que la cherté des tomates est due à la multiplication des intermédiaires, ce qui constitue une sorte de «victoire» pour le fermier, comme l’écrit le journal. Mais cela ne résout pas le problème, malgré la mesure décidée par le gouvernement de suspendre temporairement les exportations des tomates. C’est ce qui fait dire à des agriculteurs sondés par le journal qu’il aurait mieux valu se pencher sur «le vrai problème» des intermédiaires, au lieu de prendre une mesure dont l’impact se fait surtout ressentir au niveau des producteurs.
Mais qui sont ces intermédiaires qui soufflent le chaud et le froid sur le panier de la ménagère? D’après Al Ahdath Al Maghribia, aucun responsable, pas même parmi ceux qui dénoncent leur emprise sur les prix, n’ose les identifier. Pourtant, à en croire les sources du journal, à Inzegane, ils sont quatre ou cinq, bien connus, qui contrôlent le marché. Certains d’entre eux ont même hérité cette «profession» de leurs parents qui ont fait fortune grâce à l’intermédiation. Et pour cela, ils n’ont même pas besoin de se rendre sur le marché. «Ce qu’ils font, c’est se réveiller tôt pour la prière d’Al Fajr, puis pour encaisser leurs gains», rapportent des sources d’Al Ahdath Al Maghribia. Le travail, ce sont leurs complices qui s’en occupent, en guettant l’arrivée des camions des producteurs avant même qu’ils n'accèdent aux marchés. Ces complices, ajoutent les mêmes sources, ont développé une certaine expertise dans l’évolution des marchés des fruits et légumes et arrivent sans peine à en juguler les prix comme bon leur semble. Au final, le plus grand gagnant des ventes qui s’effectuent sur le marché de gros n’est pas l’agriculteur qui produit, mais plutôt l'intermédiaire, et c’est la vraie problématique à laquelle doit s’attaquer le gouvernement s’il veut mettre fin à la flambée injustifiée des prix des tomates.