Porté par l’ambition de moderniser ses infrastructures en vue d’accueillir la Coupe d’Afrique des Nations 2025 et de co-organiser la Coupe du Monde 2030, le Royaume du Maroc est engagé dans une série de chantiers structurants à travers le pays.
Cette dynamique, bien que synonyme de développement et de rayonnement international, soulève également des tensions, notamment autour de la question sensible des expropriations, indique le magazine Finances News Hebdo, dans une analyse dédiée.
Des projets d’envergure se multiplient: nouvelles routes, stades, lignes ferroviaires, zones d’aménagement urbain... Pour les mener à bien, l’État mobilise massivement le foncier public, mais aussi des terrains appartenant à des particuliers. Résultat: de nombreuses familles se retrouvent confrontées à des procédures d’expropriation jugées précipitées et injustes.
À Casablanca, dans l’ancienne médina, les habitants dénoncent un manque de concertation et des propositions de relogement inadaptées, indique le magazine à titre d’illustration. «Les autorités nous proposent un relogement à Sidi Hajjaj, à 25 km de Casablanca. Mais cette solution est invivable: cela nous éloigne de notre lieu de travail, de nos écoles, de notre quotidien», affirme un témoin, cité par le quotidien.
Il souligne l’absence totale de mesures d’accompagnement pour les locataires.
«La plupart vivent ici depuis plus de trente ans, pour un loyer modeste, parfois inférieur à 1.000 dirhams. Ils n’ont droit à aucune indemnité», écrit-on.
La situation casablancaise n’est pas un cas isolé. À Rabat, le quartier L’Océan est lui aussi au cœur d’un vaste projet de réaménagement qui suscite une contestation similaire. Ces tensions ravivent le débat sur la législation encadrant l’expropriation, en particulier la loi 7/81. Adoptée dans un autre contexte, cette loi est aujourd’hui jugée obsolète par de nombreux juristes et urbanistes.
En 2018, déjà, le retard dans les procédures d’expropriation avait repoussé de trois ans la livraison de la ligne à grande vitesse Tanger-Casablanca.
D’autres projets ont également souffert de ces blocages, entraînant des surcoûts budgétaires importants.
Une proposition de loi émanant de l’Union socialiste des forces populaires (USFP) avait été déposée, il y a quelques années, pour réviser plusieurs articles, dont ceux relatifs à l’indemnisation et aux délais légaux.
«Elle est restée lettre morte», indique Finances News Hebdo.
Cité par le magazine, Nabil Haddaji, avocat au barreau de Casablanca, souligne qu’«une grande partie des dossiers portés devant les tribunaux administratifs concernent des expropriations. Les procédures sont longues, complexes, et souvent sources d’injustices. Les indemnités proposées ne correspondent pas à la réalité du marché. Elles reposent sur des évaluations dépassées, issues d’un système hérité de l’époque coloniale».
Les montants sont fixés par des commissions locales ou régionales, composées de représentants de plusieurs départements ministériels (Intérieur, Finances, Agriculture, Équipement...).
Ces commissions se basent sur la moyenne des transactions passées, souvent faussées par des déclarations sous-évaluées, ce qui biaise les grilles de référence.
En plus des montants jugés dérisoires, le délai légal de deux mois imposé pour l’exécution de l’expropriation est unanimement décrié. «Ce délai ne laisse pas aux expropriés le temps de s’organiser, de chercher un nouveau logement ou de faire valoir leurs droits. Il est urgent de le revoir à la hausse», a déclaré l’avocat.
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