L’audit des comptes de certaines sociétés spécialisées dans l’import-export et la promotion immobilière à Tanger, Nador et Casablanca a révélé l’existence de flux financiers injustifiés. Les déclarations fiscales présentées par les responsables de ces sociétés affichent des bénéfices colossaux qui ne correspondent pas aux volumes de leurs activités. Une situation financière anormale qui a poussé les services de la police à surveiller les mouvements des directeurs de ces entreprises depuis déjà plus de huit mois. Les enquêteurs les suspectent d’être complices avec des réseaux de trafic de stupéfiants qui s‘activent au Maroc et dans des villes situées dans le sud de l’Espagne. Selon certaines sources, les services de la police ont pu rassembler des données qui démontrent que ces entreprises sont des sociétés écrans dont les activités déclarées servent au blanchiment d’argent.
La face cachée de ces transactions étant l’intégration dans leurs résultats annuels de l’argent récolté par le trafic des stupéfiants. Mais les chiffres de leurs bilans ont mis la puce à l’oreille de la police des crimes financiers. Ces sociétés engrangent en effet des bénéfices qui dépassent de très loin ceux réalisés par des entreprises concurrentes dont les volumes d’activités sont pourtant supérieurs aux leurs. Le très grand écart entre le capital de ces sociétés et les bénéfices qu’elles ont réalisés a suscité le doute sur leurs véritables activités.
Le quotidien Assabah rapporte, dans son édition du mercredi 7 août, que l’une de ces sociétés a présenté un bilan qui dégage un bénéfice de 875 millions de dirhams alors que son capital ne dépasse pas les 10 millions de dirhams. Cette société exporte des produits agricoles vers l’Espagne à des entreprises détenues par des Espagnols et des Marocains. Ces derniers paient leurs marchandises à des prix très au-dessus de ceux pratiqués sur le marché en transférant le montant de ces factures vers les comptes de ladite société domiciliée au Maroc. En contrepartie, cette dernière importe des matières premières, notamment destinées à l’emballage à des prix tout aussi forts. Des opérations qui lui permettent de retransférer vers l’Espagne les sommes qu’elle a encaissées en facturant les produits agricoles exportés.
Une autre société de promotion immobilière réalise des appartements de luxe qu’elle vend à des prix exorbitants à des Marocains résidant à l’étranger, des Espagnols et des Italiens. Des opérations qui lui permettent de réaliser de gros bénéfices dont elle retransfère une partie vers l’Espagne en réglant des factures de matériaux de construction importés à prix fort. Les services de la police ont diligenté des enquêtes sur les responsables de ces sociétés pour vérifier les documents, la nature de leurs activités et celles de leurs relations avec leurs partenaires étrangers. Les premières investigations de la police ont permis de découvrir que les responsables de deux des sociétés étrangères ont été impliqués dans des affaires de trafic international de drogue.
Une découverte qui renforce la thèse de l’existence de complicités de blanchiment d'argent entre les entrepreneurs marocains et leurs homologues étrangers. Les enquêteurs marocains se basent sur les documents comptables des quatre dernières années. Ils recourent aussi aux données de la direction générale des impôts et de la direction de la Douane. Certaines sources soulignent que les passeports des présumés coupables ont été saisis par la police. Les responsables de ces sociétés écrans n’hésitaient pas à gonfler leurs bénéfices et à régler les impôts pour légaliser leurs activités illicites.