Les attaques ciblant le Maroc actuellement en Europe sont, en partie, la rançon du succès. Il ne faut pas dramatiser. Ce n’est pas toute l’Europe qui a signé la résolution le condamnant à propos des droits de l’homme, d’autant plus qu’elle émane de la commission de Strasbourg, ce qui n’est pas d’une grande importance.
Il est évident que tout ce qu’entreprend notre pays est analysé à la loupe. L’histoire de la corruption des eurodéputés est au fond banale. D’autres États agissent avec davantage de discrétion et personne ne leur reproche quoi que ce soit.
Il y a la question des droits de l’homme. Certes un point sensible qui sert à l’Europe en tant que critère d’estime ou de réprobation.
De tous les pays du grand Maghreb, le Maroc, objectivement n’est pas le pire des pays dans ce domaine. Le Maroc n’est pas la Libye, ni la Tunisie et, certes, encore moins l’Algérie. Il y a eu quelques manquements qu’on doit reconnaître et analyser calmement. L’arrestation et l’emprisonnement de journalistes passent très mal dans les médias européens même s’ils ont été jugés pour des faits de doit commun. Le journalisme est une profession très corporative. «Touche pas à mon journaliste» pourrait dire «Reporters sans frontières». Ce qui est reproché aux trois ou quatre journalistes marocains jugés et condamnés ne relève pas du délit d’opinion, mais de faits de société. Vrais ou faux? Je n’en sais rien. Tout ce que je constate, c’est que l’Union européenne n’entre pas dans les détails, n’examine pas les cas avec objectivité. Le fait est que les cas cités par l’UE sont devenus des victimes et des martyrs. De là à convoquer toute l’Assemblée et condamner sévèrement le Maroc, il y a eu une disproportion qui sent la mauvaise foi et l’intention de «punir» le Maroc.
La question qu’on se pose: pourquoi les services marocains, sachant cette sensibilité particulière européenne, n’évitent-ils pas de traduire systématiquement devant les tribunaux certains journalistes dont les reportages et les écrits sont critiques, très critiques même?
Ne faut-il pas les laisser dire et écrire ce qu’ils veulent? Le Maroc n’est pas si fragile que cela, ni assez vulnérable pour sur-réagir face à des articles qui ne lui plaisent pas. Il en va même de la santé de sa volonté de démocratisation et de la consolidation de l’État de droit. Je sais, on me dira qu’il y a eu des plaintes pour harcèlement, ou pire pour viol. Oui, je sais, être journaliste n’autorise pas le fait de commettre des délits punis au pénal. Mais il y a eu comme un doute, une étrange coïncidence.
N’oublions pas que le Maroc est constamment sous l’œil de ses ennemis, ceux de la junte algérienne qui, tout compte fait, sait bien se doter de lobbys importants, efficaces, invisibles et inodores. Si le Maroc a reçu une claque avec le vote de l’UE, ce n’est pas un simple hasard. Le régime algérien affute ses armes et agit dans tous les domaines y compris et surtout dans celui de la communication, de l’intox et du mensonge.
En ce sens, le Maroc aurait intérêt à réviser sa politique de communication. Il pourrait par la même occasion reconsidérer la situation de certains journalistes qui croupissent dans ses prisons. Ces derniers ne menacent ni la sécurité ni la stabilité du Royaume. En revanche, ils sont utilisés par nos adversaires et nos ennemis qui n’hésitent devant rien pour faire mal à la réputation du Maroc, laquelle avait positivement brillé lors du Mondial, ce que le régime algérien et ses «amis à l’UE» n’ont pas supporté.
La communication est une science. C’est complexe et subtil. Pour qu’elle soit efficace, il faut la travailler en amont et ne donner aucun prétexte à ceux qui rêvent de détruire notre pays et ses réalisations. Communiquer c’est savoir exister dans un monde de plus en plus dur, sans pitié, guidé par les intérêts mercantiles. Le gaz algérien est devenu le produit dont rêvent aussi bien la France que l’Italie. Ces pays sont prêts à toutes les concessions pour garantir à leurs peuples d’être chauffés l’hiver. Ils calculent le pour et le contre. Et souvent, ils sacrifient leurs bonnes relations avec le Maroc.
En privé, ils n’hésitent pas à reconnaître que le régime algérien est une caricature impopulaire. Ils disent même qu’ils adorent venir jouer au golf au Maroc et y passer de belles vacances, mais quand il s’agit des intérêts, ils n’hésitent plus.
Je résume ici une discussion que j’ai eue avec un homme politique italien, un ami, chef d’un parti démocrate dont un ou deux de ses députés ont reconnu avoir trempé dans l’affaire du Qatargate.
Pendant ce temps-là, Giorgia Meloni (présidente du conseil des ministres d’Italie, issue d’un parti d’extrême droite) s’est rendue en voyage officiel en Algérie. Quant à la France, elle vient de recevoir le chef de la junte algérienne, Saïd Chengriha.
La diplomatie algérienne bouge et cherche à marquer des points. Je ne sais pas ce que le président français, dont la visite est annoncée pour les prochains mois, fera comme concessions face à son partenaire algérien. Emmanuel Macron a la faiblesse de croire qu’il réussira là où ses prédécesseurs ont échoué: assainir les relations avec l’Algérie. Il se trompe et même si plusieurs conseillers le lui ont dit, il persévère dans son ambition.
La visite officielle de Macron au Maroc sera un test décisif pour les relations bilatérales. A mon humble avis, la position française sur le Sahara ne bougera pas d’un millimètre. Il vaut mieux le savoir et ne plus compter sur cette «amitié» dite traditionnelle, devenue otage des intérêts tenus entre les mains de la junte algérienne.
Une rumeur persistante dit qu’il n’est plus question du voyage de Macron au Maroc. Il serait reporté à une date ultérieure, non précisée.