Révision du Code de la famille: ce qui alimente les débats

Abdellatif Ouahbi, ministre de la Justice, à la Chambre des conseillers, le 10 décembre 2024. (Y.Mannan/Le360)

Revue de presseLes réactions sur la réforme de la Moudawana s’intensifient, et trois points reviennent souvent dans les débats: la prise en charge financière de l’ex-épouse et de son nouveau mari, la situation des parents en cas de départ de l’ex-mari du domicile conjugal, ainsi que l’attribution de la propriété du domicile familial aux veuves. Une revue de presse issue d’Assabah.

Le 29/12/2024 à 19h00

Les débats et les discussions se sont intensifiés ces derniers jours dans l’espace public, dans les médias et sur les réseaux sociaux, après les dernières annonces concernant la Moudawana.

Politiciens, militants, acteurs associatifs, journalistes ou simples citoyens… Tous, qu’ils soient issus de courants progressistes ou conservateurs, se sont prêtés au jeu de l’analyse, du commentaire et de l’interprétation des nouveautés que pourraient apporter les amendements de la Moudawana.

Assabah de ce lundi 30 décembre fait un tour d’horizon des principales réactions sur le sujet, et s’intéresse particulièrement aux controverses suscitées par les propos tenus par Abdellatif Ouahbi, ministre de la Justice, lors de la première rencontre de communication de son département à ce propos.

Selon le quotidien, trois points reviennent principalement dans les débats: la prise en charge financière de l’ex-épouse et de son nouveau mari, la situation des parents en cas de départ du domicile conjugal par l’ex-épouse, ainsi que l’attribution de la propriété du domicile familial aux veuves.

Les débats sur ces sujets sont même devenus houleux, explique Assabah, selon lequel «l’homme marocain, quelle que soit sa conviction, rejette catégoriquement l’idée de dépenser pour le compte du compagnon ou du mari de son ex-épouse».

Il s’oppose également à l’idée qu’un «étranger» puisse s’installer dans l’ex-domicile conjugal après le remariage de son ex-épouse, ou que celle-ci –c’est également le cas pour les veuves– puisse expulser ses parents de ce même domicile.

Sur ces positions, pourtant très ancrées dans la société marocaine, le gouvernement a peiné à apporter des explications détaillées.

Assabah affirme aussi avoir tenté en vain de joindre le ministre de la Justice pour obtenir des explications à ce propos.

Mustapha Baitas, porte-parole du gouvernement, a déclaré lors d’une conférence de presse tenue jeudi 19 décembre dernier à Rabat, après la réunion du Conseil de gouvernement, que celui-ci travaillera sur la rédaction du nouveau Code de la famille, conformément aux directives royales et dans des délais raisonnables, en se basant sur plusieurs principes fondamentaux.

Il a aussi ajouté que le gouvernement suivait des orientations claires, dont le respect des délais, une formulation et rédaction adéquates, ainsi que l’application des référentiels et principes mentionnés dans le discours du Roi Mohammed VI, relatifs à la justice, à l’égalité, à la solidarité et à la cohésion.

Il a assuré que la nouvelle mouture des amendements de la Moudawana s’inscrirait dans ce cadre.

Mustapha Baitas a aussi rappelé que le Roi Mohammed VI avait présidé une réunion de travail au cours de laquelle il avait chargé le chef du gouvernement et les ministres de communiquer avec l’opinion publique à propos de la révision du Code de la famille.

En réaction rapide à ces directives, une rencontre de communication a été organisée mardi 17 décembre dernier, pour dévoiler les grandes lignes des propositions de réforme.

Le ministre a indiqué que son homologue à la Justice avait présenté un exposé succinct lors du Conseil de gouvernement, à propos de la mise en œuvre des propositions de réforme du Code de la famille, conformément aux directives royales formulées dans une réunion de travail présidée lundi dernier, 16 décembre, au palais royal.

Le ministère de la Justice prépare donc un projet de loi relatif au Code de la famille, qui sera soumis au Secrétariat général du gouvernement pour une vérification juridique et constitutionnelle du contenu de ce texte, avant qu’il ne soit présenté au Conseil du gouvernement pour être discuté et adopté.

En ce qui concerne la suite de ce processus, Assabah se fait l’écho des révélations de Mustapha Baitas, qui a expliqué qu’après l’adoption du projet de texte par le gouvernement, il sera transmis à la Chambre des représentants, pour son examen et son amendement par la Commission de la justice et de la législation, avant d’être présenté lors d’une session plénière pour être adopté par les députés.

Le projet de loi sera ensuite présenté devant les membres de la Commission de la justice et de la législation de la Chambre des conseillers, pour d’autres discussions, modifications et leur adoption en session plénière.

Enfin, il sera soumis à un dernier vote par les députés de la Chambre des représentants, en vue de son adoption définitive, pour être publié au Bulletin officiel.

Alors que le circuit législatif du nouveau Code de la famille suit d’ores et déjà son cours, Assabah explique que le gouvernement pourrait se heurter à certaines contraintes, principalement liées à d’autres priorités, qui devraient aussi accaparer l’Exécutif.

Selon le quotidien, les membres du gouvernement devront aussi approuver les amendements à apporter au Code de procédure pénale et au Code pénal, ainsi que se charger de la finalisation des amendements à apporter au Code de procédure civile, actuellement en discussion à la Chambre des conseillers, avant qu’il ne soit renvoyé à la Chambre des représentants, pour une deuxième lecture.

Parmi les autres priorités qu’Assabah cite, l’adoption de la loi organique sur le droit de grève, la révision du Code du travail, la réforme des systèmes de retraite, la poursuite des projets d’infrastructures liés à la Coupe d’Afrique 2025 et à la Coupe du Monde 2030, de même que la résolution des problèmes du secteur agricole, dûs à la sécheresse.

L’installation de stations de dessalement d’eau de mer, pour éviter les pénuries d’eau, est également une priorité d’ici 2025, tout comme la révision des lois électorales, en préparation des élections de 2026, qui s’annoncent déjà très disputées.

«Autant de dossiers brûlants pour le gouvernement, qui devront être pris en compte dans la préparation du nouveau texte de la Moudawana et pourraient en impacter les délais d’élaboration», commente Assabah.

Par Fayza Senhaji
Le 29/12/2024 à 19h00