Trafic de fossiles: neuf dents de dinosaures en provenance du Maroc saisies par la douane française

Des dents de dinosaures, datant de près de 70 millions d’années, provenant du Maroc et saisis, le 17 février 2025, par la douane française.

Des douaniers français ont intercepté le 17 février, dans un camion de fret, des dents de dinosaure datant de 70 millions d’années, provenant du Maroc et détenues sans justificatifs. Cette saisie met en lumière le commerce illégal de fossiles, une pratique qui alimente un marché noir international.

Le 28/02/2025 à 13h45

Les douaniers de Menton, au sud-est de la France, ont récemment intercepté des dents d’une espèce disparue, de la famille des dinosaures, dans un camion de fret voyageant entre l’Espagne et l’Italie, sans justificatifs. «Il s’agit de dents de reptiles marins vieux de près de 70 millions d’années qui proviennent du Maroc, il y a une fossilisation et une sédimentation caractéristiques», raconte à l’AFP Pierre-Elie Moullé, attaché de conservation au Musée de la préhistoire régionale de Menton. Sollicité par les douanes, l’expert affirme que le Maroc fait l’objet de commerce illégal de fossiles.

Jeremy Xido, réalisateur américain du documentaire «Dinosaures, la chasse aux fossiles» («The Bones»), visible sur la plateforme d’Arte, souligne qu’«au Maroc, des gens au très faible pouvoir d’achat extraient des fossiles dans des conditions parfois dangereuses pour nourrir leur famille et les vendent à des étrangers qui ont les moyens d’acheter en gros et de transporter légalement ou illégalement vers de plus grands marchés internationaux».

Il suffit «de regarder un petit peu sur internet, ça fourmille de ventes, pas forcément légales», rebondit Pierre-Elie Moullé. «Fossiles, dinosaures, Maroc»: taper ces mots-clés sur un site de vente grand public donne des résultats surprenants.

Comme ce squelette d’un reptile marin proposé autour de 37.000 euros, sans les frais de livraison. Prix qui bondit à près de 45.000 euros après une première prise de contact avec le propriétaire. Des échanges qui s’arrêtent avec la question : «Est-ce que le Maroc risque de réclamer ce squelette si je l’achète ?»

Zones d’ombre

Les zones d’ombre pullulent dans ce type de négoce. Même le marché en pleine lumière, celui des enchères publiques et médiatisées, a mis du temps à se réguler. «Quand j’ai commencé ma carrière, on ne parlait jamais de provenance», quel que soit l’objet vendu, rappelle pour l’AFP Me Alexandre Giquello, à la tête de Drouot, institution française des enchères.

«La bonne foi du possesseur prévalait. Si le type avait sorti la pièce illégalement, il engageait sa responsabilité de vendeur. Mais la première mention des provenances dans la loi française, c’est 2012″, déroule le commissaire-priseur.

L’acteur américain Nicolas Cage avait restitué en 2015 un crâne de dinosaure, extrait illégalement de Mongolie et acheté aux enchères à Beverly Hills pour près de 276.000 dollars en 2007 (environ 263.000 euros). Une transaction parmi d’autres, preuve de la fascination intacte pour les dinosaures. «C’est un passé, une épopée qui fait rêver, on reçoit énormément de visites scolaires dans les musées et les gens ont envie de posséder des morceaux de ce patrimoine paléontologique», établit Pierre-Elie Moullé.

«Tout le monde trouve ça génial, mais tout le monde n’achète pas», nuance Me Alexandre Giquello. Au-delà d’une question de moyens, de place, d’entretien, les collectionneurs cherchent la pièce “incroyable”», selon lui.

Fans de «Jurassic Park»

«Si on a dix personnes intéressées dans le monde pour un grand squelette de dinosaure, c’est vraiment le record», confie le commissaire-priseur. «C’est une clientèle bien particulière, très fortunée, souvent dans les nouvelles technologies», avance-t-il. Beaucoup aux États-Unis. Pas beaucoup d’Asiatiques. Et tous ont vu «Jurassic Park», passe en revue ce responsable qui a adjugé à Paris en 2021 pour 6,6 millions d’euros «Big John», un tricératops géant de 8 mètres de long découvert aux États-Unis.

Que vont devenir les pièces saisies près de Menton ? «Ça va dépendre de ce qui va être décidé entre l’administration des douanes et probablement le ministère de la Culture. Il est assez courant qu’il y ait des remises aux autorités du pays d’où provient la marchandise», synthétise pour l’AFP Samantha Verduron, adjointe au directeur régional des douanes de Nice.


Par Nisrine Zaoui et AFP
Le 28/02/2025 à 13h45

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