Bienvenue aux métèques bien diplômés!

Fouad Laroui.

Fouad Laroui.. KF Corporate

ChroniqueEt nous? Que pouvons-nous faire pour retenir nos scientifiques de haut niveau?

Le 09/11/2022 à 10h57

On ne s’en est rendu compte que récemment mais en mai dernier le président américain Joe Biden avait fait en douce au Congrès une proposition étonnante: autoriser des milliers de Russes à entrer et s’installer aux États-Unis sans formalités. Oui, des Russes!

L’information était noyée parmi d’autres à la page 11 de l’édition internationale du New York Times datée du 4 mai. (Vérifiez.) On y lit vraiment l’expression «sans les formalités habituelles», c’est-à-dire sans demande de visa ni fourniture de trente-six documents du genre «certificat de bonnes vie et mœurs» –comment dit-on m’qaddem en russe? –ou «attestation de vie» –même les zombies et les fantômes pouvaient postuler, pourvu qu’ils vinssent de Moscou, de Kazan ou de Kostroma.

What? What the…?

La proposition de Biden tient toujours. On se frotte les yeux mais les mots n’en disparaissent pas pour autant. En pleine guerre entre la Russie et l’Otan, donc les États-Unis, ces derniers accueillent à bras ouvert des moujiks?

Mais justement, ce ne sont pas des moujiks aux mains calleuses devant qui on déroule le tapis rouge. Le projet porté par Biden précise clairement que les impétrants «doivent être titulaires d’un master ou d’un doctorat en sciences, en particulier en physique nucléaire ou en intelligence artificielle».

Ah, les choses deviennent plus claires. L’initiative de la Maison Blanche vise à faire d’une pierre deux coups: renforcer les capacités américaines dans ces domaines cruciaux et affaiblir d’autant le pays de Poutine.

Vous me dites: «C’est de bonne guerre». Oui, c’est le cas de le dire. Et, à la réflexion, ce n’est que la continuation d’une guerre sourde que se livrent les puissances depuis quelques décennies: il s’agit de se «chiper» les cerveaux par tous les moyens. Regardez la liste des lauréats du prix Abel, le Nobel des mathématiciens: sur les dix les plus récents, la moitié sont des Américains naturalisés de fraîche date, c’est-à-dire des têtes venues d’ailleurs.

Mon ami Steven D. me dit qu’en Angleterre les Conservateurs sont en train de réfléchir à une façon détournée d’importer quelques milliers de scientifiques indiens après avoir répété pendant des années qu’ils constituaient, eux les Tories, le meilleur rempart contre… l’immigration.

Et nous? Que pouvons-nous faire pour retenir nos scientifiques de haut niveau? J’en connais des dizaines aux États-Unis, en Suisse, en Angleterre, en France… et je n’ai pas la réponse. Interrogé, chacun me fait une réponse différente. L’un ne peut effectuer ses recherches que dans un laboratoire de pointe du genre CERN, l’autre évoque la qualité de la vie là où il se trouve (Californie, Canada, Suisse…), un troisième déplore les lourdeurs administratives auxquelles il serait confronté at home–être nommé professeur n’est pas simple, même quand on est brillant. Un de mes amis, physicien de haut vol, avec une liste impressionnante de publications dans les revues internationales les plus prestigieuses, en a assez de végéter à un grade inférieur à sa juste valeur. Gageons qu’il sera québécois ou parisien dans quelques années.

Certaines universités marocaines font des efforts louables pour promouvoir leurs chercheurs les plus prometteurs et pour faire revenir au pays ceux qui font de belles carrières à l’étranger; mais il n’est pas facile de concurrencer Harvard, Saclay ou les Instituts Max-Planck.

On se consolera en se rappelant qu’un Marocain ne perd jamais sa nationalité. Par conséquent, le jour où une Américaine née à T’nine Ch’touka ou un Suisse originaire du Rif obtiendront un Prix Nobel, on pourra légitimement pavoiser dans toutes les villes du Royaume…

Par Fouad Laroui
Le 09/11/2022 à 10h57

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Je retiens la conclusion qui m'évite d'aborder le sujet de fond, le débat moult fois évoqué ici et dans tous les domaines, c'est-à-dire pas uniquement celui de la recherche en tout genre. Autrement dit, "s'occuper" des métèques bien diplômés doit se faire en parallèle de l'autre mission : s'occuper des métèques non diplômés. Nous voulons garder tout le monde, sans exception, les départs doivent rester quantité négligeable.

Bien sûr,les citoyens doivent être exigeants à l'égard des gouvernants.Après tout,personne n'a obligé ces derniers à prendre de telles responsabilités.Mais ,deux éléments sont à considérer.Juger=comparer!Or, on ne compare que les choses comparables.Aussi,il ne serait pas pertinent de nous comparer à la France,USA,Allemagne,Canada...D'autre part,nous croyons,de bonne foi, que certains problèmes sont facilement solubles:le fameux "Il n'y a qu'à". Sur le terrain,ce n'est malheureusement pas le cas!Moralité:ne pouvant pas changer les mentalités (à court terme),il devient impératif et urgent de changer les procédures,pour avoir moins de corruption,de bureaucratie,de favoritisme...Moins d'intervention humaine dans les processus administratifs équivaut à plus d'efficacité et de transparence.

Bonjour Monsieur Hassan alaoui. Je n'aime pas l'expression "fuite des cerveaux". Fuir, c'est se sauver face un danger! Le départ des diplômés concerne tous les pays, pas seulement les pays sous-développés. C'est un phénomène qui ne date pas d'aujourd'hui. Les humains ont toujours bougé pour une raison ou pour une autre. Pour la France par exemple, sur les 2 millions de Français établis à l'étranger, 58% sont titulaires d'un diplôme supérieur. Et comme vous dîtes, ces diplômés ont sûrement coûté cher à leur pays d'origine. Mais, il ne faut jamais oublier les effets retours qui profitent à leur mère patrie. Ils sont loin d'être négligeables. Cordialement.

il faut se poser une question: un marocain sans reves existe t il? nous revons quelquefois nos vies, et le sort vous ramene au reveil... le reve du voyage ailleurs of course et la rencontre de l'inconnu qui nous sortira d'un environnement figé, petrifiés par les mauvaises choses qui infectent notre belle société...

gaia constitue ses neurones, patiemment, a bout de milliards d'annees..thanks again for the benefit of your writing .

Sur un plan personnel,il est légitime qu'un jeune diplômé cherche à se réaliser là où les conditions sont les plus propices.Le principe selon lequel"la mauvaise monnaie chasse la bonne"se vérifie également au niveau de la gouvernance et de la gestion.Quand c'est la médiocrité qui est aux commandes,l’intelligence et la compétence sont invitées à déguerpir.Maintenant,il faut se méfier de ceux qui se considèrent comme du "haut potentiel"suite à une simple auto-évaluation et ne cessent de se plaindre de ne pas être reconnus à leur juste valeur.En général,quand on est effectivement compétent,on est modeste et simple.On n'a pas besoin de le crier sur les toits .

Bonjour Monsieur Driss. Entièrement d'accord. Tous les matins à mon réveil, je me dis: "heureux celui qui se sent bien là où il est !". Cordialement.

Bsr professeur.L'Occident n'est pas le seul à convoiter nos scientifiques de haut vol ,certains pays du Golfe aussi sont intéressés par eux.Les Emirats Arabes Unis par exemple font tout pour attirer nos perles rares.Malheureusement au bled de chez nous,on fait tout faire partir la crème de la société.Pourquoii? Mystère!Il est temps d'arrêter cette hémorragie car il y va de notre devenir.Heureusement pour nous,le souverain Mohammed VI appelle directement certains hauts cadres vivant à l'étranger et leur confie des missions avec des recommandations bien précises pour réussir tel ou tel projet sinon le pays aurait déjà coulé à cause des incompétents,de plus en plus nombreux.Merci pour votre joli billet et merci au 360.ma.

La fuite des cerveaux est un problème qui touche tous les pays sous-développés. Il n’y a qu’à voir le nombre des docteurs soudanais et irakiens en Grande Bretagne par exemple. Ces docteurs qui ont coûté cher a leur pays, viennent pour faire des spécialités en Grande Bretagne mais restent dans ce pays après avoir terminé leurs études. Ce phénomène est le même en France, en Belgique et au Canada pour tous les Africains francophones. Tant que les pays d’origine ne font pas le moindre effort pour retenir leurs cerveaux, ce phénomène ne fera que s’amplifier. Le dicton populaire marocain “aucun chat ne fuit la maison ou se fête un mariage” est à méditer avant de chercher midi a quatorze heures.

Bonsoir Monsieur Jamal. La France ne nous pompe rien du tout, les hommes appartiennent à eux-mêmes. Cordialement.

Former des cadres coûte énormément d’argent. L’occident pille les resources naturelles et humaines des pays en voie de développement gratos.

C'est certainement encore pire que ce qu'on peut imaginer. Le Maroc n'arrive pas à capter l'émigration qualifiée des diaspora musulmanes en Europe (surtout en France) car le cadre au Maroc est tout simplement trop ressemblant à celui de la France. Langue française dans l'éducation et l'administration. Il y a même une partie de la population au Maroc qui est de tendance laïc (à la française) et donc agressive vis à vis de la pratique de l'Islam et ce genre de personne, bien sûr ces personnes n'ont pas vécu assez longtemps pour voir la réalité en France vis à vis de tous les africains issus de leurs ex-colonies. Comme pour tous les projets au Maroc, la seule solution serait une action générale du roi Mohammed 6 qu'Allah l'assiste.

la générosité allemande :ce pays très développé a besoin de personnels qualifiés dans tous les domaines,et bien le cruel dictateur sanguinaire Asad a fourni à l'Allemagne un million de réfugiés qualifiés qui ont fui la syrie détruite par l'assassin Asad,et dire que les pays arabes aspirent au développement,pour qui ce développement ,et bien pour nos maîtres les pays capitalistes!

@ exenseig - Du n’importe quoi! Une chance que vous n’enseignez plus; et l’on devrait s’inquiéter du sort de vos anciens élèves ou étudiants.

Putting aside the case of the Russian scientists mentioned above, “brain drain” takes place for different reasons. They’re primarily professional; but very often personal. However, it should be noted that there are a few examples of countries where governments have been successful in preventing that from happening. Israel, South Korea or Singapore, are all countries that have managed to make the retention of their scientific community central to their public policies. Noteworthy is the private sector’s involvement in that process. Morocco’s finally waking up to the reality of having to provide its brightest minds with the proper conditions, in order to keep them in the country to help build up a pool of scientists the country needs for certain research projects in very specific areas.

et pourtant et pourtant!! combien de fois n'ai je pas entendu nos dirigeants louer et se gargariser de nos chers scientifiques à l’étranger sans jamais dire un seul mot en faveur de ces chercheurs qui ont préféré rester au Maroc. pour ces dirigeants tous les cerveaux locaux sont des imbéciles qui n'ont pas pu vendre leur habilités à l’étranger et qui se contentent donc du Maroc. jamais ils n'ont pensé que pour certains c'est un choix délibéré pour essayer de tirer notre pays vers plus de progrès

Pour ceux qui prétendent le coût élevé du budget de l enseignement on leur dit essayez de calculer le coût total de l ingorance

Dites-le à la classe politique du bled qui n’en a absolument rien à faire de tout ce qui touche à l’intellect. A quoi peut-on d’attendre de partis politiques qui préfèrent encore, même aujourd’hui, la nomination d’analphabètes comme candidats aux élections? A savoir augmenter le budget de l’enseignement!

Lorsque l'on voit de hauts responsables dans l enseignement supérieur comme nos chers ministres qui, lorsque on entend la façon dont ils répondent aux questions de nos chers parlement s, on se rend compte que la réforme dans ce domaine de l enseignement aurait besoin des années et des années pour se réaliser ou ne pas se réaliser puisque depuis l indépendance à nos jours c a d 67ans et on est encore à la recherche d une bonne solution à cette équation insoluble qui est le développement du secteur de la science dans notre pays....

Sans risque de dévoiler un secret, nos décideurs ont toujours valorisé la sécurité et la docilité aux compétences et particulièrement dans les domaines de l'enseignement et des Sciences. Beaucoup de compétences ont été ignorées et écartées juste parce que considérées "têtes dures " exigentes et trop critiques. Merci

A l'école polytechnique en France , tout frais payé par l'état français , ils imposent désormais dans la loi ,aux polytechniciens de consacrer quelques années à l'état à l'issue de l'obtention du diplôme. Au Maroc, nos ministres restent les bras croisés avec un air fataliste laissant le Maroc devenir un fournisseur gratuit de matière grise pour l'occident et en particulier la France qui nous pompe l'essentiel de nos futurs élites.

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