Enfin une bonne nouvelle pour le Maroc. Leila Slimani a été distinguée par le prix littéraire le plus prestigieux de France, le Goncourt. J’avoue être heureux et fier de transmettre le relais à Leila Slimani, cette jeune auteure dont le premier roman “Dans le jardin de l’ogre” m’avait impressionné il y a deux ans.
Elle a eu le Goncourt parce qu’elle a du talent. Elle a un univers et un style. Elle maîtrise la langue française et a beaucoup d’imagination. Dès cet été, quand nous autres membres de l’Académie Goncourt, nous nous échangions nos impressions de lecture, son nom revenait souvent. A notre première réunion, début septembre, son livre avait emporté l’adhésion et avait eu presque tous les suffrages.
Quand “Chanson douce” a été sélectionné sur la dernière liste, rien n’était sûr. Elle était en concurrence avec principalement Gaël Faye pour “Petit pays” chez Grasset. Un très bon roman.
Lorsqu’on arrive au restaurant Drouant à 11h30 pour notre réunion, personne ne sait ce qui va en sortir. Nous votons au tirage au sort. Leila Slimani a eu dès le premier tour six voix, contre deux à Faye, une à Jauffret et une à Cusset. A 11h32, le vote a été fait. Il fallait attendre 12h45, heure officielle, pour l’annoncer à la presse. Il y avait plus d’une centaine de journalistes de tous les médias. Quand elle est arrivée vers 13h15, elle eut du mal à atteindre le salon où nous l’attendions accompagnée de son éditeur, Antoine Gallimard.
Elle est arrivée, calme et sereine. Etonnante de sang-froid. Elle a affronté avec élégance et simplicité les nombreux journalistes qui l’attendaient. Les membres du jury qui ne la connaissaient pas furent emballés par sa modestie et son calme. La victoire tranquille.
Ce n’est pas parce que l’Académie Goncourt a été souvent misogyne que nous avons distingué Leila Slimani. Mais le fait que seulement 11 femmes ont obtenu le Goncourt en 113 ans, n’est pas indifférent à notre choix. Mais l’important a été la qualité du roman de Leila Slimani, un roman de portée universelle.
A présent, on peut dire que la littérature d’expression française a une belle présence sur la scène internationale. Après le Goncourt de la poésie à Abdellatif Laabi et le Goncourt de la Nouvelle à Fouad Laroui, le Maroc a de quoi être fier de ses écrivains. Reste que la littérature marocaine écrite en arabe mérite d’être mieux connue et mieux diffusée. Espérons qu’avec le Salon du Livre de Paris en mars prochain, où le Maroc est l’invité d’honneur cette année, des écrivains arabophones seront traduits et mis à la disposition des nombreux lecteurs en France.
A Leila je dis: “Bienvenue dans la tourmente du succès et de la notoriété”.