Nouvelle découverte archéologique majeure au Maroc. Une étude publiée dans la revue scientifique britannique Antiquity de l’université de Cambridge révèle l’existence du «plus ancien et plus grand complexe agricole d’Afrique en dehors du corridor du Nil, datant du Néolithique, établie entre 3400 et 2900 avant J.C», découvert lors de travaux menés sur le site archéologique d’Oued Beht, dans la province de Khémisset.
Dans un communiqué publié le 23 septembre, la prestigieuse université britannique précise que ces investigations ont été effectuées par une équipe pluridisciplinaire, composée notamment de Youssef Bokbot de l’Institut national des sciences de l’archéologie et du patrimoine national (INSAP), Cyprian Broodbank de l’université de Cambridge et Giulio Lucarini de l’Institut des sciences du patrimoine du Conseil national de recherche d’Italie.
Selon les chercheurs, ces fouilles ont permis de découvrir la plus ancienne société agricole jusqu’alors inconnue, issue d’une période mal connue de la préhistoire de l’Afrique du Nord-Ouest. «Cette étude révèle pour la première fois l’importance du Maghreb (Afrique du Nord-Ouest) dans l’émergence de sociétés complexes dans le grand bassin méditerranéen», soulignent-ils, précisant que «tous les éléments indiquent la présence d’un établissement agricole à grande échelle, à taille similaire à celle de Troie au début de l’âge du bronze».
Vue aérienne du site archéologique d'Oued Beht, dans la province de Khémisset.. DR
D’après l’université de Cambridge, l’objectif de cette étude était de combler «une lacune significative» dans la connaissance de l’archéologie de la région entre 4000 et 1000 av. JC., bien que le rôle important joué par le Maghreb durant le Paléolithique, l’âge du fer et les périodes islamiques, soit bien connu.
«Depuis plus de trente ans, je suis convaincu que l’archéologie méditerranéenne a omis quelque chose de fondamental dans la période préhistorique tardive de l’Afrique du Nord. Aujourd’hui, nous savons enfin que c’était vrai et nous pouvons mener une nouvelle réflexion, en reconnaissant la contribution dynamique des Africains à l’émergence et aux interactions des premières sociétés méditerranéennes», a déclaré Cyprian Broodbank.
Découverte de restes de plantes et de poteries «d’une valeur sans précédent»
D’après les auteurs de l’étude, depuis plus d’un siècle, la dernière grande inconnue de la préhistoire méditerranéenne tardive a été le rôle joué par les sociétés des côtes sud-africaines de la Méditerranée, à l’ouest de l’Egypte. Mais, désormais, leurs découvertes «prouvent que cette lacune n’est pas due à un manque d’activité préhistorique majeure, mais à un manque relatif d’investigations et de publications» et confirment qu’Oued Beht «affirme désormais le rôle central du Maghreb dans l’émergence des sociétés méditerranéennes et africaines au sens large».
Au cours de leurs travaux de terrain, les chercheurs ont également pu récupérer des restes de plantes et d’animaux domestiques, 3.368 pierres taillées, 50 haches, et herminettes, 371 artefacts et 1.295 tessons de poterie d’environ -5000 à -3000 avant JC., et des poteries «d’une valeur sans précédent», tous datant de la période néolithique finale, ainsi que «de nombreuses preuves de fosses de stockage profondes».
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«Il est crucial de considérer Oued Beht dans un cadre plus large de co-évolution et de connectivité englobant les peuples des deux côtés de la porte Méditerranée atlantique au cours de la fin du quatrième et du troisième millénaire avant J-C », (…) et de la reconnaitre comme une communauté typiquement africaine qui a contribué de manière substantielle à la formation de ce monde social», recommandent les auteurs de l’étude.