Le monde est un continent de blessures, de peurs et de désirs.
Continent inachevé, en jachère toujours,
Dans le désordre et le chaos.
Mais l’œil, avant tous les autres sens, lutte pour reconfigurer ce monceau de terre et lui conférer ce qui lui tient lieu de forme ultime.
L’œil avant la conscience.
L’œil avant les mots.
L’œil avant le rêve, les blessures et la peur.
L’œil avant toutes choses.
L’œil au cœur du désarroi et de nos interrogations.
Il désigne, gardien iconoclaste, le réel et le nomme.
Il gouverne la part, indestructible, nichée au fond de nous et lui donne la force et les raisons de se battre.
C’est cette part –humaine– faite de silence et de lumière, qui est à l’œuvre, inlassable et fondamentale, pour gagner sa place.
Elle est aussi faite de révoltes, de guerres intimes et de rêves.
C’est notre approche des autres –le pôle de notre être– le point cardinal qui oriente la morale et fonde ce qu’on nommera l’esthétique.
C’est cet élan qui nous habite –à notre insu– et qui n’a pour seul horizon que de s’arrimer à nos semblables, dans la gloire récalcitrante d’une aube radieuse.