Un mois après l’arrêt du Gazoduc Maghreb-Europe (GME), l’Espagne est sous le choc. L’incident touchant en début de semaine le gazoduc direct, Medgaz, reliant l’Algérie à l’Espagne, remet en doute les fameuses garanties promises par Alger au gouvernement de Pedro Sanchez.
Forcé par Alger d’accepter une réduction de débit du gaz livré via Medgaz, le spécialiste espagnol des installations de transport et de stockage de gaz, Enagas, a diffusé une alerte de marché, dans laquelle il a prévenu d'une "restriction des fluides" entre lundi à 00h00 et mercredi à 6h00.
Pour les ménages et les industriels espagnols, la frustration est d’autant plus grande que l’incident intervient à peine 48 heures après le début d'une vague de froid. Deux jours de froid ont ainsi suffi pour montrer la fragilité du système électrique de l'Espagne qui dépend pour moitié de l’Algérie pour ses achats de gaz naturel.
«Deux jours de froid, une consommation de gaz accrue, sachant que cela n’a rien à voir avec ce qui pourrait se produire fin janvier prochain», s’inquiète le journal espagnol Okdiario, en se référant aux prévisions du secteur qui s'attend à une vague de froid plus intense cet hiver.
«Ce n'est qu'au cours de ces deux jours de froid qu'il y a eu des baisses de débit de gaz et des restrictions d’entrée par Medgaz, le seul gazoduc ouvert pour l'Espagne. Un panorama pas tout à fait optimiste qui renverse les prétendues garanties de Pedro Sanchez qu'il n'y a aucun risque de coupures», poursuit la même source, ajoutant que ce n’est d’ailleurs pas le premier incident repéré sur le parcours de Medgaz ces derniers temps.
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En analysant l'évolution du stock de gaz en Espagne pour la journée du 24 novembre 2021, Okdiario constate une longue période de 13 heures pendant laquelle le gaz est resté à son niveau minium dans le système de distribution.
«Seulement deux jours de froid ont montré la tension du système électrique, dans un contexte marqué par la flambée des prix du gaz naturel et une faible production d'énergie verte, ce qui a conduit le système à enregistrer des augmentations de l'utilisation du gaz allant jusqu'à 76,9% pour produire de l'électricité. Cela demande tout un effort et constitue une source de tension supplémentaire à l'heure où l'Espagne ne dispose pas du Gazoduc Maghreb-Europe, fermé par l'Algérie», relève le journal espagnol qui en déduit que «les garanties de Pedro Sanchez en affirmant que l’approvisionnement en gaz était sécurisé étaient plus politiques que techniques».
Plusieurs voix s’élèvent en Espagne pour critiquer l’attitude adoptée par le gouvernement Sanchez, accusé d’avoir cédé à la pression d’Alger pour ne pas reconduire le contrat du Gazoduc Maghreb-Europe, lequel a expiré le 30 octobre dernier. En misant sur un régime peu fiable et imprévisible, et en comptant sur une seule liaison directe Medgaz et quatre modestes méthaniers à l’actif de Sonatrach, le gouvernement Sanchez ne mesure pas encore le niveau de risque auquel l’économie espagnole est aujourd’hui exposée.
Le gouvernement espagnol, lui, continue de nier la situation et affirme que le flux de gaz naturel est pleinement assuré, alors que les données officielles confirment le contraire et montrent à quel point le deal avec l’Algérie est fragile. Tout cela, déplore Okdiario, alors que Sanchez a déjà reçu l'estimation officielle selon laquelle la coupure du Gazoduc Maghreb-Europe, ajoutée à la baisse des flux issus d’autres d'interconnexions, provoquera une chute de 35% des approvisionnements en gaz, rien que pendant cet hiver.