La Russie, premier exportateur mondial de blé avec 78 millions de tonnes prévues en 2023, lorgne le marché marocain. Dans une interview accordée à l’agence de presse russe TASS, l’ambassadeur de Russie au Maroc, Vladimir Baibakov, déclare que son pays est prêt «à fournir du blé au Maroc à un prix raisonnable». D’après le diplomate, «dans un contexte de nouvelles conditions géopolitiques et d’exacerbation des crises énergétique et alimentaire, un tel partenariat est particulièrement important».
Il rappelle par ailleurs que le Maroc est un des principaux partenaires commerciaux et économiques de la Russie en Afrique. Le Royaume était en effet le troisième en termes d’exportations et le quatrième en termes d’importations. «Après la pandémie de coronavirus, les échanges entre nos deux pays ont de nouveau dépassé la barre des 2 milliards de dollars et ne cessent d’augmenter», précise-t-il.
Forte baisse des importations de blé russe depuis 2021
La Russie était, entre 2018 et 2020, le troisième fournisseur de blé du Maroc, derrière la France et l’Ukraine, avec notamment plus de 361.000 tonnes livrées au Royaume en 2020. Un an plus tard, Moscou a été éjecté du top 3, avant de quitter le navire des fournisseurs après le déclenchement de la guerre avec l’Ukraine le 24 février 2022. Pour leur approvisionnement, les négociants marocains se sont désormais tournés vers la France, l’Argentine, la Roumanie, la Lituanie, l’Allemagne, le Brésil, ou encore la Pologne.
Cette déclaration de M. Baibatov sonne donc comme une volonté de la Russie de rattraper son retard sur le concurrent ukrainien, dont les cargaisons ont été bloquées depuis la suspension de l’accord d’exportation de blé depuis la mer Noire par Moscou, le 17 juillet dernier. Une situation qui entraine une flambée des prix du blé sur le marché mondial.
Elle intervient également plus d’un mois après que le Maroc a annoncé une nouvelle modification de son système de restitution des importations de blé tendre pour encourager les importations depuis la mer Noire.
Convaincre les assureurs et les navires
Dans une circulaire datée du 28 juillet dernier, l’Office national interprofessionnel des céréales et légumineuses (ONICL) indiquait qu’«à partir du 1er août 2023, le prix de revient moyen retenu, pour le calcul de la prime forfaitaire, correspond à la moyenne des prix de revient de l’origine la plus basse des prix de revient pour les origines Allemagne, Argentine, France et USA».
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Contacté par Le360, un négociant marocain nous expliquait que l’objectif de cette décision est d’aligner la restitution forfaitaire du blé russe sur les autres origines, afin d’inciter les importateurs marocains à s’approvisionner depuis la Russie, après la suspension du corridor sur la mer Noire. Selon le professionnel, il existait une prime forfaitaire Russie-Ukraine qui était inférieure à celle pour les importations de blé dans les autres pays du monde.
Seul bémol: de nombreux assureurs refusent de couvrir le risque de guerre et plusieurs navires rechignent à accoster en mer Noire, après les menaces de Vladimir Poutine, qui considère les bateaux présents dans cette zone comme des navires militaires. Deux contraintes à lever pour inciter les négociants marocains à s’approvisionner depuis la Russie et pour renforcer le stock de blé du Royaume après une récolte estimée à 55 millions de quintaux (soit 5,5 millions de tonnes) pour la campagne 2022-2023.