«Peut mieux faire». Tel est, en substance, le sentiment du patronat marocain après l’adoption de la loi de finances 2024, exprimé par le président de la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM) Chakib Alj, lors d’une conférence de presse tenue ce vendredi 15 décembre au siège de l’organisation à Casablanca. «Nous estimons que la loi de finances 2024 répond partiellement à nos ambitions. À la publication de ses mesures, les chefs d’entreprises ont été pour le moins surpris. Le traitement de la réforme de la TVA vers une neutralité a été jugé incomplet et certaines mesures ont fortement inquiété le monde économique», a-t-il déclaré.
Le patron des patrons cite, à titre d’exemple, l’application d’une solidarité tous azimuts pour les dirigeants et responsables en matière de TVA, ainsi que les évolutions des taux de TVA et des droits de douane applicables à un ensemble de produits, décidées sans la consultation préalable des acteurs concernés. «L’augmentation de la TIC (taxe intérieure de consommation) et des droits de douane de 2,5 à 30% sur un ensemble de produits n’avait pas de pertinence économique, puisqu’elle ne fera que renforcer l’informel au lieu de l’intégrer», regrette Chakib Alj.
«Un message mitigé au monde de l’entreprise»
D’après lui, «ces évolutions envoient un message mitigé au monde de l’entreprise et peuvent remettre en cause des décisions et des intentions d’investissement» dans un contexte où «la destination Maroc, en tant que terre d’investissement, est face à une rude concurrence à l’échelle mondiale». «Nous aurions espéré une loi de finances 2024 plus équilibrée et plus en phase avec les principes que nous voulons porter», a-t-il déploré.
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Chakib Alj a toutefois salué l’adoption de plusieurs amendements proposés par la confédération patronale pour limiter l’impact de certaines mesures. «Grâce au travail de la commission Fiscalité et Douane et du groupe parlementaire, et jusqu’aux derniers instants, la CGEM a été en mesure de convaincre, à la deuxième Chambre, sur le risque que renferment certaines dispositions», s’est-il félicité.
Plusieurs amendements adoptés
Le patron des patrons évoque, à cet égard, le texte relatif à la solidarité des dirigeants qui «a été cadré et amendé de manière à cibler les fraudeurs et seulement après une décision de justice rendue en dernier ressort», et a annoncé des discussions avec la Direction générale des impôts (DGI) pour la mise en place d’une première action dans ce sens, dans le cadre de l’article 192 de cette administration.
Le président de la CGEM cite également l’exonération avec droit à déduction pour le secteur pharmaceutique, dans le contexte de la généralisation de la couverture médicale, la suppression de la retenue à la source pour les fournisseurs de biens (sauf pour les biens d’équipements et les fournisseurs de travaux), la réinstauration de l’exonération de la TVA pour les biens d’investissement dans le secteur de l’éducation et de la formation, la baisse de la TVA à 10% pour le transport de marchandises et pour les intermédiaires d’assurance, «dont les revendications remontent à plusieurs années», ainsi que la baisse des droits de douane de 40 à 30% pour un certain nombre de produits.
Quatre priorités pour 2024
D’après Chakib Alj, la CGEM se concentrera sur quatre principaux chantiers en 2024, afin de préserver et améliorer la compétitivité des entreprises marocaines. Il s’agit d’abord d’une réelle réforme de la TVA dans le sens de la neutralité et la généralisation des droits à remboursement et à déduction, comme le stipulent les recommandations sur les principes fiscaux. Vient ensuite l’adoption de tarifs douaniers à l’avantage de l’industrie marocaine afin de favoriser le «made in Morocco», et l’intégration du secteur informel «qui constitue un véritable obstacle à la croissance économique et à l’amélioration des recettes fiscales».
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Enfin, le chantier de la fiscalité locale, précisément la réforme de la taxe professionnelle. «Nous avons tenu une réunion de travail avec la Direction générale des impôts, l’Administration des douanes et impôts indirects et la Direction générale des collectivités territoriales durant laquelle nous les avons incitées à travailler davantage vers un système fiscal qui permet à l’État de financer les chantiers structurels, promeut la confiance, stimule l’investissement et la création d’emplois», affirme le président de la CGEM.
Selon ce dernier, le Maroc, qui a érigé l’investissement privé comme fer de lance de sa croissance économique, avec un objectif de deux tiers d’investissements privés et la création de 500.000 emplois d’ici 2030, ne pourra relever ces défis «qu’en continuant à donner de la confiance, de la visibilité et de la stabilité fiscale» aux entreprises marocaines.