Lors de la présentation de son rapport annuel pour la période 2022-2023, le 23 décembre dernier à Casablanca, l’Observatoire marocain de la très petite, petite et moyenne entreprise (OMTPME) avait révélé que 10.905 entreprises avaient fermé leurs portes en 2023, un chiffre record, en hausse de 12% par rapport à 2022. Près de 40% de ces sociétés avaient moins de cinq ans, 42,3% ont entre cinq et dix ans, tandis que celles ayant plus de vingt ans représentent 3,3%.
Interpellé par Le360 sur ces chiffres alarmants, Abdellah El Fergui, président de la Confédération marocaine de TPE-PME (CMTPME), réfute ces statistiques et indique que la situation est bien plus grave. «Les statistiques publiées par l’Observatoire sont erronées, parce qu’elles recensent uniquement les entreprises personnes morales et ne prennent pas en compte les TPE à personnes physiques, qui représentent pourtant plus de 66% du total des entreprises. Nous avions déjà dénombré la faillite de 33.000 entreprises personnes physiques et personnes morales en 2023», estime-t-il.
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D’après notre interlocuteur, la plupart de ces entreprises ont mis la clé sous la porte depuis la crise du Covid-19, faute d’un réel accompagnement de l’État. «Elles n’arrivaient plus à payer les montants dus à la Direction générale des impôts (DGI) et à la CNSS», souligne-t-il, précisant que les pénalités de retard, qui ont dépassé le montant initial, ont entraîné un blocage de leurs comptes bancaires par ces deux institutions et précipité ainsi leur fermeture. «À titre d’exemple, une entreprise qui a accumulé des impayés d’un million de dirhams depuis le Covid-19 est obligée d’en verser 3 millions une fois les pénalités de retard additionnées», explique Abdellah El Fergui.
Plus de 40.000 dissolutions d’entreprises en 2024
Ce dernier regrette également que l’OMTPME considère comme TPE toute entreprise dont le chiffre d’affaires se situe entre 3 et 10 millions de dirhams. Or, cette définition diverge de celle adoptée le 17 mai 2013 lors du lancement de la stratégie relative à la TPE, qui fixe ce statut aux structures dont le chiffre d’affaires est inférieur à 3 millions de dirhams et qui emploient moins de 10 personnes. «Cette approche biaisée fait que le nombre de TPE est très faible dans le lot des entreprises qui réalisent un chiffre d’affaires inférieur à 3 millions de dirhams, rendant ainsi ces statistiques incorrectes», soutient-il.
Et à en croire le président de la CMTPME, les dissolutions d’entreprise devraient même augmenter en 2024. «Nous avons recensé plus de 20.000 entreprises physiques et morales en faillite durant le premier semestre 2024, notamment dans les secteurs des cafés et restaurants, de la location automobile et du BTP», affirme-t-il, disant s’attendre à «plus de 40.000 dissolutions» au terme de l’année écoulée.
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En vue de sortir de cette crise, Abdellah El Fergui a eu le 9 décembre dernier un entretien avec la ministre de l’Économie et des Finances, Nadia Fettah, au cours duquel il a notamment abordé la situation des TPME et esquissé des pistes de solution. «Nous lui avons proposé des paiements échelonnés sur une durée de 50 mois, afin de permettre à ces entreprises de verser les montants dus à la DGI et à la CNSS», confie-t-il.
«Si rien n’est fait pour aider les centaines de milliers des TPE-PME à payer leurs arriérés accumulés depuis la pandémie, le nombre de dissolutions pourrait dangereusement grimper», alerte-t-il, déplorant «le manque de soutien de la CGEM» dans la défense des intérêts des TPME, notamment au sein de la Chambre des conseillers.
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