Depuis le début des années 2000, le Maroc s’est engagé dans une politique d’investissement volontariste en rupture avec les tendances du passé. Ce sont plusieurs milliards de dirhams qui ont été investis depuis cette date. Ainsi, comme l’a souligné Ahmed Lahlimi, commissaire au Plan, lors de l’ouverture d’une rencontre portant sur le thème «Le rendement du capital physique au Maroc», «l’investissement constitue 30% de la demande intérieure au Maroc.
Il est au cœur des options stratégiques de son développement en raison de ses rapports avec la croissance et l’emploi, mais également, dans un contexte d’une faiblesse structurelle de l’épargne, dans ses rapports avec la problématique de l’endettement».
Cet effort de l’Etat en matière d’investissement a permis de faire passer le taux d’investissement de 24,8% du PIB en 1999 à 35,1% en 2010 et à 32% en 2014. Du coup, le stock de capital a connu une forte hausse de 6,2% par an entre 1990 et 2010 contre 4,6% dans les années 80-90, pesant ainsi plus de 3 fois le PIB durant cette période et 3,4 fois sur les 5 dernières années.
Toutefois, l’impact réel de ces investissements suscite des débats. Ainsi, selon Lahlimi, «malgré cet effort d’accumulation du capital durant la décennie 2000, la croissance économique, bien qu’en nette amélioration par rapport aux années 80-90 dominées par le Programme d’ajustement structurel (PAS), n’a pas connu le même rythme d’évolution que l’investissement». Ainsi, alors que les investissements ont enregistré une croissance moyenne de l’ordre de 6,2% sur la décennie 2000, le taux de croissance annuel moyen n’a évolué que de 4,4%.
Gains de productivitéToutefois, le rendement de ces investissements mesuré par la productivité de l’économie fait apparaitre des améliorations avec la hausse du PIB par actif de 3,4% par an entre 2000 et 2014, contre 1,7% entre les année 60-70 et 1% durant la période du PAS.
Derrière cette évolution il y a l’effet combiné du «renforcement du stock de capital disponible par actif» avec une intensité capitalistique qui s’est accrue de 5% par an depuis 2000 contre 2,1% au cours des années 80-90 et «la productivité globale des facteurs» qui a progressé de 1,7% contre 0,1% sur les mêmes périodes.
Bref, selon l’étude sur le rendement de l’investissement, le Maroc doit poursuivre son processus d’accumulation de son capital physique. A titre d’exemple, l’intensité capitalistique de la Turquie, de la Corée du Sud et de la Malaisie est de 2 fois, 6,3 fois et 3,5 fois supérieure à celle du Maroc.
Toutefois, explique Lahlimi, «le Maroc est appelé à revisiter l’allocation sectorielle des investissements afin de valoriser les larges marges de croissance et d’emploi disponibles dans des secteurs où les taux d’investissement sont en-deçà de leur contribution à la valeur ajoutée nationale».
Une croissane du PIB de 7 à 8% possible Ainsi, le taux d’investissement réalisé par le secteur des services est passé de 36,8% par an en moyenne entre 1998 et 2007 à 45,6% par an entre 1998 et 2014, au moment où celui du secteur de l’industrie est resté quasi-constant, à près de 29,3% par an durant les deux périodes, alors que celui du secteur de l’agriculture a fléchi de 13% par an à 7,3% par an respectivement.
C’est dire que des efforts doivent être accentués au niveau des investissements dans l’agriculture et l’industrie afin de contribuer à la transformation des structures économiques. En tenant compte également de l’amélioration du capital humain et de la gouvernance, le Maroc pourrait aspirer, à terme, à «des gains de croissance de plus de 3 points».
Partant, «la croissance économique potentielle du Maroc devrait se situer globalement entre 7 et 8% en moyenne annuelle». Un niveau de croissance jugé nécessaire pour réduire significativement le taux de chômage.