Marché de gros: 1,5 milliard de DH pour une plateforme intégrée à Casablanca

Le marché de gros des fruits et légumes de Casablanca.. DR

Le Conseil communal de Casablanca consacrera un budget de 1,5 milliard de DH au relogement des marchés de gros de la ville dans une nouvelle plateforme intégrée, dédiée à la commercialisation des produits agricoles. Voici les détails de ce projet phare du Plan d’action communal de la maire Nabila Rmili.

Le 04/03/2023 à 15h28

Resté longtemps en stand-by, le projet de relogement des marchés de gros de Casablanca sera enfin présenté au vote lors de la session extraordinaire du Conseil communal, qui se tiendra en ce mois de mars et où sera présenté le Plan d’action communal (PAC) 2023-2028. Les marchés concernés par le projet sont le marché de gros des fruits et légumes (Moulay Rachid), celui des poissons (Lahraouyine), celui de la vente d’œufs (La Gironde) et celui des volailles (Hay Mohammadi).

Comme annoncé précédemment par Le360, le Conseil communal, présidé par Nabila Rmili, prévoit de regrouper l’ensemble de ces marchés de gros dans une nouvelle plateforme intégrée dédiée à la commercialisation des produits agricoles. Cette plateforme sera localisée au niveau de Lakhiaita, près de la Commune de Had Essoualem, comme précisé dans le draft du PAC 2023-2028, consulté par Le360.

La concrétisation de ce mégaprojet nécessitera un investissement de 1,5 milliard de DH. Il sera porté à hauteur de 50% par le Conseil communal, le reste étant financé par des fonds du ministère de l’Intérieur, du conseil de la Région Casablanca Settat et de la commune de Had Essoualem. Quant à la réalisation du projet, elle sera confiée à la société de développement local (SDL) Casa Aménagement.

Une «petite ville» dédiée aux professionnels

Cette plateforme intégrée, qui sortira de terre en 2027, devrait générer des revenus annuels estimés à plus de 350 millions de DH, et ce dès la première année de son entrée en activité. Il permettrait également de créer plus que 1.000 nouveaux emplois, qui viendraient s’additionner aux actuels.

Dans le détail, le document décrit ce projet comme «une petite ville regroupant l’ensemble des activités de commercialisation des produits agricoles», prenant pour modèle les marchés de certaines grandes villes internationales.

Comme l’avait déjà déclaré à Le360, Moulay Ahmed Afilal, vice-président du Conseil communal, la vision de cette «petite ville» s’inspire du modèle français, et plus particulièrement du célèbre marché de Rungis, sis à 15 kilomètres de Paris.

«Nous voulons construire une petite ville et y rassembler tous les marchés de gros de la métropole. On pense aussi y construire des cafés et des restaurants, ainsi que tous les services indispensables pour les personnes qui y travaillent et pour les professionnels qui devront s’y rendre pour acheter leurs marchandises en gros», avait-il précisé.

Concentrer 60% du volume de distribution nationale des fruits et légumes

En plus de moderniser les infrastructures de commercialisation, d’installer de meilleures conditions d’hygiène et de sécurité et de décongestionner les artères de la métropole, la mise en place de cette plateforme intégrée ambitionne surtout de résoudre le problème structurel du secteur de la commercialisation des produits agricoles : l’informel.

Et pour cause : selon les chiffres annoncés dans le PAC, près de 65% des fruits et légumes consommés au Maroc sont commercialisés en dehors des marchés de gros formels, alors que 70% de la demande des Casablancais en viandes rouges est satisfaite par les circuits de distribution informels.

À travers ce projet, le Conseil communal ambitionne de changer cet état des choses. «Nous allons commencer à intégrer la commercialisation de ces produits dans les circuits formels», affirme Moulay Ahmed Afilal. Concernant les viandes rouges, l’élu local précise «qu’il existe nombre de souks qui fournissent la viande directement aux bouchers, sans passer par les abattoirs. Bien que ces derniers soient déjà soumis au contrôle sanitaire, notre objectif est de commencer à intégrer ces volumes dans le circuit formel». S’agissant des fruits et légumes, l’objectif fixé par le Conseil est même chiffré dans l’ébauche du PAC : concentrer 60% du volume national de la distribution de ces produits. «Près de la moitié du volume des fruits et légumes du Maroc passe déjà par le marché de gros de Casablanca. Nous souhaitons augmenter ce volume, et aller au-delà des 60%», annonce-t-il.

Enfin, M. Afilal mentionne l’intention du Conseil «d’accompagner et sensibiliser les différents acteurs qui travaillent actuellement dans l’informel». Reste à savoir quels moyens que le Conseil communal entend-il déployer pour atteindre un tel objectif…

Levée de boucliers chez les grossistes?

L’autre interrogation que posera le relogement des marchés de gros concerne une éventuelle fronde des grossistes casablancais. Ces derniers ont à maintes reprises manifesté leurs inquiétudes concernant l’impact d’un tel projet sur leurs activités, et principalement la perspective de leur éloignement de la ville et des zones stratégiques qu’ils occupent actuellement.

«Comment pourrions-nous, en tant que commerçants, rivaliser avec le secteur informel si nous sommes éloignés davantage des centres névralgiques de la ville ? Déjà, actuellement, un grand volume de produits est acheminé directement aux détaillants, sans passer par le marché de gros?», s’interrogeait Abderrazak Chabi, secrétaire général de l’Association du marché de gros des fruits et légumes de Casablanca (AMGFLC). «Nous déplacer à l’extérieur de la ville nuirait davantage à nos activités. Nous serons tout simplement enterrés là-bas!», avait-il tonné, en soulevant notamment les problèmes de transport que rencontreraient les travailleurs dans ces marchés.

Interrogé à ce sujet, Moulay Ahmed Afilal se veut plutôt rassurant. «Avant de commencer la réalisation de ce projet, nous allons évidemment consulter les professionnels. Des réunions sont déjà prévues dans notre agenda», promet-il, insistant sur l’approche participative adoptée par le Conseil.

«Nous allons tenir compte des inquiétudes et des propositions de ces professionnels. C’est d’ailleurs pourquoi nous avons choisi Lakhiaita, et une zone proche de l’axe autoroutier, pour abriter ce projet», ajoute le vice-président du Conseil communal qui assure également que «tous les aspects logistiques sont intégrés dans le projet. Nous veillerons à ce que des transports publics soient disponibles aussi bien pour les professionnels que pour les Casablancais souhaitant se rendre à ce marché».



Par Lina Ibriz
Le 04/03/2023 à 15h28