Au début de l’année 2024, le Maroc a enregistré une hausse de 14% de son trafic touristique, avec plus de 2,1 millions de voyageurs visitant le pays durant les deux premiers mois. Cependant, cette reprise en volume n’a pas été synonyme d’une augmentation proportionnelle des recettes. Bien que le nombre de touristes ait grimpé, les recettes voyages ont connu une baisse, passant de 15,9 milliards de dirhams (MMDH) durant la même période en 2023 à 14,8 MMDH en 2024, soit une diminution de 6,7%, selon les derniers chiffres communiqués par l’Observatoire du tourisme.
D’après Zoubir Bouhout, consultant en tourisme, cette diminution de recettes peut être attribuée à plusieurs facteurs économiques clés. Premièrement, le niveau d’inflation a baissé en 2024 par rapport à 2023 au Maroc. Résultat: les coûts opérationnels ont été réduits. «Une baisse de l’inflation signifie généralement que le coût des matières premières et des services utilisés dans l’industrie du tourisme diminue. Cela permet aux prestataires de services touristiques de réduire leurs coûts opérationnels. Lorsque ces coûts sont réduits, les entreprises peuvent se permettre de réduire les prix de leurs services sans compromettre leurs marges bénéficiaires», explique-t-il.
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Un niveau d’inflation en baisse est synonyme également d’une pression concurrentielle accrue. Pour rester compétitives, les entreprises touristiques peuvent baisser leurs prix pour attirer plus de clients. Ceci est particulièrement palpable dans les destinations où la concurrence est forte, et où une petite réduction de prix peut signifier une grande différence en termes de taux d’occupation ou de réservations, note notre interlocuteur.
Évolution des recettes voyages (Source: Observatoire du tourisme)
Mois | Recettes générées | Évolution sur une année |
---|---|---|
Février 2024 | 7,1 MMDH | -2,7% |
Janvier 2024 | 7,7 MMDH | -11% |
Décembre 2023 | 7,1 MMDH | -25% |
Novembre 2023 | 8,8 MMDH | -19% |
Octobre 2023 | 8,2 MMDH | -10% |
Septembre 2023 | 8,5 MMDH | -18% |
Août 2023 | 14,1 MMDH | -11% |
Juillet 2023 | 9,4 MMDH | -2,7% |
Juin 2023 | 7,2 MMDH | +2% |
Zoubir Bouhout signale, par ailleurs, que cette baisse de recettes est due également aux crises que traversent les principaux marchés émetteurs touristiques. «Lorsque les pays émetteurs de touristes traversent des périodes de crise économique, comme c’est le cas avec des problèmes d’inflation élevée ou des difficultés relatives aux systèmes de retraite (par exemple, en France), cela influence directement les comportements de dépense des touristes de plusieurs manières», détaille-t-il.
Un budget plus serré
«Dans les principaux marchés émetteurs, l’inflation érode le pouvoir d’achat des ménages, ce qui signifie que même si les individus conservent leurs emplois et leurs salaires nominaux, la valeur réelle de ce qu’ils gagnent diminue. Cela les rend moins capables de dépenser librement lorsqu’ils voyagent. Ils peuvent encore décider de partir en vacances, mais avec un budget plus serré, en réduisant leurs dépenses sur les hébergements, les repas au restaurant, les activités touristiques, ou le shopping», ajoute ce consultant.
De plus, les problèmes liés aux pensions et à la retraite peuvent générer une incertitude financière pour l’avenir, incitant ainsi les personnes, en particulier celles proches de la retraite, à économiser davantage. «Ce comportement de précaution se traduit souvent par une réduction des dépenses lors des voyages, car les vacances sont considérées comme une dépense discrétionnaire, contrairement aux dépenses essentielles comme le logement ou la santé», signale Zoubir Bouhout.
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Et face à ces contraintes budgétaires, les touristes deviennent plus conscients des coûts et cherchent des options de voyage qui offrent une meilleure valeur. Cela peut signifier choisir des destinations moins chères, des hébergements économiques, des forfaits tout compris ou des offres spéciales. Ils peuvent également réduire la durée de leurs séjours ou opter pour des activités moins coûteuses.
De plus, les fluctuations des taux de change ont également eu un impact, bien que moindre, sur les recettes. «Lorsqu’une devise se déprécie par rapport à celle des touristes étrangers, cela rend théoriquement une destination moins chère pour ces visiteurs, puisqu’ils obtiennent plus pour leur argent. Cependant, cela ne se traduit pas toujours par une augmentation proportionnelle des dépenses. Les touristes peuvent choisir de réduire leurs dépenses malgré l’avantage du taux de change, soit parce qu’ils sont toujours influencés par les conditions économiques de leur propre pays, soit parce qu’ils utilisent l’avantage du taux de change pour réduire le coût global de leur voyage plutôt que pour dépenser plus», fait observer Zoubir Bouhout.
Notre interlocuteur suggère que pour maximiser les recettes, il est crucial d’enrichir l’expérience client. Cela inclut l’amélioration des circuits touristiques, l’intégration de plus d’animations et la promotion du tourisme d’affaires, qui peut générer des revenus plus élevés par visiteur.