Écarté de l’antenne depuis le 11 janvier, Rachid M’Barki, le présentateur du «Journal de la nuit», à l’antenne de minuit à 4h30 du matin, était depuis cette date au centre d’un audit lancé en interne en raison de soupçons d’ingérence dans son travail. Après plusieurs semaines d’enquête au sein de la chaîne d’information française, l’annonce de son licenciement a été faite par Marc-Olivier Fogiel, le directeur général de BFM TV.
Les investigations menées au sein de la chaîne, qui ont été élargies également à des sujets traités à l’antenne au sujet d’oligarques russes ou encore du Qatar et du Soudan, «ont permis d’identifier plusieurs séquences, entre 2021 et 2022, qui ont été diffusées sans respect des process de validation et de la ligne éditoriale», est-il ainsi expliqué par Marc-Olivier Fogiel dans un courriel interne publié par l’AFP.
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Le directeur général de la chaîne d’information poursuit dans ce mail que «ces manquements sont de la seule responsabilité d’un journaliste qui n’a pas respecté les règles en vigueur au sein de la rédaction», indiquant que «la direction a décidé de mettre fin à son contrat de travail le 21 février 2023».
«Une plainte contre X relative aux faits dont BFM TV a été victime a été déposée le 22 février 2023», ajoute-t-il, pour corruption passive et abus de confiance.
Le Maroc dans le viseur
Au cœur de ces soupçons, des brèves diffusées sur l’antenne ayant trait notamment au Sahara marocain. En effet, le journaliste avait, dans un journal télévisé datant de l’été dernier, évoqué le «Sahara marocain» et non le «Sahara occidental», formule d’usage dans les médias français, en évoquant le réchauffement des rapports diplomatiques entre le Maroc et l’Espagne.
D’après le site Politico qui avait ébruité l’affaire, c’est bien cette brève, datant pourtant de plusieurs mois en amont, qui avait mis le feu aux poudres au sein de la chaîne au moment même où le Maroc faisait l’objet d’accusations d’ingérence au Parlement européen dans l’affaire dite du «Marocgate». Un hasard de calendrier pour le moins étrange. Interrogé début février par le site Politico, qui avait dévoilé sa mise en cause, Rachid M’Barki avait expliqué avoir «utilisé des infos qui [lui] venaient d’informateurs» et qui n’avaient «pas forcément suivi le cursus habituel de la rédaction». Toutefois, poursuivait-il, «elles étaient toutes réelles et vérifiées».
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Qualifiant de «fantasme» les accusations d’ingérences dont il avait aussitôt fait l’objet, celui-ci dans ce même échange disait ne rien écarter. «Peut-être que je me suis fait avoir, je n’avais pas l’impression que c’était le cas ou que je participais à une opération de je-ne-sais-quoi sinon je ne l’aurais pas fait».
Après la médiatisation de l’audit interne de BFM TV, la presse française s’est empressée de remettre en question l’attachement au Maroc et à son souverain de M’Barki, en se servant d’une interview accordée par le journaliste à Le360 à l’occasion de l’anniversaire de la Fête du trône. Une manière d’interroger son intégrité en raison de son attachement à son deuxième pays.
Le collectif Forbidden Stories à l’origine de l’affaire M’Barki
La direction de la chaîne d’information a également décidé, en réaction, de «renforcer encore» ses dispositifs de validation rédactionnels, lit-on dans le courriel. Et pour cause, selon Le Parisien, la direction de BFM TV aurait été alertée en janvier par la cellule d’investigation du collectif de journalistes Forbidden Stories (auquel on doit la pseudo affaire Pegasus) composée de France Info et du Monde, de l’implication de son journaliste dans une entreprise de désinformation menée par une officine israélienne.
Selon cette enquête, ladite officine, sans existence légale et surnommée «Team Jorge», serait composée d’anciens membres des services de sécurité israéliens et vendrait ses services dans le monde entier. Dans le cas de Rachid M’Barki sur BFM TV, les brèves diffusées lors de ses journaux télévisés ayant trait aux oligarques russes, au Qatar, au Soudan, au Cameroun ou encore au Sahara auraient été «fournies clés en main pour le compte de clients étrangers», selon le consortium d’investigation.