Tel un marabout d'Afrique qui se brûle les ailes, Smail Chergui est tombé de très haut. Le scavenger (charognard), surnom dont l'affabulaient ses anciens confrères diplomates de l'Union africaine, vient d'être définitivement évacué du département des Affaires étrangères algérien. Le vautour qui comptait sur ses 40 ans d'ancienneté pour rester dans la douillette voilière diplomatique a dû déchanter… Au final, c'est à peine si on lui a débrouillé un poste de fonctionnaire vacataire à l'Assemblée populaire nationale.
Le président du Parlement a reçu, dimanche 16 janvier 2022, l'ancien diplomate vedette pour le nommer «conseiller en charge de la direction des relations extérieures et de la coopération internationale de l'Assemblée nationale». Rien de pompeux pour un ex-commissaire de l'Union africaine qui s'est éternisé à la tête du très influent département Paix et sécurité de l'organisation continentale.
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Le nouveau poste de cette ancienne huile de la diplomatie algérienne est tellement banal que sa nomination est passé presque inaperçue. C'est sur des sites d'information de seconde zone que l'on peut voir la mine décomposée d'un Chergui, déçu face à son nouveau patron (Ibrahim Boughali), dans le cliché illustrant cette désignation à un poste subsidiaire. L'agence officielle algérienne, APS, n'a même pas jugé utile d'évoquer la nouvelle: sans doute pour épargner la dignité de Chergui qui a tant alimenté le fil de l'APS en fake news et en de fictives victoires contre le Maroc. Et à haut débit, bien évidemment quand il s'agissait de son sujet de prédilection: le Sahara marocain.
Fin des privilègesMais ce n'est pas tant son accès illimité à la box d'intox de l'APS que Chergui va regretter le plus avec son nouveau statut de conseiller diplomatique pour un président de députés fantomatiques. Lui qui se permettait de basses manœuvres et des manigances en présence de haut-diplomates du continent et parfois même de chefs d'Etat, dans les arcanes de l'UA à Addis Abeba, devrait désormais se contenter du rôle de figurant dans les couloirs de l'ancien Hôtel de ville d'Alger.
Et surtout, le scavenger devrait s'acclimater au régime algérois, digne des années de disette. Oubliée la villa cossue, payée 150.000 euros à Addis Abebba (dont il a eu du mal à s'arracher, des mois après avoir été évacué au karsher du luxueux bâtiment du département Paix et sécurité)… Au mieux, il aura désormais droit à un logement de fonction, désaffecté depuis l'ère bolchévique.
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Chergui risquerait même de faire désormais la queue pour sa baguette, sa bouteille d'huile ou sa brique de lait. Son salaire, indemnités comprises, ne risque pas de dépasser celui de son nouveau boss, l'actuel président de l'assemblée payé dans les 4.000 euros. Révolu le temps où Smail Chergui pouvait se permettre de cumuler entre ses émoluments d'ancien ambassadeur à Moscou et de représentant à l'UA. Sans parler du fait que son poste lui permettait de gérer presque les 2/3 du budget de l'organisation panafricaine dévolu au maintien de la paix, en plus d'avoir la haute main sur les caisses noires de la diplomatie algérienne, dédiées à promouvoir la cause des séparatistes du Polisario.
Ancien homme de pouvoir, Chergui doit certainement se soucier désormais de son pouvoir d'achat. Pourtant, il s'est démené comme un diable pour essayer de rebondir et préparer sa réadmission dans un poste prestigieux. Jusqu'à ces derniers instants à l'UA, il a tout fait pour laisser croire à son efficacité quant à une implication de l'UA dans le dossier du Sahara. Ces actes de délinquance diplomatiques et ses gesticulations sordides avaient d'ailleurs fini par écœurer même ses propres alliés. Chergui a même cherché à se rapprocher autant que possible des galonnés algériens pour bénéficier de leur générosité. Mais ces derniers ont fini par le récompenser à la hauteur de son mérite: le zèle n'a jamais été synonyme d'efficacité.