«On ne peut pas dormir. Sans clim’, c’est intenable»: Alexandre Tudor, un jeune vivant à Bucarest, n’en peut plus après que la Roumanie est passée en niveau d’alerte le 7 juillet. À l’image de la capitale roumaine, c’est toute l’Europe de l’Est qui suffoque, subissant déjà sa troisième vague de chaleur de l’année.
«C’est tout à fait conforme à ce que les scientifiques avaient prédit et, maintenant, on est en plein dedans», constate auprès de l’AFP Ilan Kelman, de l’University College de Londres. «Cela fait partie intégrante du changement climatique causé par l’homme et cela ne fera qu’empirer à l’avenir si nous n’agissons pas», ajoute le professeur.
En Hongrie, le deuxième aéroport national, à Debrecen, a dû être provisoirement fermé jeudi: le revêtement de ses pistes n’a pas résisté au «stress thermique». La compagnie ferroviaire MAV a dû demander à ses passagers de privilégier les cars climatisés à ses wagons vétustes, suscitant la risée sur les réseaux sociaux.
Dans la Roumanie voisine, les coupures de courant se multiplient dans les hôpitaux, névralgiques en pleine canicule, à cause de pics exceptionnels liés à la climatisation. Un homme de 45 ans a même succombé à la chaleur dans la ville de Botosani, selon le ministère de la Santé. Et des records de chaleurs nocturnes ont été battus à 10 endroits, le thermomètre restant au-dessus de 27°C. «Ces températures qui ne redescendent pas, c’est très inquiétant: si les organismes n’ont pas le temps de se rafraîchir la nuit, le nombre des morts devrait augmenter», avertit le professeur Kelman.
«Les habitants des villes européennes devront adapter non seulement leurs infrastructures mais aussi leurs comportements pour faire face à des vagues de chaleur plus intenses à l’avenir», souligne Hannah Cloke, climatologue à l’Université de Reading. «À l’avenir, il pourrait être presque impossible de sortir certains jours».
Les canicules sont rendues plus probables et plus aigües par le changement climatique, expliquent les experts du climat mandatés par l’ONU (Giec). L’Europe est le continent qui se réchauffe le plus, les températures y augmentent deux fois plus vite que la moyenne mondiale, notent les climatologues.
En Grèce, cela fait plus de 10 jours que certaines régions dépassent les 40°C. La chaleur est si intense que l’Acropole, le site le plus visité de ce pays, a encore dû être fermée plusieurs heures le mercredi 17 juillet. Dans le centre historique d’Athènes jeudi, les touristes cherchaient les endroits ombragés, bouteille d’eau à la main. Sur l’autre rive de la mer Egée, la côte turque, très touristique, les températures dépassent les 40°C à son tour, tout comme en Anatolie, dans les terres.
Travail interdit
L’activité économique est aussi obligée de s’adapter. En Sicile, le travail dans l’agriculture ou le BTP est interdit depuis mercredi entre 12H30 et 16H00 les jours où le risque est «élevé» en extérieur. La mesure est valable jusqu’au 31 août.
Au total, 14 villes italiennes (Rome, Palerme, Florence, Trieste, etc.) ont été placées en «alerte rouge» en raison de la chaleur et de l’humidité, qui accentue nettement l’effet sur la santé des températures élevées, même si la majeure partie de l’Italie reste sous les 40 degrés.
Cette vague de chaleur, qui touche ce pays par intermittence depuis plusieurs semaines, a entraîné un retour des sauterelles dans des régions où elles étaient absentes, comme l’Emilie- Romagne, a déploré le syndicat agricole Coldiretti.
Au Portugal, le risque de feu de forêt est considéré comme « particulièrement élevé » dans le sud et dans les terres jusqu’à dimanche. En Espagne, la canicule ne fait que commencer après un début d’été plutôt frais. Un pic de chaleur est attendu pour ces prochains jours, avec 44°C dans le sud. Le tout aggravé par le phénomène de «calima» -des vents chargés de sable du Sahara- qui, «combiné aux températures élevées», «peut affecter la santé», prévient l’observatoire météorologique national Aemet.