Au lendemain d’un scrutin indécis, c’est le PVV (Parti de la Liberté) qui est sorti vainqueur des élections législatives néerlandaises, tenues le mercredi 22 novembre. En attendant les résultats définitifs, les sondages à la sortie des urnes donnent au parti d’extrême droite 35 sièges sur les 150 que compte le Parlement, une avance considérée comme très confortable dans une chambre basse particulièrement morcelée. L’alliance gauche-écologistes de Frans Timmermans arriverait deuxième avec 25 sièges, tandis que le VVD de centre-droit a remporté 24 sièges.
Le message anti-immigration et islamophobe de Geert Wilders, appelant à la fermeture des frontières et l’expulsion des immigrés illégaux, semble avoir trouvé un écho auprès des électeurs néerlandais, mais l’homme politique à la chevelure peroxydée est loin d’être assuré de devenir Premier ministre. Le PVV «ne peut plus être ignoré», a-t-il martelé, appelant les autres partis à travailler ensemble pour former une coalition.
Avant les élections, les dirigeants des trois autres grands partis avaient assuré qu’ils ne participeraient pas à un gouvernement dirigé par le PVV. Mais à la sortie des urnes, le populaire Pieter Omtzigt, qui adopte également une ligne dure sur l’immigration, s’est dit «disponible» pour diriger les Pays-Bas tout en concédant que le processus ne serait «pas facile». Son parti Nouveau Contrat Social (NSC), créé l’été dernier, aurait remporté 20 sièges. M. Timmermans a lui d’emblée rejeté l’idée de rejoindre une coalition de M. Wilders. «Le moment est venu pour nous de défendre la démocratie», a-t-il déclaré.
Si elle est confirmée par les résultats définitifs, la victoire de Geert Wilders marque un brusque virage à droite qui sera accueilli avec appréhension à Bruxelles, puisqu’il a promis notamment un référendum sur le maintien ou non des Pays-Bas dans l’Union européenne.
Il le sera avec encore plus d’inquiétude par la communauté marocaine aux Pays-Bas, qui compte près de 420.000 personnes, représentant le troisième plus grand groupe d’immigrants dans ce pays. Et pour cause, le PVV a fait des Marocains une cible privilégiée de son discours populiste, ouvertement xénophobe et islamophobe.
La haine des Marocains comme fonds politique
En septembre 2020, son chef a été condamné pour «insulte collective» à l’égard des Marocains, par une cour d’appel qui n’a cependant pas prononcé de peine, et qui avait abandonné une autre inculpation pour «incitation à la haine». Les faits remontent à 2014, lors d’un meeting à La Haye, où Geert Wilders avait demandé à ses partisans s’ils voulaient «moins ou plus de Marocains». Ceux-ci avaient scandé : «Moins! Moins!». Et Geert Wilders de conclure sa harangue par «Nous allons nous en charger!».
Pour le dirigeant d’extrême droite, qui a déjà reçu les félicitations de Marine Le Pen, cheffe de file du Rassemblement national français, de telles saillies relèvent moins de l’exception ou du dérapage que d’une véritable ligne de conduite, tant son parti a fait de la haine anti-Marocains un fonds politique.
Ainsi, en 2017, alors qu’il venait d’être condamné en première instance pour «insulte collective» et «incitation à la haine», Geert Wilder s’était lancé dans une diatribe encore plus violente contre la communauté marocaine lors d’un rassemblement de son parti à Spijkenisse, une localité diversifiée en termes d’ethnie près de Rotterdam. «Il y a beaucoup de racailles marocaines en Hollande qui rendent les rues dangereuses», avait-il déclaré devant ses partisans. «Si vous voulez regagner votre pays, rendre les Pays-Bas aux Hollandais, alors vous ne pouvez que voter pour notre parti».
Avec la victoire électorale de celui qui est parfois qualifié de «Trump néerlandais», «une période très difficile commence pour les musulmans», a déclaré à l’agence de presse néerlandaise ANP Muhsin Köktas, de l’organisme de contact pour les musulmans et le gouvernement (CMO). Et pour les ressortissants marocains en particulier…