Les marches hebdomadaires des militants du Hirak ont repris leur cours normal ce 26 février 2021, et ce après un arrêt forcé d’une année à cause de la pandémie du Covid-19. La dernière sortie du Hirak remontait donc au 13 mars 2020.
Bien que l'interdiction des rassemblements publics pour des raisons sanitaires reste toujours en vigueur, et malgré les informations faisant état de la découverte du variant britannique du Covid-19 en Algérie, la place de la Grande Poste à Alger, lieu emblématique des rassemblements des hirakistes, a été prise d’assaut, ce vendredi 26 février 2021, par des centaines de milliers de manifestants, non sans avoir "abattu" tous les barrages de police qui tentaient de les empêcher de converger vers le centre de la capitale. Dans toutes les autres grandes villes, le même scénario a été observé.
"Un Etat civil et pas militaire", tel est le slogan-phare le plus scandé par le peuple algérien. D’autres slogans visant directement les généraux et leurs "services" ont été aussi entendus, comme "Y en a marre, y en a marre, y en a marre des généraux", "Services de renseignements terroristes, à bas l’Etat militaire", "Tebboune est illégitime", "Tebboune et les généraux à la poubelle", "Indépendance, indépendance, le peuple s’est libéré et veut son indépendance"…
Lors de ce 106e vendredi depuis le déclenchement du Hirak en février 2019, la majorité des slogans a ciblé l’armée des généraux qui maintiennent l’Algérie sous leurs bottes depuis l’indépendance, et qui sont aujourd’hui appelés à répondre aux revendications du peuple.
D’ailleurs, le slogan de "Nous ne reviendrons jamais en arrières" scandé lors de cette "journée historique du vendredi 26 février 2021", comme la qualifient plusieurs journalistes algériens indépendants, sonne comme un avertissement aux généraux. Le régime algérien est plus que jamais aux abois: illégitime, corrompu, incompétent car incapable de sortir le pays du marasme socio-économique dans lequel il se trouve et de faire face à la crise sanitaire, il doit désormais répondre au peuple qui l’appelle à dégager.
Comme à son habitude, le régime algérien a choisi la fuite en avant. Il n’a su jusqu’ici faire la sourde oreille et jouer de l’intimidation face aux manifestants pacifiques. Ainsi les forces de l’ordre, massivement présentes ce vendredi, ont utilisé matraques et gaz lacrymogène, et procédé à de multiples arrestations de militants, dans de vaines tentatives d’empêcher les rassemblements.
A Bouira, les manifestants se sont rassemblés devant le siège local de la police et ont exigé la libération des personnes arrêtées plus tôt, en scandant "Libérez nos enfants, bande d’oppresseurs".
Avec cette déferlante populaire et la radicalisation des manifestants contre l’armée, les généraux font face à la crise la plus grave depuis l’établissement, en Algérie, d’un régime militaire en 1965. Des voix à la botte des généraux commencent déjà à préparer le terrain pour écarter Abdelmadjid Tebboune, dans l’espoir d’apaiser le Hirak. Cependant, les manifestations de ce vendredi ont massivement axé les slogans contre les militaires. Si le nom de Tebboune "l’illégitime" a été scandé, c’est justement pour rappeler qu’il a été "placé par les militaires".
Il ne fait pas de doute que faire tomber Tebboune ne répondra pas aux revendications du peuple algérien.
Comment les généraux algériens vont répondre au peuple qui les interpelle? Les arrestations musclées de ce vendredi, ainsi que les coupures volontaires du réseau Internet, ne portent pas à penser que les généraux sont prêts à céder le pouvoir aux civils. Ils sont toutefois dépassés par la mobilisation massive et impuissants à détourner vers une autre cible les revendications du peuple. Toutes les tentatives à diaboliser un ennemi extérieur n’ont eu d'écho que dans les médias à la solde du régime.Les prochaines semaines sont cruciales pour l’avenir de l’Algérie.