Attendue le 27 octobre 2022, la nouvelle résolution du Conseil de sécurité sur le Sahara occidental risque fort de mettre de nouveau le régime algérien au pied du mur. La première mouture de ce document, dont Le360 détient copie, est on ne peut plus claire: la solution au conflit passera par des négociations, incluant «toutes les parties prenantes», nommément «le Maroc, le Polisario, la Mauritanie et l’Algérie», en vue d’une solution «juste, durable et mutuellement acceptable, basée sur le compromis». Le pays voisin est à ce titre cité pas moins de quatre fois dans le projet de résolution onusienne.
Les tables rondes indispensables, la participation de l’Algérie, un impératifLe projet de résolution, dont le porte-plume sont les Etats-Unis, insiste sur «l'élan créé» par le processus des tables rondes réunissant les différentes parties au conflit et appelle à leur nécessaire reprise, rappelant que la première table ronde a eu lieu les 5 et 6 décembre 2018 et que la deuxième s’est tenue les 21 et 22 mars 2019. Depuis, plus rien et pour cause: le refus de l’Algérie d’y prendre part, sous prétexte que les négociations doivent être directes, et qu’elle n’est, en théorie, qu’un «voisin inquiet».
Dans les faits, rien n’est moins faux, et le projet de résolution du Conseil de sécurité le rappelle, en mentionnant le format des tables rondes, comme outil indispensable à la relance des négociations. A ce sujet, le texte soutient «la poursuite des consultations entre l'envoyé personnel et le Maroc, le Front Polisario, l'Algérie et la Mauritanie», et encourage les quatre parties à s’engager avec l'envoyé personnel «pendant toute la durée de ce processus, dans un esprit de réalisme et compromis».
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L’Algérie entendra-t-elle enfin la voix de la raison en changeant son fusil d’épaule, et de logiciel, et en se soumettant à l’appel du Conseil de sécurité pour s’asseoir autour de la table avec le Maroc et faire le pari de l’avenir? Ou alors persistera-t-elle dans sa logique de confrontation en décidant, comme c’était le cas l’année dernière, de rejeter la résolution, accentuant ainsi son isolement sur la scène internationale et rendant inaudibles et incohérentes les déclarations dans lesquelles elle se réfère à l’ONU?
Le Maghreb comme porte de sortie de criseLe projet de résolution appelle, et c’est là une grande nouveauté par rapport aux précédentes résolutions, au renforcement de la coopération entre les Etats membres de l’Union du Maghreb. Cet effort, «contribuerait à la stabilité et à la sécurité» de la région, ainsi qu’à la création d’opportunités de croissance et d’emplois, au Maghreb, mais aussi au Sahel. L’allusion est à peine voilée et elle cible directement la décision prise par l’Algérie, de façon unilatérale, de rompre les relations diplomatiques avec le Maroc, ainsi que le travail de sape qu’elle mène quant à l’édification d’une telle union, en faisant la promotion d’une entité fantoche qui n’y figure pas.
Des «efforts sérieux et crédibles du Maroc»Sur le terrain, le projet de résolution «prend acte de la proposition marocaine (d’autonomie sous souveraineté marocaine du Sahara, Ndlr) présentée le 11 avril 2007 au Secrétaire général et des efforts sérieux et crédibles du Maroc pour faire avancer le processus vers une résolution».
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Le document relève aussi positivement les démarches et initiatives prises par le Royaume sur le registre des droits de l’homme au Sahara, saluant le rôle joué par les commissions du Conseil national des droits de l'homme (CNDH) opérant à Dakhla et Laâyoune, et l'interaction du pays avec les procédures spéciales des Conseil des droits de l’homme des Nations Unies.
Le Polisario épinglé pour violation du cessez-le-feu…En face, le draft de la résolution exprime sa préoccupation concernant les violations des accords (de cessez-le-feu) par le Polisario. Il épingle la responsabilité des séparatistes dans ces violations, «prenant note des engagements pris par le Front Polisario à l’encontre de l'ancien envoyé personnel» et soulignant l'importance «d'un respect total et renouvelé» desdits engagements.
… et d’obstruction des missions de la MinursoSur le même registre des obstructions orchestrées par le front séparatiste, la première mouture de la résolution onusienne insiste sur la nécessité pour la force de paix onusienne, la Minurso, de pouvoir patrouiller en sécurité et sans entraves.
Pour rappel, dans son dernier rapport sur le Sahara, Antonio Guterres a dénoncé le fait que la milice, aux ordres d’Alger, empêche le personnel de la Minurso de circuler à l’est du mur de défense. Le secrétaire général de l’ONU a sommé «vivement le Front Polisario de lever toutes les restrictions à la libre circulation des observateurs militaires, des convois terrestres, des moyens aériens et du personnel de la Minurso à l'est mur».
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Et il a prononcé cette mise en garde, lourde de sens et inhabituelle, dans le langage onusien: «Je crains que, sans liberté totale de mouvement, la Minurso ne soit bientôt incapable de maintenir sa présence à l'est du mur.» En d’autres termes, le Polisario met en péril à la fois la présence et la mission de la Minurso. Le projet de résolution du Conseil de sécurité ne fait que conforter cet état de fait.
Recensement des populations dans les camps de TindoufLe projet de résolution demande aussi un recensement des populations séquestrées dans les camps de Tindouf. Quand on sait que l’Algérie a toujours opposé une fin de non-recevoir aux différents appels à recenser les populations des camps de Tindouf, on ne peut que suivre avec intérêt la suite qu’elle donnera à l’injonction de l’organe exécutif l’ONU.
Le mandat de la Minurso prorogé d’un anExprimant le plein appui du Conseil de sécurité au Secrétaire général de l’ONU et à son envoyé personnel pour faciliter le processus de négociations, le projet de résolution stipule une prorogation du mandat de la Minurso jusqu'au 31 octobre 2023. Le projet de texte déplore les difficultés persistantes auxquelles sont confrontés les Sahraouis de Tindouf, leur dépendance à l'égard de l'aide humanitaire extérieure et les risques associés à la réduction de l'aide alimentaire, objet par ailleurs de détournement de la part des dirigeants du Front et des généraux algériens. Pour ces raisons et bien d’autres, indique le projet de texte, «le statu quo n’est pas acceptable».
Tous les regards sont désormais tournés vers le régime algérien pour voir s’il va rééditer l’exploit de l’année dernière en distribuant une note aux quinze membres du Conseil du sécurité, dans l’espoir vain de se soustraire aux négociations.