Des enseignants phobiques de la mixité

Assia Akesbi Msefer

Assia Akesbi Msefer . DR

Assia Akesbi Msefer, psychologue, psychanalyste et fondatrice de l’Ecole supérieure de psychologie, analyse pour le360 le refus proclamé par certains de la mixité à l’école et ses impacts sur les enfants.

Le 26/09/2017 à 10h03

Le refus de la mixité par des enseignants a posé problème lors de la rentrée scolaire 2017. Qu’est que cela signifie pour vous ?Je me suis posée deux questions, quel profil d’enseignants refuse la mixité et quel est le type de conditionnement imposé aux jeunes générations? La deuxième question analyse les manifestations de rejet à l'égard du sexe opposé et les origines éducatives et socio-politiques les maintenant d'actualité? Les écoles ne manquent ni de violence ni de harcèlement sexuel, l'espace social non plus. Les pulsions animales en chacun se manifestent d'autant plus que les possibilités de les sublimer par des activités créatives sont quasi inexistantes dans une école de plus en plus compétitive. Alors comment des éducateurs phobiques du genre peuvent-ils aider les enfants à être autrement? Le fait de monter la garde et d'exercer un contrôle des jouissances sexuelles et agressives alimente des angoisses et favorise les passages à l'acte au quotidien.

L’interdiction de la mixité est prônée au nom de l’ordre moral. Quelle valeur doit-on accorder à ce postulat?La distinction sexuelle lors du développement d'un enfant est une étape structurante autant pour le garçon que pour la fille et commence à partir de trois ans. Elle ouvre la voie au sentiment de manquer de l’autre sexe et au désir du parent de l'autre sexe, connu sous le nom de complexe d’OEdipe. L'interdit de l'inceste, du meurtre et du vol est fondateur de l'ordre social. Ainsi l'intériorisation des limites, dite principe de réalité, aide un enfant à renoncer au sentiment de toute-puissance dans lequel il baignait jusque-là. La contenance pulsionnelle concerne des freins internes à chacun favorisant son respect des limites relatives au contexte social sans lesquelles, la vie collective n'est pas envisageable.

Peut-on alors parler d’une discrimination? Qui en est la principale victime?Les deux genres, hommes et femmes. Des discriminations éducatives, encore d'usage dans les milieux familial, scolaire et professionnel, jouent en défaveur des femmes et de ce fait desservent gravement les hommes: les garçons, moins soumis aux limites, omettent de travailler leurs sentiments de toute-puissance, de contenir et de sublimer leurs pulsions souvent considérées comme des facteurs de virilité. Une autre question m’inquiète: quels sont les risques de citoyens mus par leur impulsivité et d'une société phobique de sa mixité et en quoi associer les hommes à des fauves flatterait-il leur ego?

Par Youssef Bellarbi
Le 26/09/2017 à 10h03