Hendia

Tahar Ben Jelloun.

Tahar Ben Jelloun.

ChroniqueQu’est-ce qui s’est passé cette année pour que l’un des fruits les plus populaires du Maroc devienne si rare et atteigne un prix exorbitant?

Le 05/08/2024 à 11h00

De quelques dirhams la douzaine il y a encore quelques années, il faut désormais débourser 162 DH pour acheter un kilo de figues de Barbarie. Ce prix, jamais atteint, a privé la population modeste et pauvre de ce fruit plein de vitamines. Ces figues étaient, dans le temps, séchées et conservées pour constituer, l’hiver venu, un petit déjeuner pour les enfants avant d’aller à l’école.

Ce fruit ne vient pas d’Inde, comme son nom commun en arabe dialectal le suggère, mais des pays d’Amérique latine. Il est naturellement bio, sauvage, et pousse là où le soleil tape fort.

Les figues de Barbarie sont une excellente source de vitamines et de minéraux, notamment de vitamine E et de la vitamine K, de potassium, de magnésium, de fer et de calcium. Ces nutriments sont essentiels pour la santé osseuse, la coagulation sanguine et la fonction musculaire.

Enfants, nous avions tous abusé de ce fruit qui nous avait donné des crises de constipation inoubliables. Nous le considérions comme le fruit quasi gratuit, en tout cas à la portée de tout le monde.

Pas très sucrée, sa chair est semée de graines qui donnent une huile très recherchée par les usines des produits cosmétiques. Il est même conseillé pour les diabétiques, car il absorberait le sucre et ferait ralentir les poussées de glycémie.

En un mot, c’est un fruit exceptionnel, longtemps sous-estimé ou même méprisé parce que vendu pas cher. Alors, où est notre Hendia?

On a dit qu’un virus l’aurait attaquée et que la récolte aurait été faible. D’autres affirment que des commerçants malins en auraient exporté en grande quantité. Il est vrai qu’on la retrouve dans les supermarchés au rayon des fruits exotiques, à des prix stratosphériques.

Que faire pour qu’elle nous soit rendue?

Je vois mal une manifestation avec des pancartes «Donnez-nous notre Hendia quotidienne». Non, ce n’est pas sérieux par les temps qui courent, alors que des événements tragiques secouent quotidiennement le monde. Une enquête serait toutefois la bienvenue pour qu’on sache ce qui s’est passé.

À propos des fruits du Maroc, j’ai constaté que leur prix ne cesse d’augmenter, allant jusqu’à atteindre les prix «français». Ce qui est tout à fait anormal.

Les pommes marocaines sont vendues dans le supermarché du coin à 32 DH, soit près de 3 euros. La variété Golden coûte en France entre 2,50 et 3 euros. Et je ne parle pas des fruits importés, qui sont chers à cause du transport et des taxes et que, par principe, je n’achète jamais.

Cette politique de la vie chère, généralisée, est inquiétante. Je sais que le prix du transport a augmenté et que, de ce fait, les produits en subissent la hausse. Mais il existe dans notre beau pays une nouvelle mentalité par laquelle les gros producteurs ramassent la mise en rachetant les récoltes des petits et décident de pratiquer des prix très élevés, supposant que le Marocain moyen a de quoi les acheter. Quant aux Marocains modestes ou pauvres, ils voient ces producteurs à l’appétit sans limites les priver des fruits dont les prix ne cessent de monter.

Un dernier point qui est en train de casser le tourisme. Les restaurants et les grands hôtels pratiquent des prix «parisiens». J’entends souvent cette phrase assassine: «Le Maroc est devenu cher. L’Espagne, à côté, est meilleur marché!».

Si cette rumeur persiste et se généralise, le Maroc peut dire adieu aux millions de touristes qu’il attend et espère. L’Italie, comme l’Espagne, a suivi une politique du tourisme basée sur des prix bas. Le Maroc devrait s’en inspirer et réguler dans le sens correct la pratique des prix.

Il s’agit à mon humble avis d’éthique et de patriotisme. Pour que le plus beau pays du monde continue d’attirer des millions de touristes, il faudrait instaurer une politique rigoureuse et mettre de l’ordre dans cette pagaille où chacun pratique les prix qu’il veut.

Il y avait, il y a longtemps, un contrôle des prix. Le libéralisme sauvage l’a supprimé. Mais cette liberté profite aux gros commerçants et oublie le niveau bas du pouvoir d’achat du citoyen. Est-ce encore une liberté? Le risque est visible. Un sentiment de révolte gronde. Il faut l’entendre et apaiser les familles qui n’arrivent plus à joindre les deux bouts.

Je cite le journal Bayane Al Yaoum:

«L’inflation globale et l’augmentation du coût de la vie impactent directement les prix des services touristiques. Les tarifs des services touristiques, en particulier durant la saison estivale, s’avèrent donc excessivement élevés, comparés à des destinations similaires comme l’Espagne, le Portugal ou la Turquie. Cette situation pousse les Marocains à chercher des alternatives plus abordables à l’étranger.»

Ainsi, nombre de Marocains résidents à l’étranger ne sont pas rentrés au pays cette année et ont préféré d’autres destinations plus clémentes.

Par Tahar Ben Jelloun
Le 05/08/2024 à 11h00

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J’aie soixante dix ans et toute personne de cette génération se rappelle très bien de notre régime alimentaire. On a grandi sans pesticides, sans herbicides, sans bananes, sans avocats sans fraises etc, etc, et notre santé était largement meilleur que les enfants des récentes générations. On mangeait une banane un fois tous les ans, on ne savait pas que l’ananas, les avocats, les fraises et les myrtilles existaient. Aux USA, l’agriculture est une question de sécurité nationale. Chez nous, on délaisse nos figues, notre hendia, nos caroubiers qui se contentent du peu d’eau et qui regorgent de minéraux et de vitamines et on cultive des fruits et légumes pour nourrir les pays étrangers. Ceci dit, on était pas plus malheureux que ceux consomment des bananes ou des avocats.

Pas étonnant. Les riches exproprient les modestes plaisirs des pauvres pour les rendrent inanccibles, pas seulement à ces derniers mais à la classe moyenne. Le fiasco de la lutte de classes cède la place au combat de tajines. Le phénomène est connu ailleurs. Les spécialités, autrefois propriétés des pauvres, que le consommateur dans les pays riches adore sont notamment la paella, la bouillabaisse, la pizza et notre fameux couscous. Avant son aristocratisaion, ce dernier était composé, dans les villages, dotés de ressources d'eaux suffisantes, de blé ou de seigle avec son pyramide de légumes et de poichiches. Ailleurs, les pieds noirs lui ont octroyé le label royal. Notre plat national, vegane à l'origine se transforme, avec son merguez, une source d'inquiétudes pour les médecins.

J'ai souvent utilisé le personnage "Columbo" pour mes commentaire... Cette fois ci, c'est la série "Les envahisseurs" des années 80 du siècle dernier où le fruit en question était gratuit dans mon village natal (moyen Atlas) dont le générique est : David Vincent sait que les envahisseurs sont là (les spéculateurs, les tricheurs, ...)...- Ils ont pris une forme humaine ... le calvaire a déjà commencé...

Ce laisser aller crée par ce gouvernement nuit déjà à la santé du citoyen et à la stabilité économico-sociale du pays. Ce gouvernement manque de visions et de stratégies pour faire face à une mafia bien organisée qui est à l’origine de cette anarchie qui perdure depuis son arrivée au pouvoir. Il y a des moment où l’on se demande s’il n’y a pas des connivences entre cette mafia et ce gouvernement qui regarde ailleurs. Cette mafia qui terrorise le pays doit-être combattue de la même manière que les autres groupements terroristes qui cherchent de nuire à la stabilité du pays.

Ce laisser aller crée par ce gouvernement nuit déjà à la santé du citoyen et à la stabilité économico-sociale du pays. Ce gouvernement manque de visions et de stratégies pour faire face à une mafia bien organisée qui est à l’origine de cette anarchie qui perdure depuis leur arrivée au pouvoir. Il y a des moment où l’on se demande s’il y a pas des connivences entre cette mafia et ce gouvernement qui regarde ailleurs. Cette mafia qui terrorise le pays doit-être combattue de la même manière que les autres groupements terroristes qui cherchent à nuire à la stabilité du pays.

Je souhaite donner un exemple trivial pour illustrer cet article. Lorsque j'étais au maroc ..l'annee dernière j'affectionnais tout particulierement une boite de chocolat de marque locale à 85% de cacao. Elle coutait, il y a à peine 1 an 16dh. Aujourdhui, je nen croyais pas mes yeux de la voir a 30dh, c'est a dire une augmentation de 100%. Je precise qu en france ou en espagne, cela voute 1€30. Tous ces pays achètent le meme cacao dans les mêmes marchés. Chez nous, je suis stupéfait par le mépris que l'on a du client mais aussi de ces clients qui continuent à consommer malgré les augmentations indécentes et artificielles qui dépassent de loin les augmentations du prix du gasoil.

Elle est appelée hendia peut-etre en lien avec les indiens d Amerique et non pas les hindous d'Asie

Le musulman a reçu le plus beau cadeau qu'une âme et un coeur puissent recevoir : l'islam. S'il l'applique, il est gagnant en toutes circonstances. Les jeûnes du lundi et jeudi et les jours blancs. Manger sans excès, un tiers pour la nourriture, un pour la boisson, un pour le souffle. Etc. En plus d'actes d'adoration, des causes pour sa santé. « Que le cas du croyant est étonnant ! Tout ce qui le concerne est un bien, et cela n’appartient à personne d’autre qu’au croyant : Si un bonheur l'atteint, il se montre reconnaissant et c’est un bien pour lui. Et si un malheur l’atteint, il se montre patient, et c’est un bien pour lui. » Le contentement, qui est une richesse inépuisable, et la gratitude, sont des soulagements pour les cœurs. Il y a une grande sagesse derrière Wa... Allahou a3lam

Tous les sites et les journaux reprennent le même thème sans que le gouvernement réagisse sachant que cette flambée des prix est la conséquence des agissements d’un nombre limité de producteurs et de grossistes parfaitement identifiés. Pourquoi ??

Merci Mr Ben Jelloun d’avoir consacré ces quelques lignes à ce sujet car beaucoup de marocains sont inquiets. Comme vous le précisez il y a une anarchie grandissante au niveau des prix. Les locaux en souffrent et cela a un impact sur notre tourisme, on risque de s’en mordre les doigts. La vie devient trop chère au Maroc. En effet on constate que certaines prestations (hôtellerie restauration) pratiquent des prix exagérés et sans la qualité. En tant que MRE et aimant mon pays j’ai du choisir une autre destination pour mes vacances, malgré moi

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