La victoire des «tradwives»

Zineb Ibnouzahir.

Zineb Ibnouzahir.. Le360

ChroniqueTirées à quatre épingles, impeccablement maquillées, mères de famille hors pair, épouses dévouées, cuisinières de talent, elles se mettent en scène sur les réseaux sociaux en empruntant l’esthétique des publicités des fifties et revendiquent le retour de la femme à «sa place naturelle», c’est-à-dire derrière les fourneaux.

Le 10/11/2024 à 12h57

En suivant les élections américaines qui se sont soldées par la victoire de Donald Trump sur Kamala Harris, un constat s’impose, aux États-Unis aussi, le féminisme traverse des heures sombres.

Constater qu’en 2024, au sein de la première puissance mondiale, le droit à l’avortement est l’un des principaux points de discorde entre les deux candidats, représentatifs de deux Amériques, a de quoi inquiéter. Si la régression est en marche depuis le 24 juin 2022, jour où la Cour suprême des Etats-Unis a annulé l’arrêt fédéral Roe vs Wade qui garantissait depuis 1973 le droit d’avorter sur tout le territoire, laissant ainsi à chaque Etat la liberté de déterminer sa propre politique sur l’accès à l’interruption volontaire de grossesse, le résultat de ces élections scellent un peu plus le sort des femmes concernées.

Ainsi donc aux États-Unis, pas plus que dans nos sociétés orientales musulmanes, souvent pointées du doigt pour leurs lois liberticides à l’égard de la gente féminine, les femmes ne peuvent disposer de leur corps comme elles l’entendent. Elles peuvent s’habiller comme elles veulent, elles peuvent vivre leur sexualité, travailler, conduire, voter, divorcer, se pacser sans pour autant disposer véritablement de leur corps.

Les États-Unis ont toujours incarné un certain modèle pour beaucoup d’entre nous, un Eldorado qui nous faisait rêver, la patrie de tous les possibles, the «land of freedom» comme ils disent, mais aussi un pays où naissent de nombreuses grandes tendances… Cette régression en matière de droits des femmes prend donc des proportions gigantesques en ce qu’elle donne le ton d’un état d’esprit qui tend à se répandre, y compris chez les femmes, et porte un coup dur aux combats féministes à travers le monde.

Sur les réseaux sociaux américains, l’une des tendances phares prône ainsi le retour de l’esprit des années 50 avec le phénomène des «tradwives», les épouses traditionnelles. Tirées à quatre épingles, impeccablement maquillées, mères de famille hors pair, épouses dévouées, cuisinières de talent, elles se mettent en scène sur les réseaux sociaux en empruntant l’esthétique des publicités des fifties et revendiquent le retour de la femme à sa place naturelle, c’est-à-dire derrière les fourneaux. Les «tradwives» se revendiquent «féminines, mais pas féministes» car à leurs yeux, le féminisme est à l’origine de la charge mentale sous laquelle plient les femmes d’aujourd’hui. Pour elles, l’émancipation est à bannir, car une femme appartient à son conjoint. La déculottée de Kamala Harris, elles en sont en partie responsables, elles qui ont épousé la pensée politique des évangélistes et de l’ultra droite américaine en prenant pour slogan: «Make Traditional Housewives Great Again», c’est-à-dire «rendre leur grandeur aux femmes au foyer».

Pendant ce temps-là, de l’autre côté du globe, les Afghanes sont invisibilisées chaque jour un peu plus. Elles ne peuvent plus étudier au-delà du primaire, aller dans les parcs, les salles de sport, les salons de beauté… Elles ne peuvent plus ni chanter ni déclamer de la poésie. Pourquoi comparer ces deux extrêmes? Parce qu’il n’y a pas si longtemps, dans les années 1960, l’Afghanistan était un pays où les femmes disposaient de droits elles aussi. Elles étudiaient, votaient, travaillaient, portaient même la mini-jupe. Et que dire de l’Iran, ce pays dont la mythologie consacrait l’égalité entre hommes et femmes, où une jeune femme a bravé la foule en arpentant en sous-vêtements le parvis de son université, au péril de sa vie… Un geste de rébellion incroyable dans ce pays où les femmes sont les premières victimes du régime des mollahs.

À travers le prisme des médias occidentaux, on a souvent tendance à associer les manquements aux droits des femmes aux pays orientaux, aux sociétés musulmanes. Cette piqûre de rappel américaine s’avère utile en ce qu’elle rappelle au monde que l’extrémisme religieux n’a pas de couleur, ni de genre, ni d’identité particulière et que les droits des femmes seront toujours sujets à débat dans un monde où la politique demeure la propriété quasi exclusive des hommes. Et à en croire les millions d’Américains qui ont voté pour Trump parce que c’est un homme, et pour qui l’idée de nommer une femme à la Maison Blanche est impensable, les choses ne sont pas prêtes de changer.

Par Zineb Ibnouzahir
Le 10/11/2024 à 12h57

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Inna lillah wa inna ilahi Raji3oune. En islam nous appartenons à Dieu avant de s'appartenir à nous même. L'avortement n'est pas un progrès mais un crime abject contre un être humain innocent et un crime contre la création de Dieu.

Suite...mais les femmes sont très fortes et très courageuses, elles ne baissent pas les bras ....car le jour ou elles baisseront les bras, la terre s arrêtera de tourner, et l humanité disparaîtra...les hommes à priori n ont pas encore compris ce message...alors les femmes, les filles bon courage, vous devez rappelez aux hommes chaque jour leur part d humanité pour eteindre l inhumanité qui les guette, voire les entraîne vers des abysses de violence.

Suite....en fait, le problème des femmes ce sont les hommes ...qui s inscrivent encore aujourd'hui dans des schémas de forme de possession...de plus, vient se greffer de nouvelles idéologies wokistes dégenrées en particulier aux USA qui defavorise les femmes ..car moi je vois dans ces idéologies non pas de la liberté mais une franche misogynie. Et les femmes afghanes ne sont pas prêtes d être libérées, les dirigeants de leur pays étant assis sur entre autres 1000 milliards de dollars de lithium,précieux pour les batteries électriques, personne ne viendra à leur secours, le lithium étant plus important que quelques femelles une constante, les femmes sont souvent sacrifiées sur l autel de l économie ...

Le problème des femmes, c'est que leur corps n'est pas simplement instrumentalisé, possédé, exploité industriellement commercialement sexuellement etc...il subit aujourd'hui partout des désincarnations multiples et une politisation forcenée. Le retour au vintage répond à un chômage accru des hommes et à la perte de sécurité et de confiance dans les sociétés urbaines de plus en plus violentes à leur égard. Besoin de protection..nécessité inconsciente démographique ?.l expression de la féminité interdite dans des pays religieux peut etre un contrepoids politique face à l occident, l air de dire, plus vous serez radicaux, plus nous le serons et notamment sur le sujet même que vous dénoncez chez nous. Les femmes sont encore aujourd'hui des trophées, des pondeuses, ou des bêtes de somme.

En plus du sujet traité dans la Chronique, à mon avis il y a Deux autres points Inquiétants avec Trump 1- Son Indifférence au sujet du Réchauffement Climatique ! 2- Son amitié avec Netanyahu et Elon Musk ! Ce qui forme Un Trio Infernal ouvert à toutes les Aventures !!! Personnellement j'avais souhaité que Kamala Harris gagne ! Même si pour beaucoup de problèmes nous concernant c'est du Kif Kif ! Cependant, une Grosse Question s'impose : pourquoi donc cette Dame avec Beaucoup de Talent était Acculée au Silence quand elle était Vice-présidente ???!!! ... Merci

la politique interne aux usa ,c'est leur affaire,mon souhait est que le nouveau président américain se rend compte du danger que représente le régime d'alger qui fait tout pour nuire au maroc allié des usa, le maroc est un pays de paix ami des usa depuis plus de cent ans,un ami fidèle auquel les usa font confiance,mr le nouveau président usa ,bonne chance!

Nonobstant l'estime et le respect que je vous dois, il me semble que la question ne peut pas être traitée uniquement sous l'angle de la liberté, mais plutôt sous l'angle de l'éthique aussi. Sans entrer dans la polémique, que dirait on demain, si les hommes décident de faire la vasectomie ?

Partout le progrès social est en recul . Partout l'obscurantisme étend peu à peu son ombre . Bientôt ce sera la fin des Lumières . Les droits et libertés individuels sont en régression . L'extrême droite prend le pouvoir partout en Europe . La xénophobie, le racisme , reviennent en force . Ce sont les plus faibles qui en paient le prix : les femmes , les immigrants .

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