Après une première réunion en août dernier à Amman, en Jordanie, dont le but était de fixer les objectifs communs de cette initiative, une deuxième réunion aura lieu dans une semaine à Riyad pour constituer ensemble le dossier final à présenter aux GAFAM. Les pays concernés sont, outre le Maroc, l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis, l’Égypte, l’Irak, la Jordanie et la Tunisie.
«Nous savons tous que ces géants du net se trouvent à la Silicon Valley, en Californie, mais ont aussi des bureaux domiciliés à Dubaï avec des responsables principalement émiratis, d’où la pertinence d’un dossier commun avec le groupe de la Ligue arabe», explique une source au sein du ministère, interrogée par Le360.
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Et d’ajouter: «Notre but en tant que département ministériel de la Communication n’est pas seulement d’entrer en contact avec ces GAFAM, mais il est aussi grandement temps d’avoir des représentants de ces plateformes chez nous au Maroc.» En effet, la présence de ces plateformes au Royaume assurerait un contact continu et plus fluide.
Notre source continue en faisant référence à la troisième et dernière étape, qui sera de rencontrer les responsables de ces plateformes dans la région MENA et poser les vraies problématiques pour activer le travail.
Pour le cas du Maroc, les points primordiaux sont: combattre la désinformation sur internet, la publicité mensongère y compris, et imposer une taxation. C’est-à-dire que, selon notre source, ces créateurs de contenus appelés «influenceurs» s’incrustent dans le marché de la publicité qui connaît déjà assez de difficultés depuis le Covid-19 et font de gros bénéfices individuels sans participer à l’économie du pays, ce qui n’est pas équitable vis-à-vis des salariés.
Nous faisons aussi référence à Mustapha Amedjar, directeur de la Communication et des relations publiques au ministère de la Jeunesse, de la culture et de la communication, qui, déclarait lors de la réunion d’août dernier, que «le Maroc figure parmi les pays les plus exposés aux fuites des revenus des impôts et de la publicité, dominés par les réseaux sociaux, ce qui impacte négativement le secteur des médias publics».
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«La création de contenu est considérée comme un métier libéral et ce n’est pas le rôle d’un département ministériel de la Communication de créer un organigramme hiérarchique pour réguler toute cette nouvelle profession», poursuit notre source, précisant que «notre devoir est plutôt de réguler le champ numérique marocain et le nettoyer de ce que peuvent produire ces créateurs de contenu comme fake news. C’est d’ailleurs la motivation principale derrière notre participation à ces réunions.»
En plus d’être présents dans le marché de la publicité, certains «influenceurs» se prétendent aussi journalistes en diffusant des informations à tout va sur leurs réseaux sociaux. Tantôt inconscients de la gravité de leurs actes, tantôt en soif de buzz, ceux-ci peuvent créer involontairement ou intentionnellement des conséquences graves, jusqu’à semer la zizanie dans le pays.
«C’est ce qui arrive en l’absence de hiérarchie. Si demain un journaliste diffuse une fausse information, il sera possible de prendre contact avec son supérieur, mais lorsque c’est un créateur de contenu, il n’y a aucun interlocuteur direct auprès de qui l’on peut se plaindre. Par contre, la plateforme sur laquelle il est actif, elle, peut le sanctionner. Voilà pourquoi nous avons choisi de céder la main aux GAFAM à ce sujet» explique notre source.
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Prenons l’exemple de l’Allemagne, qui a signé un accord avec Google pour tout ce qui concerne les fake news. Un observatoire y a été mis en place avec un délai de 48 heures pour retirer d’internet toute trace de désinformation détectée. Sinon, de lourdes amendes s’élevant à plusieurs millions d’euros sont distribuées. C’est ce modèle allemand pour le traitement des fake news qui sert d’inspiration au ministère de la Communication marocain. Notre source tient tout de même à saluer les efforts de la MAP, qui tient un bon service de fact-checking pour combattre la désinformation à l’échelle nationale.
La collaboration avec les géants du net, selon le ministère, nécessitera une volonté politique et une prise de conscience de l’influence rapide, et parfois dangereuse, des réseaux sociaux dans la société actuelle. Cependant, le ministère insiste que cette initiative ne remet pas en cause la nature démocratique du pays, mais vise plutôt à prévenir l’anarchie sur les réseaux sociaux, allant de la désinformation au discours haineux, entre autres.
Le but du ministère n’est donc pas de prendre le rôle d’une quelconque autorité de régulation, mais plutôt de mettre de l’ordre dans le champ numérique marocain afin de protéger l’intérêt des utilisateurs des réseaux sociaux, des consommateurs, et même des médias.