Le Maroc doit réformer son code pénal. La raison en une phrase toute simple et à la portée de tous ? Parce que ce code est en retard par rapport à la société d’aujourd’hui.
C’est une raison bonne et suffisante. Pour le reste, et comme disait feu Hassan II (à propos du Sahara): «Laissez-moi le drapeau et le timbre, tout le reste est négociable!». Transposée à notre contexte actuel, la petite phrase royale donne: «Entre gens raisonnables, discutons de tout et voyons ce qu’on peut faire!».
Le champ des possibles est tellement large. Beaucoup de lois sont devenues obsolètes, ridicules. Les maintenir est une invitation à les violer. Nous sommes de plus en plus nombreux à devenir ainsi, et raisonnablement, des hors-la-loi, comme le collectif qui milite pour abroger la loi pénalisant les relations sexuelles entre adultes consentants.
Et puis ce n’est pas tout. Le code de la famille attend aussi sa réforme. La dernière en date a permis des avancées. C’était en 2004. Depuis, la société est allée vite, elle a accéléré au point que cette Moudawana 2004 nous paraît aujourd’hui en retard, décalée, insuffisante.
Il y a donc du boulot, du beau boulot en perspective. Jusqu’où ira le législateur? Comme l’appétit vient en mangeant, soyons raisonnables, demandons l’impossible !
Nous avons une société civile, et une société tout court, qui demande le changement. Nous avons aussi, et c’est assez rare, un gouvernement ouvert au dialogue. Quel est le problème, alors?
Le problème, c’est qu’en face, il y a une arrière-garde qui freine des quatre fers et ne veut rien savoir. Pourquoi bloquent-ils ? Vous l’avez compris, parce que la réforme doit porter sur des questions liées aux libertés individuelles et aux droits des femmes.
Sexe, avortement, adoption, égalité dans l’héritage, liberté de culte, etc. Ces questions énervent considérablement les champions de l’arrière-garde. Ils refusent d’en entendre parler parce qu’ils entendent maintenir la jeunesse marocaine sous tutelle.
Leurs arguments? Dans le fond, aucun. Ils ne veulent pas d’une société plus libre, plus égalitaire, qui respecte davantage l’individu, qui respecte la différence. Ils prétendent que de telles aspirations ne peuvent pas être «marocaines», que ceux qui les portent «servent en réalité des agendas étrangers». Et puis quoi encore?
C’est le genre de discours qui met fin au débat. Il n’y a plus rien à discuter. C’est comme si quelqu’un vous disait : «Je refuse de discuter avec vous, amenez votre père ou votre tuteur légal!».
Donc pas de dialogue possible. D’un côté, nous avons des gens qui veulent avancer, et de l’autre des ayatollahs qui déclarent forfait. La partie se jouera alors sans eux, mais «entre gens raisonnables capables de discuter de tout et de voir ce qu’on peut faire» : c’est tout le mal que l’on peut souhaiter à la société civile et au gouvernement qui lui fait face.