À la rencontre des écrivains du SILEJ: la littérature jeunesse, miroir et remède des défis contemporains

Sophie Laroche, écrivaine française, au SILEJ. (K.Essalak/Le360)

Le 25/12/2024 à 09h50

VidéoLe Salon international du livre pour l’enfance et la jeunesse (SILEJ) de Casablanca a offert un cadre d’échanges riches et inspirants entre auteurs, enfants et parents. Le360 est allé à la rencontre de quatre autrices.

De tout temps, la littérature s’est imposée comme un vecteur privilégié de transmission des idées et des messages, une passerelle intemporelle entre les esprits et les époques. À la veille de sa clôture, Le360 s’est rendu au Salon international du livre pour l’enfance et la jeunesse (SILEJ) afin de rencontrer, dans le stand de l’Institut français, quatre romancières et de mieux comprendre les combats qu’elles mènent à travers la fiction.

Marie Alhinho et Nine Gorman, un duo français d’autrices de romans jeunesse, ont fait de la lutte contre le harcèlement scolaire l’une des thématiques centrales de leur travail. Pour elles, les livres ne sont pas seulement des moyens d’évasion, mais aussi des outils puissants pour aborder avec les jeunes des sujets sensibles. «On a envie de dire aux ados qu’ils ne sont pas seuls et qu’ils peuvent toujours trouver de l’aide s’ils osent demander», explique Marie Alhinho.

C’est en construisant leurs fictions autour de personnages auxquels les jeunes peuvent s’identifier que les deux romancières mènent leur combat et transmettent leurs messages de résilience. Nine Gorman souligne: «Lorsque tout semble sombre, il faut garder espoir. Après la tempête, le soleil réapparaît toujours.»

Nine Gorman souligne que le harcèlement touche particulièrement les jeunes depuis l’essor des réseaux sociaux, qui offrent un accès facilité à quiconque s’y inscrit. Elle évoque également le rôle des parents dans la prévention et la gestion du harcèlement. Ces derniers doivent, selon Marie Alhinho, «ouvrir la conversation d’une manière qui ne soit pas abstraite et réussir à trouver les mots pour avoir un dialogue concret avec l’enfant».

Chadia Loueslati, dessinatrice tunisienne de bande dessinée, a choisi de raconter la jeunesse de la grande diva Oum Kalthoum dans son dernier ouvrage. En mettant en lumière son parcours hors du commun, cette biographie illustre la force de caractère et l’émancipation d’une femme ayant défié les conventions sociales de son époque. Un exemple, selon elle, pour la jeunesse, et pour les filles en particulier. «Oum Kalthoum était une féministe avant l’heure. Elle a imposé un contrat de mariage à son époux, lui accordant le droit de divorcer, chose exceptionnelle à l’époque», explique l’autrice.

En évoquant les obstacles surmontés par cette icône égyptienne, Chadia Loueslati insiste sur le rôle joué par les parents, notamment le père de Oum Kalthoum, un imam tiraillé entre la rigueur de ses convictions et l’éclat du talent de sa fille. Incapable d’accepter que ce don du ciel reste dans l’ombre, il la déguisait en garçon pour lui permettre de psalmodier le Coran et d’offrir au monde cette voix qu’il appelait «le Rossignol». La dessinatrice partage un message d’espoir aux enfants et aux parents: «Croyez en vos enfants, soutenez-les. Rien n’est impossible pour ceux qui s’accrochent à leurs rêves.»

Sophie Laroche, écrivaine française pour la jeunesse, a mis en avant l’importance de l’inclusion et du respect des différences à travers un cycle de livres intitulé «Les enquêtes d’Anatole Bristol». En utilisant des intrigues sociales et des personnages ancrés dans le quotidien des jeunes lecteurs, elle aborde des thèmes variés tels que le handicap, le harcèlement et les étiquettes sociales. «Les enfants vivent des souffrances qui, pour nous adultes, peuvent sembler insignifiantes, mais qui sont profondément marquantes pour eux», rappelle Sophie Laroche. En transmettant des messages d’amitié et de partage, elle espère encourager les jeunes à affronter leurs difficultés avec solidarité.

La littérature jeunesse comme moteur de dialogue intergénérationnel

Au-delà des histoires, le SILEJ et l’afflux des visiteurs, souvent des parents accompagnés de leurs enfants, démontrent que la littérature jeunesse peut être un pont entre les générations. Les parents, parfois réticents à s’intéresser à cette littérature, peuvent y trouver, insistent les autrices, des outils précieux pour engager des discussions profondes avec leurs enfants. Comme le souligne Marie Alhinho, «c’est magique de voir des liens se créer à travers la fiction».

Le Salon international du livre pour l’enfance et la jeunesse, par ses rencontres et ses échanges, illustre le rôle essentiel des auteurs jeunesse dans la société: celui d’éveiller les consciences, d’inspirer et de renforcer les liens familiaux et sociaux. La littérature jeunesse se révèle alors comme un formidable vecteur de transformation culturelle.

Par Camilia Serraj et Khalid Essalak
Le 25/12/2024 à 09h50