Les récents sommets arabe et islamique, au Caire et à Ryad, ont révélé au monde la grande solitude dont souffre le président algérien Abdelmadjid Tebboune, ainsi que l’absence totale de crédit marquant sa diplomatie et ses positions sur la question palestinienne. Bien avant la tenue du sommet du Caire, couronné par l’adoption d’un plan arabe pour la reconstruction de Gaza, le président algérien a eu recours à tous les ressorts de la dramaturgie politique et médiatique pour signifier les raisons de sa non-participation à cette rencontre.
Prétextant que l’Algérie n’a pas été suffisamment associée aux travaux préparatoires de ce sommet, il avait décidé de le boycotter personnellement. Mais comble de l’ironie, il y a envoyé son ministre des Affaires étrangères, Ahmed Attaf, pour occuper le siège de l’Algérie. Cette situation inédite avait déjà interpellé les observateurs sur le côté irrationnel de la position algérienne: si le régime algérien décide de boycotter le sommet arabe et ses résultats politiques, il est censé traduire ce boycott soit par une absence totale, soit par un niveau de représentation diplomatique très bas.
En fait, le sommet extraordinaire arabe sur Gaza a mis en lumière deux faits majeurs de la diplomatie algérienne: ses contradictions sur la question palestinienne et ses très mauvaises relations avec l’environnement arabe. Depuis déjà quelques années, Abdelmadjid Tebboune utilise la question palestinienne non pas comme une cause qu’il faut servir pour aider les Palestiniens à accéder à leurs droits face au gouvernement israélien, mais comme un argument de propagande destiné à asseoir ses légendes pour une consommation politique interne. Sa célèbre posture au cours du sommet arabe d’Alger, quand il lança à la presse: «La question palestinienne, laissez-la moi, je m’en occupe personnellement», est restée dans les mémoires pour sa vacuité et sa vantardise inutile.
Pendant la guerre entre Israël et le Hamas, le régime algérien est resté muet sur le plan diplomatique et paralysé sur le plan de l’action humanitaire. Alors que la guerre faisait rage et que les civils palestiniens tombaient par milliers, le régime algérien s’est contenté d’une traditionnelle logorrhée de dénonciations verbales. Il a poussé la contradiction dans ses démarches jusqu’à interdire aux Algériens toute manifestation populaire destinée à exprimer leur solidarité avec la population palestinienne de Gaza.
«Avec les pays du Golfe, le régime de Tebboune entretient des relations conjuguées sur le mode du pugilat permanent, comme c’est le cas avec les Émirats arabes unis ou l’Arabie saoudite.»
Le régime Tebboune a montré une totale incapacité à agir sur les événements et a dévoilé le visage d’un pays qui utilise la question palestinienne uniquement à des fins de propagande interne. Cette réalité a été clairement perçue par les autres pays arabes -notamment ceux partageant des frontières géographiques avec conflit israélo-palestinien- qui ont signifié au régime d’Alger que l’heure est à l’action et aux propositions concrètes et sérieuses pour protéger la paix et la stabilité de cette région, et non pas à l’exploitation d’une tribune pour se faire mousser par un delirium nationaliste détaché de toute réalité.
Cette séquence diplomatique a aussi mis en lumière la grande tension qui caractérise les relations entre le régime algérien et les pays arabes. À l’exception de la Tunisie de Kaïs Saïed, mise de force sous le boisseau à cause de sa grande dépendance économique et énergétique, le président Tebboune ne peut se prévaloir d’aucune amitié solide avec un autre pays arabe. Pas même le Qatar, décrit régulièrement par la presse algérienne comme un allié de l’Algérie: le réalisme politique de Doha ne l’autorise pas à partager les lubies algériennes.
Avec les autres pays du Golfe, le régime de Tebboune entretient des relations conjuguées sur le mode du pugilat permanent, comme c’est le cas avec les Émirats arabes unis ou l’Arabie saoudite. Il faut rappeler que les deux pays ont perdu toute confiance en ce régime quand ils avaient tenté de mener une médiation de réconciliation entre le Maroc et l’Algérie. Pour des raisons qui leur paraissaient irrationnelles, l’Algérie s’était enfermée dans son refus de toute médiation, affaiblissant davantage la capacité des pays arabes à s’unir et à peser efficacement sur le cours des événements.
Le président algérien vit une grande solitude arabe. Il n’y a qu’à voir son agenda diplomatique vide de toute visite importante dans des pays arabes pour se rendre compte que non seulement Tebboune n’est pas le bienvenu dans les capitales arabes, mais aussi que les solutions arabes pour la paix et la reconstruction sont produites en dehors de la participation algérienne, jugée nocive et paralysante.
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