Xavier Driencourt, ancien ambassadeur de France à Alger, estime que le Royaume du Maroc «a pris une longueur d’avance» sur l’Algérie, notamment par la signature des Accords d’Abraham.
Le diplomate, qui a été en poste à Alger pendant huit ans, entre 2008 et 2012 et entre 2017 et 2020, estime que la signature de l’accord tripartite Maroc-USA-Israël a apporté un grand changement dans la région.
«Il y a eu un tournant dans cette région avec la signature des Accords d’Abraham. C’est clair», a-t-il tranché.
Le diplomate français a tenu ces propos au cours d’une interview qu’il a accordée au magazine Causeur, dont les grandes lignes ont été reprises par le quotidien Al Ahdath Al Maghribia.
Dans cet entretien, il analyse la situation géopolitique en Afrique du Nord.
Interrogé sur les conséquences de la récente reconnaissance par Israël de la souveraineté du Maroc sur le Sahara, il a estimé qu’il y a eu «un tournant dans cette région avec la signature des Accords d’Abraham».
Il y a à peine quelques années, a-t-il souligné, l’arrivée d’Israël dans la région relevait de l’impensable.
Personne ne pouvait s’attendre, non plus, à un possible rôle joué par Tsahal et à une montée en puissance progressive des échanges politiques, militaires, entre le Maroc et Israël.
Bref, «les choses peuvent s’emballer et c’est un changement radical qui comporte des risques», a-t-il prévenu.
L’ex-ambassadeur français a aussi remarqué qu’il y avait désormais «d’un côté Rabat, Washington et Tel-Aviv et de l’autre Alger soutenu par Moscou».
«On constitue une sorte de mur entre les deux pays qui déjà s’entendaient mal. Ces rapports de forces peuvent aboutir à un certain équilibre, mais aussi à un possible dérapage», explique-t-il.
Sur un autre volet, poursuit le quotidien, l’auteur de «L’énigme algérienne: Chroniques d’une ambassade à Alger» considère que «les contentieux sont nombreux» entre Rabat et Paris. Les relations franco-marocaines sont «très dégradées», a-t-il constaté.
Ces relations, a expliqué le diplomate, «ne procèdent pas de la même physionomie que les relations franco-algériennes. Ce que l’on constate, c’est que Paris a quasiment tout misé sur Alger et finalement, ce pari algérien que nous avons fait aux forceps nous fait perdre sur les deux tableaux: aucun retour positif côté algérien, une froideur distante du côté de Rabat qui cherche à reprendre la main face à Paris».
En définitive, les Français sont «seuls et nus dans ce jeu triangulaire» entre Rabat, Paris et Alger.
Aussi, le diplomate appelle-t-il la France à revoir sa stratégie et à renouer le dialogue avec ses deux partenaires historiques. En effet, face à ce contexte géopolitique complexe, Xavier Driencourt estime que la France doit changer son approche et ses méthodes.
Le diplomate considère que la France doit commencer par reconstruire les relations franco-marocaines et franco-algériennes, qui ont été mises à mal par plusieurs crises diplomatiques ces dernières années. Ce qui n’est pas chose facile, car «tout ou presque est à reconstruire», a-t-il conclu.