«Les relations maroco-tunisiennes n’ont jamais connu le moindre problème ni sous le pouvoir de Habib Bourguiba, ni sous celui de Zine El-Abidine Ben Ali, ni durant ma présidence…». C’est en ces termes que l’ancien président tunisien, Moncef Marzouki, déplore que l’actuel chef d’État tunisien, en accueillant officiellement le chef des séparatistes du Polisario en août dernier, se soit laissé berner par «la prose algérienne sur la création d’un sixième État au Maghreb, rompant ainsi la ligne de neutralité observée par la Tunisie, depuis des décennies, à l’égard du conflit entre le Maroc et l’Algérie». Il confirme ainsi que le différend créé autour du Sahara marocain a pour principale partie prenante l’Algérie.
Dans un entretien accordé jeudi dernier à Canal 22 Algérie, une chaîne lancée en Europe par Ghani Mahdi, un journaliste et dissident algérien en exil, Moncef Marzouki a accusé la «dictature algérienne» d’être directement et volontairement responsable de la détérioration actuelle des relations maroco-tunisiennes.
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Il a ainsi fermement démenti les récentes déclarations de Tebboune, selon lesquelles la Tunisie est ciblée par le Maroc. Car la victime est d’abord Kais Saied, qui a placé son pays au bord de la faillite en le plongeant dans une profonde crise politique et économique sans précédent. Or, le président algérien avait, pour rappel, déclaré à la chaîne Al Jazeera, il y a moins d’un mois, que «les choses se sont compliquées davantage après l’accueil réservé par la Tunisie au président de la «RASD», Brahim Ghali.
Depuis, la Tunisie est visée par un complot. L’Algérie se tient à ses côtés. Nous n’abandonnerons jamais la Tunisie, n’en déplaise à certaines parties».
Pour Marzouki, il s’agit là d’«une prose totalement fausse qui ne conduira qu’à l’implosion de l’Union du Maghreb arabe» du fait de l’acharnement de l’Algérie contre le Maroc et sa tentative de transformer la Tunisie en wilaya algérienne. Dans ce dernier cas de figure, ajoute-t-il, la «dictature algérienne est en train de miser sur un autre dictateur pour maintenir la Tunisie sous son aisselle», et ce dans le seul but d’empêcher l’ancrage de la démocratie en Tunisie.
Marzouki a ainsi estimé que le Hirak algérien était «la continuité de ce qui s’est passé en Tunisie en 2011» et dit «assumer son soutien à ce Hirak, seule voie démocratique et populaire pour mettre fin à la dictature algérienne», à condition qu’il se réorganise et se structure.
Interrogé sur les arrestations régulières de militants politiques algériens en Tunisie et leur extradition vers leur pays, Marzouki a affirmé qu’ils sont les victimes de la «connivence entre deux régimes dictatoriaux» et dit soutenir ces Algériens qu’il considère comme des «prisonniers de guerre, qui se battent de la même façon que leurs pères et grands-pères ont combattu le colonisateur français» dans les années 50 durant la Guerre d’Algérie.
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Lors de cet entretien, Moncef Marzouki a également renouvelé son soutien au plan d’autonomie marocain au Sahara, réitérant son appel lancé en 2020 aux séparatistes du Polisario, auxquels il rappelle qu’au lieu de continuer à vivoter dans la misère des très étroits et invivables camps de Tindouf, ils n’ont d’autre issue que de vivre sous souveraineté marocaine. En effet, c’est cette solution qui leur permettra non seulement d’être des citoyens d’un grand État, le royaume du Maroc, mais aussi de plusieurs États, à savoir ceux de l’Union du Maghreb arabe.
Il a ainsi conseillé à l’Algérie de lever une bonne fois pour toutes son hypothèque sur cet ensemble régional de plus de 100 millions d’habitants qu’elle prend en otage à cause de 200.000 Sahraouis -qui ne seraient en réalité que moins de 40.000- retenus dans les camps de Lahmada.
Marzouki estime que finalement, c’est tout le projet de construction maghrébine qui pâtit de l’entêtement du régime algérien à jouer à la division et non à la coopération avec son voisinage.