Pour le Conseil de sécurité, le temps de trouver une solution au conflit du Sahara occidental commence en 2007. Cette année constitue le point d’ancrage qui détermine l’examen du dossier et les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité qui y sont afférentes. Dès le préambule du projet de la résolution du Conseil de sécurité sur le Sahara qui sera votée le 30 octobre 2024, dont le porte-plume sont les États-Unis d’Amérique, il est appelé de façon claire à mettre en œuvre toutes les résolutions allant de 2007 à 2023. Aucune résolution antérieure à 2007 n’est retenue. Cette année, devenant l’alpha et l’oméga, fixant les contours d’une solution au conflit du Sahara. Est-il utile de rappeler que c’est en 2007 que le Maroc a mis sur la table le plan d’autonomie qui constitue pour le Royaume l’unique solution au conflit du Sahara? D’ailleurs, le projet de la résolution du Conseil de sécurité de 2024 «prend note de la proposition marocaine présentée au secrétaire général le 11 avril 2007 et salue les efforts sérieux et crédibles du Maroc pour faire progresser le processus vers une résolution».
Il est très important aujourd’hui de rappeler au régime algérien qui abreuve de mensonges et de propagandes ses médias et les relais séparatistes du Polisario que l’instance décisive aux Nations-unies distingue le temps du conflit du temps de la solution. Si le conflit du Sahara atlantique remonte à 1975; le temps pour y trouver une solution commence en 2007.
Une tempête dans un verre d’eau
La résolution s’inscrit dans la droite ligne de celles adoptées en 2021, en 2022 et en 2023, enracinant la voie du compromis et du réalisme comme solution au différend du Sahara occidental, bien loin des slogans creux sur un impossible «référendum d’indépendance» que le régime d’Alger ressasse. Le texte, que Le360 a pu consulter, apporte très peu de nouveautés par rapport à ceux de 2021, 2022 et 2023. Et une chose est sûre: aucune mention n’y est faite du ballon d’essai, probablement le dernier, de Staffan de Mistura quant à une partition du Sahara marocain entre le Royaume et le front Polisario. Une piste catégoriquement rejetée par le Maroc, en 2002 déjà, année où l’ancien Envoyé personnel James Baker, poussé par l’Algérie de Abdelaziz Bouteflika, l’a posée sur la table comme aujourd’hui.
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«C’est du réchauffé. Le Maroc ne négocie pas son Sahara ni son intégrité territoriale. Le Royaume négocie autour d’un conflit régional avec un pays voisin qui lui dispute sa souveraineté sur sa terre. Autrement dit, le Sahara marocain n’a jamais et ne sera jamais l’objet d’un quelconque compromis ou ne serait-ce que d’une discussion», a tranché le ministre des Affaires étrangères, Nasser Bourita, lundi 21 octobre lors d’une conférence de presse tenue en marge de sa rencontre avec le chef de la diplomatie de l’Estonie, Margus Tsahkna. «Ce que Staffan de Mistura devait nous préciser, c’est la source qui lui a encore soufflé cette idée», a noté Nasser Bourita. Cela, nous n’en savons rien pour l’instant.
Ce que nous savons en revanche à travers le projet de résolution, c’est que l’autre idée de Staffan de Mistura, voulant que le Maroc détaille sa proposition d’autonomie, au demeurant saluée en l’état par le Conseil de sécurité, a également été mise de côté, n’étant aucunement et nulle part suggérée dans le texte onusien. L’intérêt grandissant que suscite l’offre marocaine crée, selon l’Envoyé personnel, «une attente, peut-être même un droit, de mieux comprendre ce que ce plan implique». Pour lui, le moment est venu, et pour tous les interlocuteurs, d’explorer les modalités que le Maroc envisage concrètement.
La réponse de la diplomatie marocaine est franche. Pour Nasser Bourita «Nous sommes évidemment disposés à aller dans le détail de cette proposition, dans le respect des lignes rouges que nous nous sommes fixées et sans toucher aux bases qui en constituent le fondement, le jour où toutes les parties impliquées dans le conflit accepteront l’autonomie comme seule base d’une solution au différend. En l’absence de cette volonté, comme c’est le cas actuellement, une telle éventualité est prématurée. Pour l’heure, elle n’est pas à l’ordre du jour». Au vu du projet de résolution qui devra être voté le 30 octobre, l’agitation créée autour de la dernière sortie de Staffan de Mistura a tout d’une tempête dans un verre d’eau.
Le régime d’Alger rappelé à la table des négociations
Tout en étant très actif sur le dossier, de sa genèse à aujourd’hui –les mauvaises langues voudraient que le réchauffé servi cette année soit de son fait–, en passant par l’étape James Baker, le régime d’Alger continue de se dire hors champ et nullement concerné par le conflit. Et pour la énième fois, il est rappelé à ses responsabilités par le Conseil de sécurité. La mouture de la résolution à venir cite en effet l’Algérie au moins 5 fois comme partie prenante au conflit, et donc à sa solution. Ceci, contre 7 fois pour le Maroc et autant pour le front Polisario. C’est dire.
Alors qu’elle est actuellement membre non permanent du Conseil de sécurité, l’Algérie est de nouveau sommée de revenir au processus des tables rondes qu’elle a quitté. Ainsi, lit-on, la future résolution «se félicitant de l’élan créé par la première table ronde des 5 et 6 décembre 2018 et la deuxième table ronde des 21 et 22 mars 2019, ainsi que de l’engagement du Maroc, du front Polisario, de l’Algérie et de la Mauritanie dans le processus politique des Nations unies sur le Sahara occidental, de manière sérieuse et respectueuse afin d’identifier des éléments de convergence».
Le projet de résolution du Conseil de sécurité insiste sur les tables rondes en «rappelant les contributions importantes de l’ancien Envoyé personnel du secrétaire général pour le Sahara occidental à l’organisation de ces tables rondes». Ceci, notamment en convoquant à cette fin des consultations informelles à travers lequel le Maroc, le front Polisario, la Mauritanie et, là encore, l’Algérie doivent dialoguer «dans un esprit de réalisme et de compromis».
À préciser à ce titre que Staffan de Mistura fixe le mois d’avril 2025 comme date du retour au processus des tables rondes et des consultations sur le Sahara, selon le format précédemment convenu et en présence de toutes les parties. Y compris l’Algérie qui, tout en soutenant, abritant, finançant et armant le Polisario, se dit toujours «non concernée» par le conflit. Si aucune avancée significative n’est obtenue dans ce délai, qui marquera le 50ème anniversaire du déclenchement du conflit, Staffan de Mistura jettera l’éponge. «Ce sera pour moi une raison de suggérer au secrétaire général de réévaluer notre utilité», avait-il déclaré lors de son brief.
Reconduction de la MINURSO et rappels à l’ordre du Polisario
D’ici là, la résolution du Conseil de sécurité décide la reconduction du mandat de la MINURSO pour une année supplémentaire, soit jusqu’au 31 octobre 2025. L’organe exécutif de l’ONU exprime à cette occasion sa «profonde préoccupation de la rupture du cessez-le-feu (par le Polisario, NDLR), rappelant la proposition de la MINURSO en février 2024 de cesser les hostilités et d’éviter tout acte mettant en danger la paix et la sécurité». Là encore, le front séparatiste, auteur d’actes criminels de faible intensité à l’est du Mur de défense marocain, est rappelé à l’ordre. Le Conseil de sécurité insiste à cet égard sur l’importance du respect total et renouvelé du cessez-le-feu et «prend note des engagements fournis par le front Polisario à l’ancien Envoyé personnel».
Autre rappel à l’ordre, celui du nécessaire recensement de la population dans les camps de Tindouf. Le Conseil de sécurité «réitère avec force sa demande d’enregistrement des réfugiés dans les camps de Tindouf et souligne l’importance des efforts déployés à cet égard», lit-on.
La résolution exhorte à maintes reprises les parties à privilégier une «solution politique» consubstantielle «à l’esprit de compromis et de réalisme». Cette solution politique apportera sécurité et développement au Maghreb et dans le Sahel. «Reconnaissant que la réalisation d’une solution politique à ce différend de longue date et le renforcement de la coopération entre les États membres de l’Union du Maghreb arabe contribueraient à la stabilité et à la sécurité, menant ainsi à des emplois, à la croissance et à des opportunités pour tous les peuples de la région du Sahel», lit-on dans le texte de la résolution.
En matière de droits de l’Homme, le Conseil de sécurité «salue les mesures et initiatives prises par le Maroc, ainsi que le rôle joué par le Conseil national des droits de l’homme et ses commissions opérant à Dakhla et Laâyoune, ainsi que l’interaction du Maroc avec les procédures spéciales du Conseil des droits de l’Homme des Nations unies». En face, il ne manque pas de s’inquiéter tant de la situation humanitaire que de celle des droits de l’Homme à Tindouf, en territoire algérien.
Justement, tout est de savoir quelle sera la réaction de l’Algérie, membre non permanent de ce Conseil de sécurité qui la somme de prendre ses responsabilités. Alors qu’elle refuse de participer aux tables rondes et ne se considère pas plus qu’un «observateur inquiet», dans les faits, Alger soutient, abrite, arme et finance le front Polisario qui disparaitra sans les ressources du régime algérien. Cette année encore, son rôle en tant qu’acteur principal du conflit est mis en lumière. La présence d’Alger au Conseil de sécurité risque de se révéler extrêmement embarrassante pour le régime. Tous les regards seront tournés vers son représentant le mercredi 30 octobre. Quoi qu’il fasse, aux yeux de la communauté internationale, c’est en acteur qui tient le haut de l’affiche qu’il va s’exprimer.