Alors que les prix de gros de la viande bovine oscillent à Casablanca entre 90 et 92 dirhams le kilogramme (kg), et que la viande ovine se négocie à près de 120 dirhams/kg, l’annonce de l’importation de viandes rouges fraîches, congelées ou réfrigérées, a fait naître chez les consommateurs l’espoir d’une baisse rapide des tarifs. Un espoir toutefois tempéré par les professionnels, qui estiment que l’impact de cette mesure reste incertain pour le moment, car «plusieurs facteurs sont à prendre en compte avant de pouvoir tirer des conclusions».
C’est le cas de Hicham Jouabri, secrétaire régional des commerçants de viandes rouges au gros à Casablanca. «Tout d’abord, les démarches d’importation des produits frais n’ont pas encore commencé. Les opérateurs attendent toujours la publication du cahier des charges par les autorités compétentes. Ce document, essentiel à la régulation du processus, doit établir les conditions sanitaires, techniques et logistiques que devront respecter les producteurs des pays autorisés à exporter vers le Maroc. En l’absence de ce cadre réglementaire, il est impossible de contacter directement les fournisseurs internationaux ou de planifier des accords d’importation», détaille-t-il.
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Une fois ce cahier des charges établi, l’effet sur le marché marocain dépendra d’autres éléments. «Il faudra évaluer les frais de stockage des viandes importées, car celles-ci nécessitent des infrastructures adaptées pour leur conservation. Le besoin de réfrigération, conjugué à celui d’un contrôle strict, aura des implications sur la gestion logistique des importateurs», signale notre interlocuteur.
Diversification des sources d’importation, mais à quel prix?
«Pour assurer une baisse des prix des viandes rouges, les importateurs devront impérativement se tourner vers des pays offrant des tarifs compétitifs», ajoute un autre professionnel du secteur. Toutefois, la diversification des sources d’importation, certes indispensable pour réduire les coûts, impose des contraintes logistiques supplémentaires et impose des investissements dans les infrastructures de stockage adéquates.
Les conditions de conservation, notamment la nécessité de disposer de chambres froides pour assurer la continuité de la chaîne du froid, ne sont actuellement accessibles qu’à une poignée d’opérateurs disposant des équipements idoines. Cette situation risque de limiter l’accès des petits et moyens opérateurs aux importations, réduisant ainsi leur compétitivité sur le marché, déplore-t-il.
Pour Hicham Jouabri, secrétaire régional des commerçants de viandes rouges en gros à Casablanca, «ces contraintes rendent prématurée toute projection sur une baisse des prix, tant que les importateurs n’auront pas une vision plus claire des coûts d’approvisionnement, des frais logistiques et des conditions de stockage nécessaires pour sécuriser ces opérations», détaille-t-il. «Les importations pourront certes jouer un rôle dans la stabilisation des prix, mais cela dépendra des efforts des professionnels pour optimiser leurs coûts et respecter les conditions de qualité et de conservation des produits», ajoute-t-il.
Une solution à court terme
Abdelali Ramou, président de l’Association nationale des vendeurs de viande rouge, se montre tout aussi réservé. S’il confirme que l’importation de produits frais peut avoir un effet stabilisateur sur les prix à court terme, il estime qu’une telle solution ne sera pas suffisante à long terme. «Des réformes structurelles seront nécessaires pour répondre à la demande croissante en viande rouge au Maroc et à la volatilité des prix, causée par des facteurs comme la fluctuation des prix internationaux, les coûts logistiques et les enjeux d’infrastructure», analyse-t-il.
«Au-delà de l’importation ponctuelle, il faudra mettre en place des solutions durables, comme le renforcement de la production locale, l’amélioration des infrastructures de stockage et de distribution, ou encore une meilleure régulation, afin d’assurer une stabilité du marché à long terme», conclut-il.